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Pourquoi certains commerçants ne veulent pas de « SYLVIE » ?

Publié le samedi 2 avril 2016 à 09h29min

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Pourquoi certains commerçants ne veulent pas de « SYLVIE » ?

Le système de liaison virtuelle des importations et des exportations est entré en vigueur début mars au Burkina Faso. Depuis lors, on assiste à une levée de boucliers de la part de certains commerçants. Si les uns demandent que sa mise en œuvre puisse être différée de deux mois voire d’une année, les autres plus radicaux ne veulent même pas en attendre parler...Alors que de l’avis de spécialistes, ce système est véritablement révolutionnaire.

« SYLVIE », c’est le système de liaison virtuelle pour les opérations d’importations et d’exportations. Il a été officiellement lancé le 16 février 2016 à Ouagadougou en présence du premier ministre, Paul Kaba Thiéba. Les travaux de mise en place de la plate-forme SYLVIE eux, ont débuté le 20 décembre 2011. Initialement prévu pour durer 14 mois, le projet a pris du retard pour cause de défaillance du partenaire technique d’une part et de la situation socio-politique du pays d’autre part.

En effet, le système allait être opérationnel depuis longtemps. Cependant, la résistance de certains commerçants et milieux d’affaires ont ralenti considérablement son application pendant un moment. « SYLVIE » est donc l’aboutissement d’un vieux projet, dans un contexte post-insurrectionnel où dit-on :"Plus rien ne sera comme avant".

On retiendra de ses avantages la réduction de la fraude fiscale, car il y a moins de manipulation manuelle des dossiers. Il accélère également de façon notable les délais de traitement des dossiers faisant ainsi gagner en temps et en argent. Par exemple, pour une opération d’importation, la durée de 35 jours en général pour réunir tous les éléments du dossier passe avec le nouveau système à 7 jours en moyenne au profit de l’importateur. Pour une opération d’exportation, on passera de 20 jours à 3 jours. Un autre avantage de la plate-forme est le coût de la transaction par rapport aux pays voisins. En effet, elle permet de réduire aussi bien dans l’importation que dans l’exportation, le coût de la collecte des documents de 70% soit 25 milliards de francs supplémentaires. Elle participe enfin à l’amélioration du climat des affaires, la transparence et la traçabilité des opérations douanières.

« SYLVIE » est une sorte de guichet unique électronique en matière d’opérations d’importations et d’exportations douanières. Ce dispositif interconnecte dorénavant tous les acteurs intervenant dans la chaîne de collecte des documents de dédouanement des marchandises à l’import et à l’export. Il s’agit notamment des commissionnaires en douane agréés communément appelés transitaires, des importateurs et exportateurs, des banques, des compagnies d’assurance. Dix administrations publiques intervenant dans la délivrance des documents de pré-dédouanement sont également présentes sur la plateforme à l’instar de la société d’inspection COTECNA-SA.

Daouda Garané, Directeur général de la société de gestion de la plate-forme « SYLVIE » expliquait que : "Avec SYLVIE, l’importateur ou l’exportateur aujourd’hui, aura la possibilité s’il est connecté à la plateforme, de rester dans son bureau et d’attaquer directement le système pour avoir ses documents que sont l’attestation d’importation, l’autorisation d’échange, la déclaration préalable à l’importation et le certificat d’assurance. Auparavant, les opérateurs passaient entre 14 et 21 jours pour collecter l’ensemble des documents nécessaires au dédouanement. Cela les empêchait d’être compétitifs sur le marché international". Et parlant des avantages, il citait la simplification des procédures, le gain en temps et en coût, l’amélioration du climat des affaires, la gestion transparente des documents, la lutte contre la fraude et la fuite des capitaux.

À l’évidence, « SYLVIE » est une bonne chose pour les commerçants honnêtes. Le débat qui se mène présentement à travers les conférences de presse, animées par certains commerçants, ressemble beaucoup plus à une fuite en avant. En effet, c’est de notoriété publique que sous l’ancien système, certains sont devenus de "super-commerçants ou transitaires" devant qui s’ouvraient toutes les portes. La corruption était leur marque déposée, leur sport favori pour faire entrer leurs produits parfois de qualité douteuse. Et dire qu’il y a des commerçants dont il ne viendrait même pas à l’idée de douaniers, de prétendre contrôler les marchandises. L’ancien système de contrôle douanier il faut le dire, était la porte ouverte à toutes les affaires les plus louches dans lesquelles certains intervenants de la chaîne s’en mettaient plein les poches.

Dans cette jungle impitoyable où vous ne valez que par la force de votre portefeuille et votre ingéniosité, les transitaires dribblent les commerçants qui feintent eux-mêmes les impôts, préférant arroser parfois des douaniers corrompus.

Entre surfacturation des uns et non-déclaration de certaines marchandises par les autres ; entre intermédiaires et interventions de « bras longs » ; entre cupidité et enrichissement illicite de fonctionnaires corrompus ; c’est bien l’Etat burkinabè qui perdait dans ce milieu de " prédateurs". La nouvelle donne est donc loin de faire l’affaire de tout ce beau monde. C’est seulement parce que certains ne peuvent rien y faire pour que les choses restent en l’état, c’est à dire à leur avantage qu’ils se résignent à voir mourir la poule aux œufs d’or.

Il n’y a pas aussi de menaces d’augmentation de prix de produits de la part des commerçants qui tiennent. Une éventuelle augmentation ne reposerait sur rien. Car du côté de la douane et de COTECNA, il n’y a aucune taxe ou/ et frais supplémentaires liés à la mise en œuvre de SYLVIE. Bien au contraire, les opérateurs honnêtes feront des économies sur leurs différentes transactions. Seuls ceux qui exploitaient les failles de l’ancien système et ne respectaient pas la législation en vigueur trouvent maintenant que « SYLVIE » engendrera des coûts supplémentaires pour eux. Tout simplement parce qu’ils ne payaient pas ce qu’ils devaient à l’Etat. Il leur appartient donc à eux de se conformer aux textes, et à rejoindre le cercle honorable des commerçants soucieux du respect de la législation en vigueur dans notre pays

Angelin Dabiré
Lefaso.net

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