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Assassinat de Norbert Zongo et trois de ses compagnons : 23 ans après, les cœurs saignent toujours au Burkina

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Publié le lundi 13 décembre 2021 à 16h09min

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Assassinat de Norbert Zongo et trois de ses compagnons : 23 ans après, les cœurs saignent toujours au Burkina

En ce douloureux anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo et ses compagnons d’infortune, l’Association des journalistes du Burkina a déposé des gerbes de fleurs sur leurs tombes, dans la matinée de ce lundi 13 décembre 2021, au cimetière municipal de Gounghin, à Ouagadougou. A cette occasion, elle a eu une pensée pieuse pour Flavien Nébié, ce jeune élève fauché par une balle de fusil, alors qu’il manifestait avec des camarades pour la vérité et la justice pour Norbert Zongo.

Le 13 décembre 1998, Norbert Zongo et ses compagnons d’infortune (Blaise Ilboudo, Ernest Zongo et Abdoulaye Nikiéma) quittaient Ouagadougou pour Sapouy. Sauf qu’en quittant Ouagadougou, ils ne reviendront plus jamais, et que leurs parents et amis ne les reverront plus jamais. Ces derniers ont été retrouvés calcinés dans leur véhicule sur l’axe Ouagadougou-Sapouy. 23 ans après cet assassinat, la douleur est toujours vive dans la mémoire des Burkinabè. En ce jour funeste, l’Association des journalistes du Burkina, aux côtés de leaders syndicaux, a déposé des gerbes de fleurs sur les tombes des disparus. A l’occasion, ils étaient nombreux, parents, amis et connaissances à y prendre part. Les visages étaient graves, tristes et marqués par la colère. L’émouvante cérémonie s’est déroulée au cimetière municipal de Gounghin, à Ouagadougou. Le message de l’AJB a été lu par Rabiatou Simporé, journaliste aux Éditions Sidwaya. « En éliminant l’intrépide journaliste d’investigation, ils ont cru sans doute tuer avec lui, la presse indépendante. Eh bien ! Ils se sont lourdement trompés. Ils ont réussi à endeuiller des familles, un peuple mais ils n’ont guère réussi à effrayer, ni à faire taire les journalistes, les défenseurs de la liberté de la presse, les défenseurs des droits humains et les démocrates", a déclaré Mme Simporé, la gorge nouée par l’émotion.

Rabiatou Simporé renouvelle l’engagement des Burkinabè à poursuivre la lutte

En revanche, elle a regretté le départ de Norbert Zongo qui a marqué le monde médiatique. Elle a ajouté que les vieux démons qu’il dénonçait dans son journal, L’Indépendant, existent toujours dans notre pays. Parmi ces vieux démons, elle a, entre autres, cité l’expulsion d’une centaine de travailleurs hors des médias publics en 2020, les suspensions illégales de salaires de centaines de travailleurs en 2020 ; un conseil de discipline arbitraire ; l’interdiction abusive de la marche du 27 novembre 2021 ; la coupure abusive de l’internet mobile. Situation nationale oblige, Mme Simporé a brossé le bilan des attaques terroristes qui, a-t-elle souligné, a fait 2 000 morts et plus de 1 400 000 déplacés internes, imputant cette situation à une « gouvernance sécuritaire plus qu’approximative », rendant ainsi inévitable, le drame humain bouleversant vécu le 14 novembre 2021 à Inata, avec la mort de 53 gendarmes et quatre civils. « L’on a changé de Premiers ministres, de ministres de la défense, de ministres de la sécurité, de chefs de l’État-major général de l’armée, mais le problème demeure sans solution. Faudrait-il peut-être changer de gouvernance, loin de toute corruption ? Une gouvernance des mains propres, avec un gouvernement resserré comme promis ? Tous ces drames humains, ces approximations dans la gouvernance n’auraient pas échappé à ta plume (de Norbert Zongo, Ndlr) », soutient-elle.

La tristesse se lisait sur le visage des uns et des autres

Pour le président du Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP), Chryzogone Zougmoré, ce rituel de se retrouver chaque 13 décembre est un élément d’un engagement qu’ils comptent tenir jusqu’à ce que vérité et justice soient rendues. Pour cette année 2021, la commémoration de l’anniversaire des disparus est axée autour du thème de la persévérance dans la lutte parce qu’après 23 ans, le peuple est résolument engagé à poursuivre la combat jusqu’à ce que la lumière soit faite sur cet assassinat odieux du 13 décembre 1998.

En effet, six ans après la réouverture en justice du dossier Norbert Zongo, celui-ci piétine au plan pénal notamment au niveau de la Cour européenne des droits de l’homme. « Le jeu auquel joue François Compaoré et ses avocats, c’est un peu du dilatoire. La Cour européenne a des centaines et de milliers de dossiers pendants auxquels est venu s’ajouter le dossier François Compaoré. Nous avons bon espoir que, compte tenue de la délicatesse de ce dossier et de son caractère emblématique, la Cour européenne gagnerait à le traiter avec une extrême urgence telle que nous l’attendions », estime le président du CODMPP. Mais qu’à cela ne tienne, il dit avoir la certitude qu’au plan national ce dossier avance. Il en veut pour preuve, la poursuite des auditions. Et si le procès venait à avoir lieu, il est fort probable que François Compaoré, le présumé commanditaire du quadruple assassinat de Sapouy soit jugé en son absence. Cela n’est visiblement pas le souhait des OSC. Mais à l’impossible nul n’est tenu, disent-elles, le plus important pour elles étant de situer les responsabilités et de sanctionner les auteurs.

Le président du CODMPP, Chryzogone Zougmoré en jaune

« Comme vous le savez, il y a le procès Thomas Sankara qui se tient aujourd’hui, un des principaux accusé n’est pas là mais n’empêche que ce dossier est en jugement. Il y a également la question des inculpés. Il y en a qui sont morts. Mais ce qui est possible dans un procès, le tout ne tient pas aux inculpés. Il y a également la place et le rôle que jouent les témoins. Je pense que nous avons suffisamment de témoins aujourd’hui qui peuvent nous aider à faire en sorte que la vérité éclate sur ce dossier. Nous ne perdons pas espoir », se réconforte M. Zougmoré.

Aïssata Laure G. Sidibé
Inocent H. Alloukoutoui (stagiaire)
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