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<I>La chronique du fou </I> : Qui a peur du vote des Burkinabè de l’étranger ?

Publié le vendredi 30 septembre 2005 à 06h57min

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De plus en plus, des voix s’élèvent au sein des Burkinabè de l’étranger pour exiger que leur soit officiellement reconnu, le plus élémentaire et le plus naturel des droits : celui de pouvoir voter comme leurs compatriotes de l’intérieur. Ils entendent ainsi mettre fin à cette sorte de bannissement politique qui les empêche d’accomplir leur acte citoyen.

Dans un tel contexte, ils se retrouvent dans la peau d’hommes de nulle part et de partout, ballottés entre une nationalité que leur refuse leur pays d’accueil et une citoyenneté récusée dans leur pays d’origine. Nul n’ignore l’importance de leur contribution en termes de transferts de devises au fonctionnement de l’économie burkinabè.

Autant le Burkina ne crache pas sur cette contribution, autant il ne devrait pas cracher sur les revendications citoyennes des Burkinabè de l’étranger tendant à participer aux différentes consultations électorales. "J’embrasse votre argent (qui n’a pas d’odeur), mais je hais votre bulletin de vote (qui est chargé d’inconnues)", semble être une sorte de consigne partagée par les acteurs de la scène politique.

Certes, l’opposition burkinabè vient de faire du vote des Burkinabè de l’étranger, l’un des thèmes de sa campagne. Mais, ce n’est pas à moins de deux mois de l’élection présidentielle que ce problème pourrait être résolu. Tout se passe comme si la situation de non-citoyens vécue par nos compatriotes datait d’aujourd’hui. Du côté des pouvoirs publics, on reconnaît la légitimité de cette revendication des compatriotes vivant à l’étranger et visant à être traités sur le même pied d’égalité que les Burkinabè de l’intérieur. Des voix officielles le proclament tous les jours.

Mais, ces mêmes voix invoquent des problèmes de manque de moyens financiers pour justifier l’exclusion de ces Burkinabè à toutes les élections. Sur ce point, on pourrait approcher les autorités sénégalaises, maliennes et algériennes, pour ne citer que celles-ci, pour s’inspirer de leurs expériences en matière de vote de leurs compatriotes de l’étranger.

En réalité la démocratie est une chose suffisamment sérieuse pour mériter qu’on se passe de quelques plaisirs mondains pour la sanctifier.

En fait, n’y a-t-il pas plus manque de volonté politique que d’absence de moyens ? La question que l’on se pose alors est de savoir qui a peur de cet électorat difficilement saisissable, livré à lui-même et dont on connaît mal le nombre, faute d’une politique de suivi et de recensement. En tous les cas, le devoir incombe au premier chef, au pouvoir en place de s’acquitter de cette mission, de corriger cette forme d’injustice faite à nos compatriotes qui vivent une situation hybride de citoyens à part dans leur pays d’origine, et de non-citoyens dans leur pays d’accueil.

Pascal Affi N’Guessan, le faucon du FPI, avait accusé les autorités burkinabè de considérer leurs ressortissants en Côte d’Ivoire comme des étrangers chez eux parce qu’ils ne sont pas autorisés à participer au jeu électoral. Une façon de justifier cette xénophobie et cette purification ethnique, puisque nous sommes nous-mêmes coupables de ségrégation vis-à-vis de nos frères.
La question qui se pose est de savoir qui a peur du vote des Burkinabè de l’étranger.

De mauvaises langues disent que ces derniers constituent potentiellement un électorat favorable à l’opposition. Cependant, aucune étude n’est venue confirmer ce postulat. En tous les cas, ce n’est pas dans une sorte de fuite en avant consistant à marginaliser la voix des Burkinabè de l’étranger qu’on crèvera l’abcès de leurs frustrations. Au-delà des calculs politiciens, il s’agit d’une question de justice. Du reste, de prime abord, rien n’indique que le pouvoir sera perdant en cas de vote des Burkinabè de l’étranger.

Le pouvoir a les moyens de mener des opérations de charme en direction de cette composante non négligeable de notre peuple. Ces moyens ont pour noms les voyages officiels présidentiels ou ministériels au cours desquels le chef de l’Etat et ses ministres ont l’occasion de rencontrer nos compatriotes. Un capital que l’opposition n’a pas .

Toujours est-il que , qu’on soit du pouvoir ou de l’opposition, tous ces calculs politiciens ne s’accommodent pas des vertus démocratiques qui exigent qu’on accorde le même droit à tous. A moins d’être des démocrates de façade, on ne devrait pas avoir d’états d’âme pour emprunter le grand boulevard qui mène à une société égalitaire. Plutôt que de parler à la place de la diaspora avec toutes les arrière-pensées qui en découlent, mieux vaudrait la laisser s’exprimer. La meilleure façon de le faire, c’est de ne pas étouffer l’expression de ses profondes aspirations.

Le Fou

Le Pays

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