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« Le Yennengisme » : L’Héritage de l’Emanpacition de la Femme Burkinabè Selon Etienne Yonly

Publié le dimanche 8 mars 2015 à 12h33min

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« Le Yennengisme » : L’Héritage de l’Emanpacition de la Femme Burkinabè Selon Etienne Yonly

Chaque jour qui passe, les acteurs du développement de l’Afrique s’accordent de plus en plus sur la nécessité d’adapter les programmes de développement de nos sociétés à nos cultures et d’utiliser des aspects de nos cultures ou de notre histoire pour rendre les messages plus efficaces et pour montrer que les programmes proposés ne réfutent pas ou n’aliènent pas nos cultures. Mais s’il est vrai qu’il n’est pas toujours aisé de trouver une harmonie avec nos cultures dans beaucoup de domaines, il y a des domaines par contre où il existe des avantages comparatifs. Dans le domaine de l’émancipation de la femme, il me semble qu’en Afrique Sud Saharienne le Burkina Faso a un avantage comparatif avec l’histoire de la princesse Yennenga.

Malgré les nombreux efforts qui sont consentis dans nos pays pour l’émancipation de la femme africaine, au Burkina Faso et dans d’autres pays africains les messages ne sont pas toujours bien reçus par les populations souvent conservatrices et soucieuses de préserver leurs cultures. Ils sont souvent jugés contradictoires à nos religions et nos traditions. Pourtant l’importance de l’émancipation de la femme n’est plus un sujet controversé pour presque tous les gouvernements africains, tant le succès des programmes des gouvernements depend de la participation effective des femmes. Le succès des programmes dans des domaines tels que l’éducation, la sante publique, la planification familiale et bien d’autres est étroitement lié à l’émancipation de la femme. Pour ce qui est du Burkina Faso, je soutiens que nous avons manqué d’utiliser le patrimoine historique que nous avons avec notre héroïne nationale Yennenga pour renforcer nos efforts pour l’émancipation de la femme burkinabè.

L’histoire de Yennenga, la princesse de Gambaga, nous enseigne que Yennenga était une femme forte qui avait gagné le respect de la société, des hommes, des femmes, de son père, des chasseurs et des soldats. Elle avait semble-t-il fait ses preuves dans l’armée de son père - elle était semble –t-il- agile a l’arc et a la lance, et une très bonne cavalière. Dans la Série UNESCO Femmes dans l’histoire de l’Afrique « Yennega Princesse de Gambaga » publié en 2014 par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, il est dit que « Yennenga est souvent représentée chevauchant librement sa monture comme si rien, ni la société, ni la tradition, ni l’autorité paternelle, ne pouvait s’opposer à son esprit de liberté ». Donc de l’émancipation féminine par excellence au cœur même de notre histoire.

L’histoire de la princesse de Gambaga n’est donc pas seulement une histoire de la bravoure d’une femme, d’un groupe ethnique ou d’une société comme nous le savons déjà, elle est aussi l’histoire de l’émancipation de la femme en Afrique Sud Saharienne. Il y a eu d’autres femmes fortes et iconiques telles que la princesse Guimbi Ouattara de la région de Bobo Dioulasso, la reine Pokou en Côte D’Ivoire, mais l’histoire de Yennenga est particulière dans sa pertinence avec l’émancipation de la femme.

Contrairement à ce que nous pouvons penser alors, l’histoire de l’émancipation de la femme dans la société burkinabè ne date pas de nos temps. Elle est plus vieille que nous le pensons et occupe même une importante place dans notre dans notre histoire. Donc en plus d’être le pays des Hommes intègres, nous sommes aussi le pays de Yennenga et devons maintenant devenir aussi le pays femmes Yennengas. Nous sommes connus partout dans le monde comme le pays des Hommes intègres. Il nous reste à nous faire connaitre également comme le pays des Yennengas.

Nous avons tout a gagné en nous faisant connaitre comme le pays des Yennengas. D’abord nous nous honorons et honorerons nos ancêtres et nous occuperons une place qui est la nôtre dans le domaine de l’émancipation de la femme - chose qui honorera la vie Yennenga. Nous aurons aussi des partenaires pour nous accompagner dans cette chevauchée. La femme est le pilier du développement et les gouvernements et les partenaires au développement savent l’effet multiplicateur qu’il y a en investissant sur la femme et la jeune fille.

