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Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

Publié le mardi 24 octobre 2006 à 08h09min

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Kassoum Kambou, président de la CEI (droite) remettant son rapport au Premier ministre Kadré Désiré Ouédraogo

A travers ses déclarations à sa conférence de presse du vendredi 20 octobre 2006 au Centre national de presse Norbert Zongo (CNP-NZ), le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), Robert Ménard a donné une autre tournure, une autre lecture et une autre compréhension à l’affaire Norbert Zongo.

“Le rapport rendu public en 1999 par la commission d’enquête indépendante (CEI) - dont il a été membre - suite à ses investigations sur l’assassinat de Norbert Zongo n’était pas le bon”. Cet aveu d’un des “plus bouillants” membres de la CEI tombe à pic après le non-lieu prononcé en faveur du seul inculpé dans l’affaire, à savoir l’adjudant Marcel Kafando. Il discrédite la Commission, cloue ses membres au pilori et donne raison à ceux qui n’ont jamais cru à leur sincérité.

Car, si l’autopsie et les analyses balistiques ont pu établir des preuves matérielles de l’assassinat de Norbert Zongo, permettant ainsi de balayer la thèse de l’accident, les travaux de la CEI n’ont abouti qu’à la désignation de six “suspects sérieux”, tous issus du Régiment de la sécurité présidentielle (RSP). Pire, selon Robert Ménard, la Commissiont a “saboté” l’enquête. Une insulte aux défenseurs des droits humains, en ce sens que c’est face à la grogne politico-sociale que l’assassinat a déclenchée, que le gouvernement a mis en place cette Commission dont le rôle était “d’investiguer par tous les moyens à la manifestation de la vérité sur ce crime odieux”. Jamais une Affaire n’a bénéficié d’autant de moyens.

Environ 120 millions de FCFA et des ressources matérielles importantes ont été alloués à la Commission. Quatre mois plus tard (le 7 mai 1999), elle remet un rapport au Premier ministre de l’époque, M. Kadré Désiré Ouédraogo. Un juge, Wenceslas Ilboudo, est désigné pour instruire le dossier.

Il travaille pendant sept ans. Il inculpe d’abord Marcel Kafando pour ensuite prononcer un non-lieu en sa faveur quatre ans plus tard. En attendant des charges nouvelles susceptibles de rouvrir le dossier, la justice burkinabè et même de fervents admirateurs de Norbert Zongo sont cueillis à froid par la confession de Robert Menard.

“Pour parvenir au consensus au sein, de la commission, le vrai rapport a été épuré, edulcoré, voire vidé de sa substance”. Sept ans après que l’on apprenne ce sabotage, “trop c’est trop” pour le pays, ses habitants et sa justice. Si de tels propos sont avérés, l’on serait tenté de dire que les membres de la CEI n’avaient pas le souci majeur d’aider à la vérité sur l’Affaire Norbert Zongo.

Parce qu’aucun compromis ni consensus n’est valable dans une enquête sur un crime aussi odieux et crapuleux comme celui commis sur le journaliste et ses trois compagnons. Par ailleurs, si la rédaction d’un rapport arrangé visait à obtenir la signature de deux membres hostiles, pourquoi ne l’ont-ils pas approuvé ? Hermann Traoré et Jean Emile Somda se sont abstenus de valider le “rapport dit édulcoré” de Ménard. L’on se rappelle que sur les onzes membres de la CEI, seuls neuf ont accepté signer le rapport rendu public. L’intervention de Robert Ménard vient remettre à zéro les efforts consentis par le peuple burkinabè pour faire éclater la lumière sur l’Affaire Norbert Zongo.

Elle rend dupes les membres du Collectif des organisations de masse et de partis politiques qui ont longtemps cru aux travaux de la CEI. C’est un affront aux défenseurs des droits humains. A en croire Robert Ménard, la Commission a ridiculisé la justice burkinabè car elle l’a poussé à bâtir son instruction sur un faux rapport. Tout est parti sur du faux, conduit sur du faux et abouti sur du faux : suspects sérieux, inculpation, faux rapport. L’on serait tenté d’admettre que le juge Wenceslas Ilboudo a tourné en rond en se fondant certainement sur un rapport dont il n’avait pas tous les dessous de la rédaction.

La mémoire de Norbert Zongo, homme si attaché à la vérité - ne méritait pas un tel tripatouillage soit disant pour obtenir des signatures. Des neuf signataires du “faux rapport”, seul Robert Ménard a jeté le pavé dans la marre. Il est temps que les autres commissaires, en premier le président de la CEI, le magistrat, Kassoum Kambou, se prononcent pour remettre les pendules à l’heure dans le dossier judiciaire de l’affaire Norbert Zongo. Soit c’est Menard seul qui a conçu et détient un rapport qu’il qualifie de vrai, soit les membres de la CEI ont participé à la soustraction d’éléments du rapport et trahi la confiance placée en eux par les dirigeants du pays et le peuple tout entier. Dans tous les cas, Ménard est déjà complice ou coupable.

