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Putsch du CND : Quand le CDP et ses alliés font preuve de mauvaise foi

Publié le lundi 5 octobre 2015 à 07h43min

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Putsch du CND : Quand le CDP et ses alliés font preuve de mauvaise foi

En moins d’une année, notre pays vient de traverser deux crises graves : l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et le putsch du 16 septembre 2015. J’omets les intrusions répétées du régiment de sécurité présidentielle (RSP) dans nos conseils des ministres dont la seconde crise est la conséquence logique. Nous avons été conduits là par l’entêtement d’une certaine classe (militaro)politico-affairiste qui ne conçoit la gestion du pays que par le clan auquel elle appartient. Et comme malheureusement certains individus ne tirent jamais de leçon de l’histoire, nous avons encore eu le droit récemment à une de leurs sorties.

A l’heure où le Burkina essaie de renaître de ses cendres après la dure éprouve récemment vécue, le CDP et ses alliés nous donnent leur point de vue sur la crise qui secoue (nous aurions plutôt dit qui a secoué mais c’est juste une question de point de vue) le pays et les voies d’y remédier durablement. Aussi nous ont-ils servi une déclaration aussi bien consternante que révoltante tant elle regorge de paradoxes, voire de contradictions. Nous ne nous amuserons pas à les relever tous au risque de ne jamais en finir. Nous nous contenterons juste d’en souligner quelques uns qui traduisent la mauvaise foi et le manque d’honnêteté de leurs auteurs, en nous adressant directement à eux.

1. Vous n’avez été ni commanditaires ni acteurs ni pourvoyeurs de ressources du coup d’Etat du 16 septembre dernier mais vous trouvez en quelque sorte qu’il était justifié puisque vous n’étiez pas indifférents à la cause d’exclusion avancée par le défunt conseil national pour la démocratie (CND) pour justifier son action (pas même besoin de faire allusion à la déclaration de soutien au putsch signée par vous) ; conséquence, jusqu’à l’heure où nous parlons, vous n’avez jamais condamné, encore moins manifesté votre opposition à cet acte ignoble. Pour des démocrates que vous êtes, de surcroît à qui la même chose est susceptible d’arriver dans le futur, cela donne à réfléchir.

2. Vous déplorez le fait que depuis le début de la transition le dialogue autour d’une table ait laissé place aux invectives par presse interposée, pourtant dans cet écrit (presse interposée), vous ne manquez pas d’invectives à l’encontre de la transition et de vos copains d’antan. Vous les accusez d’avoir accumulé pouvoir, fortune et privilège durant 25 ans en sachant que vous n’étiez pas en reste non plus à cette époque. Pire, vous avez voulu continuer à sucer le sang du peuple jusqu’à sa dernière goutte en accompagnant Blaise COMPAORÉ dans sa forfaiture (d’ailleurs vous ne reconnaissez toujours pas avoir commis une erreur de jugement condamnable), eux non. Curieusement aussi, vous ressortez les mêmes arguments invoqués par les putschistes (manigances au profit du mouvement du peuple pour le progrès -MPP-) pour discréditer la transition (qui certes n’est pas parfaite).

3. Vous ne jetez aucun discrédit sur notre armée nationale mais vous êtes réservés quant au bilan donné par le gouvernement de transition et confirmé par l’état-major général des armées sur l’assaut du camp Naaba koom II par l’armée (que nous n’appelons même pas loyaliste parce que c’est la seule que reconnaissons). Nous aimerons bien avoir l’adresse des sources indépendantes qui pourront nous donner le bilan officiel de ce « carnage ». Après tout il s’agit de fils et filles de ce pays qui étaient dans ce camp non ? Nous avons le droit de savoir ce qui leur est arrivé et de pleurer leur mort au besoin.

4. Vous êtes très attachés à la paix, à la stabilité et à la cohésion nationale et préconisez pour ce faire le dialogue et la réconciliation sans parler de justice pour les morts, les blessés et tous les autres dommages publiques et privés causés par l’acte insensé posé par le chef terroriste DIENDIÉRÉ et ses bêtes assoiffées de sang, entre autres le retard accusé par ce pays que vous aimez tant. Peut-on construire un temple sur une fondation d’argile ? D’autre part, en termes à peine voilés, vous appelez à un soulèvement populaire contre la transition. Un peu risqué pour la paix, la stabilité et la cohésion sociale non ? Pourquoi, au non de ces mêmes valeurs, ne vous résolvez-vous à pardonner à ceux qui vous ont « exclus » et à attendre les prochaines échéances présidentielles (les législatives et les municipales vous y participerez pleinement malgré l’incompréhensible « exclusion » dont êtes victimes non) ?
5. Etc.

Et comme le chien ne change pas sa manière de s’asseoir, c’est toujours la même sauce qui nous est servie depuis un bout de temps : théorie du complot, victimisation, appel à témoin de la communauté internationale, menace sur la stabilité du pays. Ce disque est rayé maintenant messieurs, trouvez autre chose.

Sachez qu’au stade où nous en sommes aujourd’hui dans ce pays, aucun parti n’est capable de remporter les élections présidentielles grâce à une fraude massive sans la bénédiction des autres, parce que les mécanismes sont bien en place pour des élections transparentes et crédibles. L’inclusion c’est un autre débat. Pour ma part, je ne vois aucun candidat méritant de compétir qui ait été exclu.

Enfin, si le CDP et ses alliés « inconnus » (qui auraient été plus dignes de se présenter ouvertement) ont un projet de société lumineux pour le rayonnement du Burkina, comme ils en sont « injustement » empêchés, si c’est pour l’intérêt supérieur de la nation et non leur intérêt égoïste, c’est la nation qui en sortira perdante et non eux, et cela leur sera reconnu dans la postérité. Alors qu’ils aillent voir ailleurs si nous y sommes en attendant 2020. Autrement si la théorie de la « révolution non encore achevée » venait à se répandre, ils l’apprendront à leurs dépens.

SOMÉ Melckisédek Judicaël Marouwana
Médecin radiologiste
jmarouwana@gmail.com

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