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Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

Publié le mercredi 4 juillet 2012 à 00h37min

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Pouni nous accueille pour une cérémonie chaleureuse de lancement de la biométrie. Le Premier ministre a donné l’exemple et incité ses frères à faire de même. J’ai moi-même observé, inspecté le matériel dernier cri de long en large. Un gros gourounsi m’a même demandé si j’en voulais un chez moi juste pour remarquer l’intérêt que j’y portais. Bref je veux en savoir plus. Alors je m’informe. Il s’agit d’un ordinateur programmé pour ce genre d’exercice, il contient des données sur les identités, permet un enregistrement optimal.

Une imprimante qui imprime les informations sur la carte

Un scanner pour capter et enregistrer les empreintes

Une lampe et webcam pour la lumière et la photo,

Un groupe électrogène pour l’alimentation électrique.

Tout cela est bien beau mais sur le terrain comment se déroule le boulot ? Comme nous sommes dans une région vaste, je décide de faire quelques villages de Pouni à Réo.

Le premier arrêt n’est pas fameux. Batondo à un bureau d’enrôlement. Par hasard nous tombons de plein pied dans les problèmes. Le bureau fonctionne mais pas d’électeurs. En 10 heures de travail seules 15 personnes sont passées. La cause ? « La ruée vers l’or ». Tous les bras valides ne sont pas au village, la plupart recherche de l’or et ne s’intéresse pas vraiment à « ces choses de la ville ».

Pas de désespoir. On continu à Ténado. Là, c’est mieux. Il y a des électeurs, mais le couac c’est le matériel. Trop de pannes, pas de cartes, pas de rallonges, pas de bougies pour le groupe électrogène, webcam en panne… Les électeurs attendent souvent patiemment sous les arbres des écoles réquisitionnées pour l’occasion. Mais à trop patienter sous un soleil de plomb on finit bien souvent par se lasser et quitter les lieux. C’est bien dommage surtout dans un pays où l’acte citoyen n’est plus une priorité.

Dans certains bureaux, les services de maintenance sont déjà passés et ont réglé le problème.

Dans d’autres bureaux, ils ont donné des instructions par téléphone ce qui a porté des fruits.

On continue à Doudou. Toujours les mêmes observations. Mais là on m’informe que les services de maintenance arrivent bientôt. Bref on ne sait pas quand, et la population s’est démobilisée.

Ailleurs à Koukoudi, à kion, à Réo c’est idem, sauf quelque part à kilsho dans une petite école que l’espoir naît. Un jeune homme tout seul, a inscrit 45 personnes à une vitesse incroyable. Il nous explique comment il répare lui-même ses pannes. Avec peu, il démontre un enthousiasme peu commun. Il a faim, mais dans le village on ne vend pas à manger. Il ne se décourage pas et compte sur l’ancienne solidarité africaine pour remplir sa panse. Libre à lui d’y rêver.

On redémarre en se disant que tout n’est pas perdu. Mais au fait pourquoi ce jeune homme arrive t-il à faire correctement son travail et pas les autres ? Serait-il plus qualifié que les autres ? Moi je pense que oui. Jusqu’à présent je n’avais pas mis en doute les qualifications de ces agents mais qu’est ce qui coïnce ?

À Réo, je m’approche d’un bureau de recensement. Là deux jeunes filles se débattent depuis le matin pour inscrire au moins une vingtaine de personnes. Mais quelle galère ! Sur une seule personne, elles y mettent au minimum 20 minutes de travail. Elles trainent, pour ne pas dire qu’elles “trainaillent” autant que faire se peut. Soit c’est le groupe qui semble s’essouffler, soit ce sont elles qui ont faim, ou alors elles piaillent au téléphone. Par rapport au scanner d’empreinte, elles ne savent toujours pas comment le faire marcher. Un électeur s’en approche et tente d’y remédier et miracle ça marche. Il a juste bien posé son doigt. Comment deux filles « bien formées » sont-elles passées à côté de cette petite technique ?

On tourne, on rencontre quelques hommes politiques de la majorité qui, eux aussi, s’informent et incitent les populations à sortir. Mais où sont les politiciens de l’opposition ? Peut-être sont ils passés après nous. Mon œil de journaliste n’étant pas omniprésent excusez-moi de ne pas sentir leur présence. Après un si long chemin, je mérite bien une petite calebassé de dolo gourounssi. Ah oui ! Il fallait y être avec moi au dolodrome pour entendre comment se passent les nouvelles. Quelqu’un est arrivé pour informer les clients d’un recensement qui doit déboucher sur des dons de vivres. Heureusement qu’un autre mieux informé a pris son courage à deux mains pour réexpliquer les faits. Tout de suite, voici les critiques... c’est encore de la politique ; s’ils ont besoin de moi ils n’ont qu’à venir ici. Pas trop bête ce que dit mon voisin. Pourquoi s’installer dans une école vide alors que tout le village est au marché ? Faut-il penser à des équipes mobiles ? La sensibilisation aussi doit continuer même si la CENI doit revoir sa logistique et ses hommes. Les autres régions attendent donc que les erreurs des uns servent aux autres pour que ces couacs ne soient pas retenus comme prétextes à des reports ou revendications.

Parole de la Raï’S

Par Bendré

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Vos commentaires

  • Le 4 juillet 2012 à 08:13, par Lucien En réponse à : Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

    Bel article.

  • Le 4 juillet 2012 à 08:44, par Beem ka yondo En réponse à : Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

    Chapeau bas pour cet article empirique qui viens témoigner du balbutiement des opérateurs et opératrices chargés de l’enrolement. On peut douter aisément de leur qualification, sinon comprendre que des bac+3 en informatique ne soient pas capables de maîtriser la manipulation et/où le dépannage du matériel de travail ! c’est écoeurant ! Je pense à mon humble avis que les conditions de traitement des opérateurs y sont pour quelque chose. Dans un village où il ne se vend pas à manger, ils font comment ? Pour des petites pannes, ils se tournent les pouces en attendant les superviseurs qui sont en nombre limité. Cela dénote d’un sabotage qui ne dit pas son nom. Quand les premiers opérateurs ont réclamé de meilleurs traitement, on les a tous viré. Voilà maintenant le résultat. Petit argent petit travail ! N’oublions pas que certains se soucient du patriotisme comme d’une guigne.

    • Le 5 juillet 2012 à 00:15 En réponse à : Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

      Jai l’impression que vous confondez OPERATEUR ET SUPERVISEUR. La CENI n’a jamais viré des operateurs, mais plutot des superviseurs. En plus, pour etre Operateur de kit, il faut juste le Bac. Donc pas obligé d’etre informaticien. le Bac+3 est requis pour les superviseurs.

  • Le 4 juillet 2012 à 11:10, par Onymes En réponse à : Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

    Le Rai’S, il ne s’agit pas d’un ordinateur programmé pour ce genre de choses ! Il s’agit tout simplement d’un ordinateur, avec un logiciel d’enrôlement qui a été installé la dessus ! C’est tout !

  • Le 4 juillet 2012 à 16:29 En réponse à : Coup de gueule de la Raï’S : Chemin de croix pour un enrôlement biométrique

    Au lieu de"Un scanner pour capter et enregistrer les empreintes""Une lampe et webcam pour la lumière et la photo" dire plutôt "un capteur d’empreinte" , "une webcam munie d’un dispositif d’éclairage" .

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