Si l’infraction est collective, il sera donc reproché aux commissaires d’avoir induit le peuple burkinabè en erreur, dans sa volonté et sa quête de vérité en bloquant le dossier Norbert Zongo. L’Etat s’est saigné matériellement et financièrement, la population s’est dépensée moralement, physiquement et spirituellement. Et au final, la CEI lui a produit un faux rapport. C’en est trop. C’est révoltant et insultant. Si la confession de Ménard est établie, la CEI aura alors trahi tout ceux qui ont bravé vents et marées pour réclamer justice pour Norbert Zongo.

Elle aura deçu par dessus tout. Avec le risque de tout recommencer et reprendre le dossier à zéro. Tout comme ce crime ne doit pas rester impuni, l’assassinat de Norbert Zongo ne peut être un mystère pour quelques consensus ou erreur que ce soit. Il ne doit souffrir d’aucun marchandage pour quelles que raisons.

Jolivet Emmaüs

Sidwaya

P.-S.

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Vos commentaires

  • Le 24 octobre 2006 à 10:54 En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

    Est-il possible d’arrêter de prendre pour parole d’évangile tout ce que M. Menard apporte et de travailler réellment à produire des articles fondés sur d’autres arguments que les siens ?
    Le plus choquant dans les déclarations de ces derniers jours, c’est bien le fait qu’une personne aussi influente que M. Menard attende un non-lieu pour sortir une revelation de cette taille !! Pourquoi ? Et Comment ? Du coup ses arguments sont-ils crédibles ?
    Il me plairait de lire des articles plus originaux et basés sur de réelles investigations plutôt que sur des paroles d’une personne qui se "decrédibilise" elle même par sa réaction tardive. Par qui sommes nous mener en bateau ? Par La justice ? Par M. Menard ? Ou par le gouvernement ?

    Nul doute que le journalisme comme d’autres professions, a ses dificultés. C’est pourtant en celà que les articles plus originaux auront du mérite auprès des lecteurs que nous sommes.

    En toute fraternité, Job.

    • Le 24 octobre 2006 à 15:13, par Bono Ferrini En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

      Cher Job,
      dans toutes vos interventions sur les fora attachés aux articles traitant de ce thème crucial, on note votre obsession à voir coûte que coûte le dossier Norbert Zongo classé. Surtout quand vous affirmez ailleurs qu’il n’y a aucun nouvel élément, on pourrait croire que vous êtes mieux instruit que les juges et les avocats et même la CEI, elle-même. Dans cette affaire ce que M. Ménard recherche, c’est de créer l’occasion de la naissance d’une justice libre. Les articles de journaux qu’il ne vous plait absolument pas de lire sont un début. Si nous sommes dans une démocratie comme on le prétend, laissez bien les journalistes écrire ce qu’ils ont entendu ou même le commenter sans allez plus loin. Le journalisme, ce n’est heureusement pas que de l’investigation. Les investigations demandent du temps. Elles demeurent encore trop dangereuses sur le continent noir. Norbert l’a payé par sa vie. Permettez aux autres journalistes de se méfier dans ce pays des hommes dits intègres.
      En outre, il y a des lecteurs qui ne sont pas mieux informés sur le dossier. Si les journalistes actuels ont choisi ces autres formes de communication qui ne relèvent pas de l’investigation et qui semblent non seulement ennuyer, mais vous énerver, laissez les donc avec leur choix. Ce sont aussi des formes de communication, à tous égards plus sécurisantes jusqu’à l’avènement d’une vraie démocratie au pays des hommes intègres. Les investigations, nous les laissons bien aux soins des juges et des avocats et souhaitons surtout que ceux-là par cette affaire, arrivent à allumer l’étincelle de la liberté de la Justice au pays des hommes intègres. Si c’est M. Ménard qui ne vous plaît pas, il serait mieux d’aller lui marteler votre vérité dans le crâne.
      Sincèrement !

