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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

Publié le mardi 11 janvier 2022 à 18h45min

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Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

Deuxième témoin à être auditionné par visioconférence dans la journée du 11 janvier 2022, le journaliste américain Stephen William Smith était au moment de l’assassinat de Thomas Sankara, le correspondant de Radio France internationale et du journal Libération à Abidjan.

Même s’il résidait à plus de 1000 kilomètres de Ouagadougou, Stephen Smith de par sa profession de journaliste était au courant des tensions qui existaient entre les principaux leaders de la révolution burkinabè, notamment Thomas Sankara et Blaise Compaoré. A l’en croire, les relations s’étaient dégradées si bien que Blaise Compaoré se taisait de plus en plus. « Quand on voyait Sankara, Blaise n’était pas là. Et au sein des comités de défense de la révolution, on voyait que l’élan des premières années de la révolution s’en était allé ».

Le témoin se souvient avoir été viré de la chambre de Thomas Sankara à Nouakchott, en Mauritanie, lorsqu’il a essayé de lui parler de la grogne qui se faisait entendre au sein de la population burkinabè. Il se souvient également avoir reçu un appel téléphonique de Thomas Sankara, 24 ou 48h avant son assassinat. « C’était la première fois qu’il m’appelait directement et non par son aide de camp. Il parlait toujours avec un ton enjoué et amical mais ce jour-là, je sentais à travers sa voix, qu’il ne maîtrisait pas la situation. Quand il a raccroché, j’ai senti une boule de plomb à l’estomac. Mais sur le coup, je n’ai pas mesuré l’importance de ce coup de fil. Après sa mort, j’ai envoyé un télex à Blaise pour savoir ce qui s’était passé. Il m’a répondu en disant ’’ je vous autorise à venir au Burkina’’. Je rappelle que les frontières étaient fermées. Je me suis rendu à Ouagadougou avec trois autres confrères en voiture », a raconté Stephen Smith.

À Ouagadougou, le témoin dit avoir été reçu seul par Blaise Compaoré. « Il était assis encore plus taciturne avec les cernes sous les yeux. Il était penché en avant. J’ai insisté pour qu’il m’explique ce qui c’était passé, mais il ne l’a pas fait. J’ai pensé qu’il m’avait fait venir pour donner une première mouture de l’histoire, pour s’expliquer en premier et avoir une emprise sur l’opinion. Il m’a dit ‘’Allez-y ! Faites votre travail.’’ Je suis retourné à l’hôtel Indépendance et des amis m’ont aidé à trouver le seul survivant du drame, Alouna Traoré », a raconté le témoin.

Stephen Smith a également parlé de son expulsion du Burkina. « Je suis allé avec mon magnéto interviewer Boukari Kaboré dit le lion qui était à Koudougou et qui menaçait de descendre sur Ouagadougou après l’assassinat de Thomas Sankara. J’ai demandé à la présidence du Faso de réagir à cette interview. J’avais demandé à mon rédacteur en chef à RFI de passer les deux interviews en même temps. Mais il a fait passer l’interview de Boukari Kaboré avant de passer celle de la présidence. J’ai été expulsé du pays et interdit d’y revenir pendant six ans. Au bout des six ans, on m’a dit que je n’étais plus persona non grata ».

A la question de la partie civile sur l’implication supposée des puissances étrangères dans l’assassinat du président Sankara et de ses compagnons, le témoin a affirmé qu’il n’a jamais eu d’indice sur un rôle activement joué par la France dans ce drame. Il a toutefois déclaré que la France cherchait à limiter le rayon d’action de Thomas Sankara. A l’en croire, François Mitterrand voyait en Sankara ses moments de jeunesse. « C’était comme s’il avait trouvé un bain de jouvence dans cette impétuosité de Sankara », a-t-il laissé entendre. D’ailleurs il dira que lors de la visite de Mitterrand à Ouagadougou en novembre 1986, il y a eu « un vrai clash » avec Sankara et non « une acrimonie » ce jour-là.

A la fin de son audition, Stephen Smith s’est dit ravi d’avoir pu s’exprimer au procès. Il dit également avoir apprécié le professionnalisme de la justice burkinabè lors de son audition en novembre 2017 devant le juge d’instruction François Yaméogo. « Je souhaite que cette affaire soit élucidée à partir des faits et des débats contradictoires », a-t-il conclu.

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Crédit Photo : Scholars Duke

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Vos commentaires

  • Le 11 janvier 2022 à 19:31, par Alexio En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

    Bien sur que la France etait le commanditaire de ce crime odieux les beneficiaires sont tous connus. Cessez de jeter la poudre a nos yeux. Ton pays a un etat qui vit de la criminalite en Afrique dite francophone par le biais des accords bidons fantoches coloniaux qui justifie sa presence.

    En fait l avenenement de la revolution burkinabe est la logique de l echec de la politique neocoloniale de la France.

    Un pays qui vit au depend de nos ressources minieres, agricoles, culturelles, sosiales et economiques (CFA). Grace ases politicards faineants et paresseux qui veulent pas s epancipes du pillage programes des anciennes colonies.

