Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Après la publication de la liste des représentants de la société civile au Conseil National de la Transition (CNT), après s’être rendu compte que certains acteurs désignés au compte de la société civile appartenaient aussi à des partis politiques, des voix se sont élevées pour protester contre la participation au CNT de ces acteurs à double casquette au titre de la société civile.
J’ai eu à participer aux échanges sur les réseaux sociaux. Face à la virulence de certains intervenants qui traitaient ces camarades de lutte « d’intrus » ou de « tricheurs » à extirper de la transition, et vu l’importance de la question, j’ai décidé, comme d’autres avant moi, de donner ma contribution à travers les médias.
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Face aux dérives monarchiques de notre processus démocratique voulues par Blaise Compaoré et les siens, plusieurs fronts se sont ouverts pour résister. Sur le front politique par exemple, des partis politiques d’opposition se sont retrouvés autour du Chef de File de l’Opposition d’alors pour mener le combat face au CDP et plus tard au Front Républicain. Au plan de la société civile, des organisations existant antérieurement ou créées ad ‘hoc ont mené la lutte, soit individuellement, ou à travers des regroupements suscités par la volonté de mise en place d’un sénat et les velléités de modification de l’article 37 de la Constitution. C’est ainsi que nous avons assisté à la naissance d’organisations comme le Balai Citoyen, le Collectif Anti-Référendum(CAR), le Collectif des Femmes pour la Défense de la Constitution(COFEDEC), le mouvement Ca Suffit pour ne citer que celles-là, ou à des regroupements comme le Font de Résistance Citoyenne(FRC) et bien d’autres.
Ces organisations de la société civile, comme on le voit, à objet éminemment politique, opposées à la modification de l’article 37, ont été créées par des citoyens préoccupés par la perversion de la démocratie et prônant l’alternance démocratique comme forme de transmission du pouvoir dans notre pays. Conscients des limites objectives de l’action des partis politiques d’opposition enfermés dans des carcans législatifs inhibiteurs, certains de ces citoyens ont su profiter des insuffisances de notre législation en matière de création d’organisations de la société civile pour envahir le champ de bataille qui était pratiquement l’apanage de le la FEDAP BC.
En effet, la loi No10/92/ADP portant libertés d’association, qui régit aujourd’hui la création des organisations de la société civile dans notre pays brille par l’absence de balise quant à la confusion des genres et à l’envahissement du champ social par le politique. Nulle part dans cette loi, il n’est fait obligation à un citoyen, de faire la preuve de son non appartenance à un organe dirigeant d’un parti politique pour militer dans une organisation de la société civile. Pire, l’article 47 de cette loi qui préconise la dissolution d’une association qui se livrerait à des activités contraires à ses statuts, n’a jamais été appliqué alors qu’il aurait dû l’être à la FEDAP BC. Le foisonnement des OSC, notamment celles animées par des acteurs politiques a beaucoup bénéficié de cette faiblesse législative et de la bienveillance du pouvoir d’alors à l’endroit de la FEDAP BC.
Dans le combat ayant conduit à la chute du pouvoir de Blaise Compaoré, l’apport de la société civile a été considérable. On ne peut nier aujourd’hui le rôle important joué par le CAR de Hervé OUATTARA, Ca Suffit de Aziz SANA, le COFEDEC de Marie Madeleine SOMDA, l’APCD de LOPEZ, le FRC de Marius Luc IBRIGA, le Balai Citoyen de Sam’s K le JAH et autres, et bien d’autres organisation de la société civile. Aucun parti politique de l’opposition républicaine, malgré sa volonté, ne pouvait se permettre de poser certaines des actions que ces OSC ont menées sur le terrain, au risque d’être taxé de putschiste et traité comme tel. D’où la synergie d’action que nous avons observée durant cette dure période insurrectionnelle.
Aujourd’hui, légitime est le débat autour de la représentation de la société civile par des acteurs de la société civile qui ont lutté comme tels, mais qui malheureusement sont aussi des acteurs politiques. Mais il est aussi juste de reconnaître que ces acteurs à double casquette à qui la loi en vigueur n’interdisait pas leurs activités, ne peuvent être déchus de leur droit d’agir encore aujourd’hui au nom de la société civile, où qu’ils se trouvent. Certes, des conditionnalités avaient été édictées pour la désignation de leurs représentants par une coordination des OSC, mais un collège de désignation mis en place par cette même société civile a décidé de retenir des candidats dont le profil diffère légèrement de celui fixé par la feuille de route. De plus, les conditionnalités retenues ne peuvent se mettre au dessus de la loi portant liberté d’association, pire, de la Constitution, qui garantit les libertés des acteurs.
Pour ma part, et en guise de conclusion, reconnaissant l’impérieuse nécessité de dépolitiser notre société civile, il serait judicieux de rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui, en ne leur interdisant pas, par le fait du prince, ce que la loi autorise, mais plutôt d’entamer immédiatement la réflexion pour finalement légiférer en la matière pour l’avenir, pour que les acteurs à double casquette d’aujourd’hui soient obligés au choix, entre la société civile et les partis politiques, de par la loi.
Dr SOMDA M. Joseph
msomdaj@yahoo.fr
Vos commentaires
1. Le 29 novembre 2014 à 17:28, par Wangphv En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
« ... ils ont dû simplement faire profil bas pour ne pas paraître ridicules devant les gens ; sinon pour eux son admission au sein du CNT est encore loin d’être acquise ».