Somme nous prêts à chevaucher avec Yennenga, notre grand-mère, notre mère, notre tante, notre sœur, notre cousine, notre fille, notre voisine, etc.? Si oui, nous pouvons faire beaucoup de choses. Nous pouvons encourager et répliquer d’avantage et a grande échelle le Yennengisme dans nos sociétés, dans nos milieux, dans nos lieux de travail. Au niveau de l’éducation, nous pouvons faire de l’émancipation de Yennenga une récitation d’écolier en présentant Yennenga à nos écoliers comme une femme émancipée. Elle est déjà connue comme une femme brave, une guerrière. Nous savons déjà comment faire d’une chose une récitation d’écolier. Présentons la maintenant comme une femme émancipée. Nous avons déjà fait de « l’apartheid est un crime contre l’humanité » une récitation d’écolier au temps de Thomas Sankara. Aux Etats Unis les droits individuels sont une récitation d’écolier. Faire d’une chose une récitation d’écolier est une façon efficace de changer les mentalités. Nos élèves ne sont pas nos élèves si nous n’avons pas de récitations d’écolier pour eux. Sinon ils sont plutôt les élèves de l’occident ou d’autres pays.

Au niveau professionnel et social, si Yennenga était dans l’armée de son père, nous pouvons également encourager la participation féminine dans les domaines généralement réservés aux hommes, tels la politique, l’armée, le sport, le football, la conduite, les affaires, etc. Encourageons également toutes ces Yennengas qui labourent dure tous les jours dans nos familles, nos écoles, nos bureaux, les champs, et dans tous les secteurs de l’économie. Bannissons également les préjudices qui n’aident pas à l’émancipation de la femme. Yennenga n’a pas pu devenir l’héroïne qu’elle est sans le soutien de sa famille et de la société. Son père l’aimait et lui avait appris à chasser lui-même. Sa famille et la société avait accepté qu’elle monte à cheval et qu’elle combatte auprès des hommes. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de potion magique pour devenir une Yennenga ou pour créer des Yennengas. Il faut seulement avoir une famille et une société prête à vous aimer et à accepter de vous inclure et de vous respecter. La force de l’amour de la famille et de l’acceptation de société ont toutes été des facteurs importants qui ont assuré l’émancipation de Yennenga.

En conclusion, parler de l’émancipation de la femme comme un concept étranger, comme un concept occidentale, c’est omettre de lire des pages importantes dans notre histoire. N’allons pas inventer la roue si elle existe déjà. Nous avons l’émancipation de la femme au cœur même de notre histoire. Il suffit alors de vouloir partager cette information avec nos populations et de vouloir utiliser Yennenga comme modèle et exemple d’émancipation pour la femme burkinabè. Si nous avons pu réaliser cette émancipation dans notre histoire, nous pouvons répliquer ce que nous avons déjà fait sans enfreindre à notre culture. Nous pouvons envoyer un symbole fort au reste du monde que nous sommes le Pays des Yennengas en plus d’être le Pays des Hommes Intègres. Ce serait difficile d’imaginer que Yennenga n’approuverait pas cela si elle vivait ; elle aurait certainement été une championne des droits des femmes et de l’éducation des filles. Nous pouvons également rendre justice aux femmes en donnant autant de prix Yennenga aux femmes qu’aux hommes. A l’heure ou l’efficacité dans la communication de message est plus que jamais importante pour assurer le succès massif de nos importants programmes de développement, nous devons utiliser tous nos atouts si nous voulons notre rêve d’une société burkinabè équitable. La jeunesse burkinabè et la jeune fille burkinabè a eu Sankara le revolutionaire, Yennenga la guerrière, donnons-lui maintenant « Yennenga la femme émancipée » et soyons tous des « Etalons de Yennenga » tous les jours pour une émancipation réelle de la femme Burkinabe.

Par Etienne Yonly
De la Diaspora Burkinabè de la Région de Washington, DC - USA

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