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Importation et exportation : « SYLVIE nous invite simplement à rejoindre la légalité », Aurélien Somé, Transitaire Commissionnaire en Douane agréé

Publié le lundi 25 avril 2016 à 01h14min

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Importation et exportation : « SYLVIE nous invite simplement à rejoindre la légalité », Aurélien Somé, Transitaire Commissionnaire en Douane agréé

Que de controverses autour de l’application du Système de Liaison Virtuelle des Opérations d’Importations et d’Exportations (SYLVIE). La nouvelle mesure qui pour le moment, n’est pas totalement en application, parce qu’un moratoire a été obtenu par les importateurs et exportateurs, suscite toujours de la méfiance, de la réticence et voire même de la résistance. En effet, certains acteurs du domaine commercial, notamment des commerçants et des transitaires ne veulent pas en entendre parler et disent en aparté, toute l’aversion qu’ils ont de la plateforme virtuelle SYLVIE. Aurélien Yirzigh Somé est gérant de la Société de Transit et Services (STS). Dans cet entretien qu’il nous a accordé, il a accepté dire sa part de vérité, concernant ce système électronique interconnecté, conçu selon ses promoteurs, pour lutter contre la fraude, réduire les coûts des transactions et gagner en temps

Lefaso.net : Pouvez-vous vous présenter davantage à nos lecteurs ?

Aurélien Somé : Je suis Monsieur Yirzigh Aurélien Somé, Gérant de la Société de Transit et Services (STS) Sarl. Je suis actuellement le Vice-Président de l’Association Professionnelle des Transitaires Commissionnaires en Douane Agréés.
Je profite de l’occasion que vous m’offrez, pour remercier Lefaso.net pour cette occasion donnée aux professionnels mandataires des importateurs et exportateurs, pour les formalités administratives et douanières de leurs marchandises, en vue d’exprimer leur opinion dans la mise en œuvre de SYLVIE.
Ce sont ces professionnels qu’on désigne communément sous le terme de transitaires, lequel terme pris résolument, est vide de sens dans notre jargon professionnel.
Il faut toujours l’associer à une activité de la chaine logistique pour lui conférer un sens, selon que le professionnel soit lié à son client par un mandat de contrat ou de commission.
Pour ce faire, mes propos sont de la corporation des Transitaires Commissionnaires en Douane Agréés à laquelle j’appartiens, lesquels sont habilités à effectuer pour autrui les formalités douanières et dont les conditions d’exercice de la profession sont fixées par la réglementation internationale, régionale, et nationale.

Lefaso.net : Commissionnaire en douane agrée de votre état et Vice- Président de l’Association Professionnelle des Transitaires Commissionnaires en Douane agréés, pouvez-vous nous dire ce que c’est que SYLVIE ?

Aurélien Somé
 : SYLVIE, qui fait aujourd’hui la Une des medias et des discussions est défini comme étant le Système de Liaison Virtuelle pour les opérations d’Importations et d’Exportation. C’est un guichet unique électronique qui interconnecte tous les acteurs, qui interviennent dans la délivrance des documents aux fins de dédouanement. Ce guichet unique et électronique a été mis en place par le Gouvernement du Burkina Faso et la Chambre de Commerce et d’Industrie, au service de tous les opérateurs qui interviennent dans la chaîne d’importations et d’exportations.

Lefaso.net : On sait que la société de gestion de SYLVIE, la SOGESY et la douane, ont initié des conférences de presse et des ateliers pour présenter le système et ses avantages. Votre structure a-t-elle été associée à ces activités ?