Pourquoi décidez-vous aujourd’hui de paraître ridicules ? Il fallait lui demander des comptes tout simplement parce que vous êtes finalement retombés dans ce que vous vouliez éviter.
2. Le 29 novembre 2014 à 19:27, par LeMossi En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Dr Somda, si je vous comprend bien, on lutte pour le changement mais on adopte les mėthodes Compaoré quand ce qui est juste va contre nos intérêts ! Bien venu au royaume du rien-ne-sera-plus-comme-avant ! Son Excellence M Kafando a du pain sur la planche.
3. Le 29 novembre 2014 à 22:29, par Lassané En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Très bonne analyse. A mon sens, le plus important est que ces éléments à double casquettes n agissent pas en acteurs politiques sous le couvert de la société civile. Seul leur sens pour la construction d un Burkina Faso libre et démocratique qui pourra les guider.
Que Le Tout Puissant veille sur le pays des hommes intègres. Bon vent à tous.
4. Le 30 novembre 2014 à 06:07, par L’Intègre En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
si les 1er responsable ne veulent pas cede la place a d’autres membres de leut structure ils peuvent faire comme le Balai qe j’admir et je felicite leur position de ne pas rentré ds les organes de transition.
quand on veut faire une analise essayons de matriser tous les contours. sinon .......
5. Le 30 novembre 2014 à 06:42, par l’ancêtre En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
sauf que dr Somda est l’époux de Marie Madelaine SOMDA, il prêche ici pour sa chapelle.
6. Le 30 novembre 2014 à 08:02 En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Le mélange des genre n’a jamais fait bon ménage. Pour le CNT, il faut éviter ces doubles casquettes car, on retombe dans les mêmes travers avec des OSC créés par l’ancien régime pour le soutenir. La société civile doit pouvoir pleinement jouer son rôle de contre pouvoir pour éviter les dérives que l’on a connu pendant 37 ans. On se doit d’être exemplaire et repartir sur de bonnes bases et respecter les règles. Ceux qui ont une double casquette quitte leurs postes de membres au titre des OSC, et laisse la place à d’autres. Ils investiront le champ politique à plein temps pour les futures élections présidentielles, des députés et des communes. Il y a suffisamment d’acteurs OSC avec des compétences avérées pour en trouver.
7. Le 30 novembre 2014 à 08:04, par arthur En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Marc t’a raison , je ne sais pas qu’es que les opérateurs économiques du Burkina attende pour sortir contre cotecna Comme cela a été le cas dans pas la de pays à côté. En principe S SAM doit payé aussi pour complicité avec François
8. Le 30 novembre 2014 à 08:07, par Monique En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Ne vous en faite pas le CNT dans ces premières tâches nous rétablira la raison en chassant cette histoire de cotecna . Sinon ns allons descendre ds la rue
9. Le 30 novembre 2014 à 10:21, par the upright En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Bien réfléchi et parlé. La Loi qui nous régissait n’interdisant pas la double- appartenance aux associations politiques et apolitiques est effectivement ce qui a permis ce que nous observont présentement. Son insuffisance a aussi permis aux uns et aux autres de vouloir continuer à apporter leurs pierres à la construction commune, après en avoir apporté pour le changement intervenu. Accordons- leur le pouvoir de nous produire des lois qui nous préserveront de cette double-casquettes dans le futur, sous notre surveillance et notre controle. LeMossi devrait dire que nous avons tous du pain sur la planche et non pas le seul Président du Faso.
10. Le 30 novembre 2014 à 10:29, par Yelwingtiim En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Bonjour,
merci pour cette analyse.
Je suis d’avis qu’il faut situer le rôle de chaque acteur dans la vie de la nation.
La lutte pour faire respecter la constitution doit continuer, en ce sens que pour éviter d’autres interprétations, il est nécessaire que des dispositions claires soient légiférés pour l’avenir.
11. Le 30 novembre 2014 à 17:08 En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Ces fameuses OSC dans leur grande majorité ne sont rien d’autre que des mange-mils. Des désœuvrées qui ont créé des associations fantômes pour se faire financer par des politiciens ou des occidentaux intéressés. Et ce sont ces gens-là qui vont changer le Burkina positivement ?!
12. Le 1er décembre 2014 à 08:40, par lecteur attentif En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Je vais réagir sur un point précis :
"les conditionnalités retenues ne peuvent se mettre au dessus de la loi portant liberté d’association, pire, de la Constitution, qui garantit les libertés des acteurs".
Je crois me souvenir (je n’ai pas pu retrouver le texte de la charte de la transition sur lefaso.net) qu’en cas de conflit entre la constitution et la charte, c’est la charte qui prévaut !
Afin de préserver le consensus, les personnes a double casquette auraient simplement pu décliner et éventuellement proposer d’autres responsables de leurs OSC qui ne sont pas dirigeants de partis politiques.
13. Le 1er décembre 2014 à 09:45, par Vigilant En réponse à : Participation des OSC « politiques » au CNT : Rendre justice aux acteurs d’aujourd’hui et légiférer pour l’avenir
Pour Lecteur attentif du poste 4 : la charte de la transition ne proscrit pas cette situation.