      • Le 13 novembre 2006 à 10:07 En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

        Nous voulons tous que la vérité éclate au grand jour et que les les exécutants et les commanditaires de ce crime crapuleux soient traduits devant la justice, mais dans cette soif de la justice il ne faut pas perdre de vue certains aspects ; car la vérité n’est pas toujours cette chose là qui semble évidente. Si vraiment Robert Ménard avait des éléments nouveaux, pourquoi attendre le non-lieu pour les présenter ? Pourquoi attendre seulement maintement pour informer le grand public que le rapport initial de la CEI a été amputé de certains éléments essentiels alors qu’il a eu connaissance depuis fort longtemps du contenu de ce rapport ? S’il connait les commanditaires et les assassins de ce crime, qu’il donne simplement les noms et les preuves et qu’on en finisse une bonne fois pour toute. Sinon, on serait tenté de croire que ces interventions ont un tout autre objectif que celui qu’il veut faire croire au peuple burkinabé

        • Le 22 novembre 2006 à 19:31 En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

          Bibèga, Job et consorts... "la vérité n’est pas toujours cette chose-là qui semble évidente", aussi vraie que la vérité des petits noms de corbeaux derrière lesquels ces (tout-petits) ’vigilants’ des causes perdues se cachent pour étaler leur besogne hypocrite et pleutre au nom de leur amitié feinte pour leur Norbert soudainement intime... depuis qu’il est mort... Mais pourquoi pas ? Pourquoi en effet ne pas ’privilégier’ d’autres pistes que celle(s) suivie(s) par la CEI, leur ’ami’ Ménard, Amnesty international, la FIDH, Human Right Watch, les rapports onusiens, les reportages de la presse internationale, les ’convictions’ officieuses des chancelleries, les confessions de militaires de la garde présidentielle, les confidences faites à medias par d’autres militaires, etc... Allez, avec l’aide de cette juste Justice burkinabè (chiche, qu’elle traine devant son courroux le dénommé Ménard, ça pourrait être encore plus rigolo que les procès intentés à Halidou Ouédraogo !), des Pravda locales (Sidwaya et L’Opinion), des forces de l’ordre, du gouvernement, des quelque 20 millions alloués au téméraire juge Ilboudo, des véhicules fonds rouges, de l’Administration tentaculaire, des lobbies pro-Compaoré, des financements d’Alizéta Gando, d’Oumarou Kanazoé, de Franck-Alain Kaboré et de l’innocent François, de Jeune-Afrique et toute la nébuleuse françafricaine, oui, ça devrait être vite bouclée, cette affaire de huit ans... Un accident ? Des braconniers ? La CIA ? La France ? Le PCRV ? Halidou ? Allez, revenez vite aux toutes premières heures du drame : la "publique" RTB et tous ces ’nouveaux amis’ de Norbert avait bien initié le cheminement, aussitôt fait aussitôt dit... Là réside évidemment le VRAI, aussi vrai que Poutine n’a jamais rasé la Tchetchénie ou fait attenter à la vie de journalistes ’norbertiens’ ; aussi vrai que La Syrie n’exécute pas les uns après les autres ceux qui l’ont fait quitter ce pauvre Liban ’résistant’ ; aussi vrai que l’entourage de Gbagbo, votre ennemi, n’a jamais fait disparaitre Kieffer dans les profondeurs de la Lagune Ebrié, comme les Rebelles du nord, vos amis, n’ont jamais reçu l’aide du régime burkinabè et sont tout sauf des braqueurs de banques et de fieffés affairistes humainement insensibles au sort fait aux Ivoiriens et leurs immigrés. Courage, puisque ceux qui ont tenté, mal "élevés" mais ô combien mieux "éduqués" (j’entends par l’éthique et des convictions autrement élevées ) que celles et ceux que vous défendez fielleusement, ont échoué, dites-vous, reprenez le flambeau, chers pseudonymes, et prouvez, à votre manière... Le hic, c’est que nous risquons fort, comme le disait justement le Professeur Ki-Zerbo, d’attendre le Tribunal de l’Histoire. Mais visiblement, l’Histoire vous importe peu, seul le temps présent compte ; gagner du temps, comme ’vos idoles’... En pariant sur l’oubli et la démission de tous les Ménard mal élevés ! Dernier hic, ils seront de plus en plus nombreux, ces Ménard, et de moins en moins bien "élevés" car de mieux en mieux instruits ; restez donc bien cachés derrière vos pseudos. L’Histoire, encore elle, a souvent fait que les Job deviennent des Judas, en temps et heure, nous resterons donc confiants en ’nôtre’ vérité...
          Frédéric Bacuez, Sénégal.

  • Le 24 octobre 2006 à 14:07, par Constant En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : La CEI, 120 millions F CFA pour produire du faux ?

    Ne soyez pas l’avocat du diable ; votre analyse ne convainc personne. Vous restez fidèle à votre ligne éditoriale : defendre coute que coute le système et ses "institutions". De toute façon la justice clamait à qui voulait l’entendre qu’elle ne s’est pas fondée sur le rapport de la CEI pour travailler. En clair elle a tout repris à zéro. Ne decourager pas les "étrangers" qui sont plus patriote que des autochtones dans la quête de la vérité sur cette affaire.

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