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Débat sur les religions : « C’est à force de dire que telle question est tabou qu’un jour, une crise éclate » (Pr Magloire Somé, historien)

Publié le jeudi 30 mars 2023 à 21h00min

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Débat sur les religions : « C’est à force de dire que telle question est tabou qu’un jour, une crise éclate » (Pr Magloire Somé, historien)

« Catholicisme, pouvoir politique et changement social au Burkina Faso de 1956 à 2000 ». C’est le titre de l’oeuvre de l’historien, Pr Magloire Somé, parue dans la soirée de ce jeudi 30 mars 2023 à Ouagadougou au cours d’une cérémonie de dédicace.

Ce livre se classe, selon le modérateur, Moustapha Gomgnimbou, directeur de recherche au Centre national de la Recherche scientifique et Technologique (CNRST), dans la catégorie Essai et études politiques. Volumineux de 444 pages et réparti entre dix chapitres, « Catholicisme, pouvoir politique et changement social au Burkina Faso de 1956 à 2000 » pose la problématique des relations entre Église catholique et pouvoir politique au Burkina Faso, depuis 1956.

L’auteur, en séance de dédicaces à la fin de la cérémonie de présentation.

Il analyse l’évolution de ces relations qui vont d’une accointance intrigante sous la première République à l’affirmation à la fin du XXème siècle d’un contre-pouvoir incarné par l’Eglise catholique, à un moment où le réveil politique de l’islam oblige le pouvoir d’État à opter pour une gestion prudente de la diversité universelle.

Pr Magloire Somé montre comment le catholicisme a bâti son influence sur les transformations sociales et morales au travers de réalisations socio-économiques diversifiées, suivant une vision et une approche d’auto-promotion communautaire en vue d’une auto-prise en charge de l’Eglise. Toutefois, ces réalisations sont adossées à un système d’économie du don qui en limite l’efficacité et rend difficile le processus d’une véritable émancipation en vue d’une inculturation du christianisme dans les cultures burkinabè.

Pr Magloire Somé a également abordé dans l’œuvre, la dualité qui caractérise la vie spirituelle de l’Africain : religieux le jour et traditionaliste la nuit.

Selon le modérateur qui a présenté l’oeuvre, le changement social dont il est question est multiforme, varié dans le temps, en fonction des circonstances du moment. De sorte qu’on y note, dit-il, des périodes où l’Eglise s’accommode avec le pouvoir politique en place, tantôt joue un rôle de contre-pouvoir ou fait office de modératrice ou d’arbitre (pendant des élections).

Dans sa présentation, Moustapha Gomgnimbou a relevé que les relations entre l’Eglise catholique et le pouvoir de Maurice Yaméogo étaient dans une sorte de lune de miel avant de se détériorer à cause d’un certain nombre de facteurs (développés dans le livre).

Cela a été un des ingrédients qui ont conduit à la chute du pouvoir par le soulèvement populaire. On retient aussi que l’Eglise a observé une démarche de prudence sous le pouvoir militaire du général Sangoulé Lamizana, avec des relations qui ont évolué en dents de scie. Le pouvoir du capitaine Thomas Sankara, lui, entend se débarrasser de l’obscurantisme religieux (religions traditionnelles comme celles dites révélées).

Quelques invités, avec de la g.vers la d., les anciens Présidents de l’Assemblée nationale, Mélégué Traoré et Soungalo Ouattara, les anciens ministres Siméon Sawadogo et Philippe Savadogo (3ème à partir de la droite).

« Une période de traversée de désert pour l’Eglise catholique », rapporte le modérateur, ajoutant qu’il a fallu l’événement du Front populaire avec Blaise Compaoré à sa tête pour repositionner l’Eglise catholique. Ce qui va se traduire entre autres par des sollicitations, notamment dans le processus démocratique en 1990 et dans la gestion de la crise consécutive à l’assassinat de Norbert Zongo en décembre 1998. « Cette crise a sonné le réveil politique, dans la même période, de l’islam auquel le christianisme doit maintenant faire face. En effet, longtemps en marge ou marginalisée dans la chose politique, la communauté musulmane fait un effort de rassemblement afin de mieux s’impliquer aussi dans la gestion politique. C’est dans ce nouveau contexte que la question de la laïcité revient dans les débats et est de plus en plus discutée dans les milieux », extrait le modérateur.

Parlant de laïcité, l’auteur pense d’ailleurs qu’il faut poser le débat sur les religions plutôt que d’en faire un tabou. « Je crois qu’il faut se prononcer sur les questions que vous appelez questions tabous. C’est à force de dire que cette question est tabou qu’on laisse les choses se gangrener et puis un jour, il y a une crise qui éclate. Moi, je suis historien, je me prononce sur une question d’histoire. Celui qui lit le livre et qui n’est pas d’accord, il peut écrire pour dire le contraire ; c’est cela qui fait progresser la science », commente l’auteur, Pr Magloire Somé.

La cérémonie de dédicace a été présidée par le président de l’Université Joseph ki-zerbo, Pr Jean-François Kobiané.

Au département histoire et archéologie de l’Université Pr Joseph ki-zerbo, Magloire Somé est responsable de l’équipe de recherches religions et sociétés en Afrique. Spécialiste des études religieuses, il a fait sa thèse sur l’histoire missionnaire et a mené plusieurs travaux, dont des recherches sur l’histoire du christianisme en Afrique et au Burkina.

« Catholicisme, pouvoir politique et changement social au Burkina Faso de 1956 à 2000 » est accessible dans les librairies et en ligne au prix de 19 000 FCFA.

O.L.O.
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 31 mars à 08:50, par kwiliga En réponse à : Débat sur les religions : « C’est à force de dire que telle question est tabou qu’un jour, une crise éclate » (Pr Magloire Somé, historien)

    "Parlant de laïcité, l’auteur pense d’ailleurs qu’il faut poser le débat sur les religions plutôt que d’en faire un tabou. « Je crois qu’il faut se prononcer sur les questions que vous appelez questions tabous. C’est à force de dire que cette question est tabou qu’on laisse les choses se gangrener et puis un jour, il y a une crise qui éclate."
    Mais à quelle religion appartiennent donc les gens qui remettent aujourd’hui en cause la laïcité ?
    Serait-ce la même que celle des criminels qui nous endeuillent quotidiennement ?
    Mais pourquoi alors ne jamais la citer ici ? Serait-ce tabou ?

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