    Ils est grand temps qu on arrete la France de sa politique de predation avec ses valets locaux.

    • Le 12 janvier 2022 à 07:15, par Différence En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

      ALEXIO, c’est la différence entre les professionnels et vous ! Vous êtes toujours guidés par l’émotion, lui par les faits et les informations dont il dispose et surtout dont il peut faire la preuve… en écoutant sa déposition on peut subodorer que le journaliste est du côté de sankara mais c’est sont professionnalisme qui a pris le dessus. Je suis persuadé que s’il avait les éléments pour inculper la France il n’aurait pas hésité ! Ça ne veut pas dire que ces preuves n’existent pas…alors si vous les avez…vous connaissez le chemin du palais….

  • Le 11 janvier 2022 à 21:45, par caca En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

    À Ouagadougou, le témoin dit avoir été reçu seul par Blaise Compaoré. « Il était assis encore plus taciturne avec les cernes sous les yeux. Il était penché en avant. J’ai insisté pour qu’il m’explique ce qui c’était passé, mais il ne l’a pas fait. J’ai pensé qu’il m’avait fait venir pour donner une première mouture de l’histoire, pour s’expliquer en premier et avoir une emprise sur l’opinion. Il m’a dit ‘’Allez-y ! Faites votre travail.’’ Je suis retourné à l’hôtel Indépendance et des amis m’ont aidé à trouver le seul survivant du drame, Alouna Traoré », a raconté le témoin.
    Comment comprendre ce témoin quand il dit : J’ai insisté pour qu’il m’explique ce qui c’était passé, mais il ne l’a pas fait. J’ai pensé qu’il m’avait fait venir pour donner une première mouture de l’histoire, pour s’expliquer en premier et avoir une emprise sur l’opinion.
    Après ce témoin, la thèse de l’accident me semble plausible.

    • Le 12 janvier 2022 à 10:46, par AT En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

      Cher Caca avec tout le respect,
      si tu insistes qu’avec tous ces témoignages, la thèse de l’accident te semble plausible.
      je voudrais juste savoir pourquoi alors se précipiter les enterrés sachant bien qu’il était le chef de l’etat et qu’il méritait les honneurs en tant que chef d’etat et militaire de surcroit ?

      • Le 12 janvier 2022 à 12:32, par caca En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

        Mon cher ! Caca aussi se demande pourquoi d’avoir précipiter pour enterrer Thomas Sankara dans ces conditions indigne. Mais n’oublions pas le fil conducteur du carnage. Thomas Sankara voulait tuer Blaise Compaoré et les trois autres à 20heures de ce 15 octobre 1987. Mets-toi à la place de Blaise Compaoré découvrant qu’à 20h il devait mourir par son ami Thomas Sankara ? C’est en remontant le temps qu’on pouvait gérer cette affaire avec objectivité. Il y a des témoins de tailles qui ont également soutenu que Hyacinthe Kafando pouvait prendre ses responsabilités seule et faire l’irréparable.
        De la même matière, on peut aussi se demander pourquoi le camp Sankara qui disposait de preuve et malgré le refus de celui-ci, n’ont pas procéder des arrestation préventives ? L’actualité du moment permet de comprendre anticipation dans l’affaire du L-Colonel mis au arrêt qui voulait déstabilisé les institutions. Le camp Compaoré n’est pas les seuls responsables dans cette affaire. C’est pourquoi cette forme de justice de pénale ne peut rien apporter comme réparation à tout les niveaux.

  • Le 12 janvier 2022 à 09:52, par A kansma En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

    POURQUOI NE PAS FAIRE UN TOUR DANS " LIBERTE CONFISQUEE" POUR PLUS DE DETAIL. SON AUTEUR L’IVOIRIEN BERNARD DOSA AURAIT AUSSI DES DETAILS ET PAS LES MOINDRES.

  • Le 12 janvier 2022 à 12:50, par Oubda Jean Yabayoure En réponse à : Procès « Thomas Sankara et douze autres » : Stephen Smith, le journaliste américain déclaré persona non grata pendant six ans en 1987

    En suivant le procès Thomas
    Sankara, il y a une simple question à laquelle je ne puis m’empêcher de me la poser. Mais avant de la poser j’aimerais d’abord saluer la détermination des autorités de notre pays, d’avoir permis la tenue de ce procès. Bien sûr, il ne faut pas être naïf, ce procès ne permettra pas de connaître toute la vérité, surtout celle qui a trait aux implications étrangères.
    Revenons à Blaise Compaoré. Il clame qu’il n’avait rien à voir dans le complot ayant abouti à l’assassinat de son frère, ami et confrère de la révolution. Si c’est vrai ce qu’il dit ; alors pourquoi n’a-t-il pas diligenté une enquête dans les jours qui ont suivi le drame, afin de connaître la vérité ? De plus depuis plus de 27 ans, sous son règne, tout a été fait pour empêcher la tenue d’un tel procès. Et pour couronner le tout, il se terre en Côte d’Ivoire, prétextant qu’il n’a pas confiance au système de justice de son pays, qu’il a contribué à mettre en place depuis 27 ans. Ce n’est pas ironique ça ?

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