Aurélien Somé : Oui, je l’affirme. Nous avons été associés depuis le début de la mise en place de ce système. Ce n’est pas un projet qui date d’aujordh’ui. Le lancement officiel à eu lieu sous le régime d’avant insurrection. Malheureusement, il a connu un retard dans sa mise en œuvre.
Et récemment aussi, nous avons été associés dans la relance du projet. Nous avons été conviés à la cérémonie officielle de lancement le 16/02/2016 sous le haut patronage du Premier ministre, Paul Kaba Thiéba.. Notre association a reçu 60 cartes d’invitation pour y prendre part. Et nous étions à cette cérémonie.
Chaque société agréée a pu envoyer au moins deux agents qui ont été formés à l’utilisation de la plateforme, et nous restons en concertation permanente parce que les responsables de SOGESY, ont une approche de proximité.
D’ailleurs, moi- même, je les ai reçus à mon bureau et je crois savoir qu’ils font le tour aussi des autres bureaux pour toujours sensibiliser. Je pense que nous sommes intimement liés à toutes les initiatives qu’ils prennent en ce moment, pour la mise en œuvre de cette plateforme.
J’ai expérimenté et apprécié les fonctionnalités du système, ce qui m’a convaincu à souscrire pour la connexion à la plateforme.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui explique alors les réticences et les méfiances de certains commerçants et transitaires vis-à-vis de ce système ?

Aurélien Somé : Chacun a sa raison d’adhérer ou non, selon qu’il soit motivé par cette réforme ou pas. Lorsqu’on parle de changement, ça inspire toujours l’inquiétude, parce qu’on ne sait pas de quoi demain sera fait. Sinon pour ce qui nous concerne, c’est un changement positif de système qui est démandé. Et quand on veut changer de système, il est evident que vous allez rencontrer des obstacles et des barrières. Parce que le système peut être favorable à une classe de pratiquants du commerce international, comme il peut être défavorable pour d’autres. Il existe des pratiques peu orthodoxes dans la pratique du commerce international au Burkina Faso qui entrainent beaucoup de pertes de recettes douanières et fiscales pour l’Etat.
Je crois que cet outil fait peur a certaines personnes, qui ont des craintes qu’aujourdhui, la transparence puisse exposer la réalité et la traçabilité des opérations qu’ils mènent. Je crois que la peur ce situe à ce niveau. Sinon, nous ne voyons pas de raisons objectives contre le système.
Pour dire les choses comme il se doit, nous sommes restés dans un confort illégal, depuis plus de dix ans ; où la pratique du commerce international n’était pas encadrée. Ce laisser-aller a poussé des gens, à avoir aussi des pratiques pas légales et pas réglementaires. Aujourd’hui, SYLVIE nous invite simplement à rejoindre la légalité. Soit on respecte la réglementation ou on ne la respecte pas.
Nous sommes en face d’un système mis en place par un gouvernement, qui sait, dans quel intérêt et dans quelle orientation, la politique commerciale du pays doit être menée pour une économie prospère.

Lefaso.net : Certains d’entre eux avancent que le nouveau système génère des frais supplémentaires en termes de coût de dédouanement des marchandises. Toute chose qui va entrainer une répercussion sur les prix des marchandises. Qu’en est-il au juste ?

Aurélien Somé : A mon avis ce n’est pas juste. Il s’agit d’une fuite en avant. Même si on veut rejeter un système, on doit trouver au moins les arguments justes, pour pouvoir le faire.
Nous pouvons nous mettre en exercice de simuler un peu les opérations qui se déroulent. Personnellement, moi j’ai pu expérimenter la plateforme au siège de SOGESY. Il faut éviter de penser qu’on veut nuire à qui que ce soit par cette initiative.
Imaginez que pour une opération donnée, vous avez affaire à plusieurs acteurs que sont par exemple les banques, les assurances, le commerce extérieur, les autorisations spéciales et autres. Imaginez que tous ceux-ci sont dispersés au niveau de la ville, et que vous vous mettez à courir individuellement derrière chaque acteur de la chaîne, à chaque fois que vous voulez obtenir un document.
Aujourd’hui, vous avez la possibilité de rencontrer tous ces acteurs sur une plateforme, qui échangent des informations fiables, à partir desquelles vous pouvez collecter vos documents électroniquement, pour dédouaner vos marchandises.
Je pense qu’’il y a quand même une économie de temps et des charges. On dit toujours que notre économie est essentiellement marquée par le secteur informel. Ce n’est pas évident. Dans tous les cas, même le secteur informel doit avoir une stratégie et une vision, pour mener à bien ses affaires.
Si vous avez des comptes d’exploitation par rapport à vos opérations, c’est à dire étudier vos coûts, je parie que si vous faites une simulation d’étude liée à l’application de cette plateforme, je suis persuadé qu’elle est totalement économique pour les opérateurs économiques.
SYLVIE permet d’économiser sur les frais liés aux multiples déplacements, avec toutes les conséquences possibles telles que la perte de documents, les risques d’accident, les risques d’erreurs sur les documents.

Lefaso.net : Quels commentaires faites-vous à propos de ceux qui avancent que le métier de transitaire est appelé à disparaitre, du fait de l’application de ce système électronique interconnecté, qui fera que les commerçants disent-ils, pourront se passer de vos services ?

Aurélien Somé : Non ce n’est pas vrai. Et je ne pense pas que ce soit l’objectif de SYLVIE. Pour preuve aucun document ne peut être collecté sur cette plateforme sans l’utilisation du numéro d’agrément d’un commissionnaire en Douane. Nous sommes aussi intimement liés aux transactions commerciales, à la chaîne de transport logistique, à l’administration des douanes. Ce qui veut dire que tant que tous ces acteurs et opérations existeront, le commissionnaire en douane agrée aura sa tâche à faire. C’est une activé professionnelle. Sachez qu’on se forme pour cela.
Lorsque vous parlez de notion de valeur en Douane, d’espèce tarifaire, d’un certain nombre d’éléments qui permettent de collecter ces documents, il faut un professionnel du métier. A moins que ces commerçants n’abandonnent leurs activités pour aller à l’école de formation de transitaire, je parie qu’en aucun cas, ça ne menace notre activité.
Je le disais au début de cet entretien, lorsqu’on parle du métier de « transitaires », dans lequel, vous voyez aujourd’hui des gens qui exercent la profession et qui ne sont pas agréés pour la profession, je pense plutôt que cette plateforme va valoriser notre profession, la moderniser, la professionnaliser et davantage assainir ce milieu afin qu’on puisse voir réellement quelle est la place réelle d’un Transitaire Commissionnaire en Douane Agréé.
A mon avis, nous sommes lésés par la pagaille actuelle. Je prends l’exemple des opérations de sous-traitance. Ça amène aujourd’hui des gens non professionnels, qui ne sont pas du métier, à exercer la profession, au niveau de certains bureaux des douanes ou sont amenés à faire des formalités douanières. Le métier est menacé parce que cette activité illégale a pris plus de l’ampleur, sur l’activité qui devrait réellement se passer.
Je pense plutôt que l’effet inverse peut se produire. Il peut y avoir plus de place aujourd’hui, pour un Commissionnaire en Douane Agréé, d’effectuer de façon légale la profession.

Lefaso.net : Le système présente-t-il d’autres avantages pour vous transitaires ?

Aurélien Somé : Nous voyons en l’application du SYLVIE, une facilitation de la collecte des documents de dédouanement. Et il faut vraiment noter que cela entre en ligne de compte dans nos objectifs de performance. Que ce soit au niveau mondial ou régional, c’est ce que toutes les politiques définies en matière de commerce exigent.
Nous avons aussi la réduction des coûts et des délais de délivrance des documents aux fins de dédouanement.
Nous allons aussi accélérer l’uniformisation des procédures de dédouanement grâce à ce système. Car actuellement, chacun le fait un peu à sa manière.
Lorsque vous allez dans ces genres de réformes qui ont déjà été expérimentés et qui ont fait des effets positifs ailleurs, il faut aussi le faire. Et s’il y a à parfaire le système, il faut alors faire des contributions constructives, au lieu de rejeter forcément quelque chose qui peut nous amener à aller de l’avant.

Lefaso.net : Un appel à lancer ?

Aurélien Somé : L’appel que je peux lancer à l’endroit de tous les acteurs intervenants de la chaine logistique, est de s’approprier cet outil de modernisation, d’implication et de facilitation des échanges commerciaux.
Epousons SYLVIE pour plus de transparence, de traçabilité pour une économie prospère.
La bonne gouvernance économique passe par les bonnes pratiques commerciales. Je pense qu’il faut dans un sursaut patriotique épouser cette plateforme pour l’intérêt économique de notre pays.

Propos recueillis par Angelin Dabiré
Lefaso.net

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