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Barrage de Tanghin : un pôle économique menacé d’ensablement

Publié le lundi 6 octobre 2014 à 21h27min

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Barrage de Tanghin : un pôle économique menacé d’ensablement

Les activités au bord des barrages sont de plus en plus nombreuses et diverses. Des activités croissantes qui suscitent aussi des interrogations quant à leur impact sur ces ouvrages d’une importance capitale pour la ville. Un moment passé avec certains des acteurs des activités autour du barrage n°2 et n°3, permet de comprendre leur motivation et leurs attentes.

Isidore Kaboré est le gérant du ‘’maquis Manathan‘’ situé dans ce qui est plus connu sous le nom de ‘’manguiers de Tanghin ‘’. Cet espace qu’il occupe depuis près de dix ans plait à sa clientèle grossit de jour en jour, confie le gérant. La fréquentation de son maquis, il la doit en partie, il en est conscient, à la proximité du barrage : « les gens viennent ici pour se reposer et profiter de la fraicheur ». C’est principalement cette volonté de tirer profit de la fraicheur de l’eau et des arbres qui longent la retenue d’eau qui a motivé l’installation du maquis à cet endroit. Ce maquis peut être qualifié de populaire, et il y en a bien d’autres de ce type. Mais il existe également des espaces de grand standing comme le restaurant ‘’ le câlin ‘’. Aboubacar Lido, gérant du lieu, admet que la proximité de l’eau a un impact positif sur la fréquentation du restaurant.

D’autres activités, qui exploitent de façon directe les retenus d’eau, s’y retrouvent. Il s’agit par exemple des vendeurs de plantes et des maraichers. Des activités qui sont menées toutes les périodes de l’année, même lorsque le barrage est presqu’à sec. Fatimata Koanda est maraichère. Un travail auquel elle s’adonne depuis plus de dix ans et qui lui permet « d’entretenir sa petite famille ». A côté de son lot de terre sur lequel elle fait pousser une variété de légume se trouve celui de Xavier Nikiéma, un sexagénaire qui fait le métier depuis plus de quinze ans. Ils seraient plus de cent à pratiquer cette activité dans les alentours du barrage n°2. Abdoulaye Ouarma est vendeur de plantes. Les plantes, il s’y connait puisque qu’il a débuté cette activité il y a de cela quatorze ans. Il dit aussi arriver à vivre de son activité.
Les barrages sont donc un pôle économique important. Cependant, le bémol est la question de la préservation et de la détérioration de ces retenus d’eau qui, à n’en pas douter, constituent une richesse écologique pour le pays.

L’enjeu de la préservation du barrage

Ces différentes activités sont des facteurs de dégradation des barrages. Les maquis sont des endroits de cumule de déchets et le maraichage participe de manière active à son ensablement. M. Nikiéma et ses camarades disent ne pas ignorer ce fait qui constitue pour eux aussi un aspect inquiétant dont ils se soucient : « nous sommes les premiers concernés par l’état de dégradation du barrage », disent-ils. Et leurs regrets sont que ni la mairie ni le ministère de l’agriculture ni celui de l’environnement et du cadre de vie ne sont venus avec l’intention de s’entretenir avec eux sur aucun sujet que ce soit. M. Kabré du ‘’ maquis Manathan ‘’ est plus révolté par ce sujet. Avec un ton frisant la colère, il affirme qu’ « on veut porter les accusations sur des personnes comme moi qui ne cherchent qu’à avoir de quoi vivre et faire vivre nos proches ». Mais la vraie source de détérioration du barrage est, selon lui, le canal au bord du barrage où des quantités énormes de déchets sont déversées tout le temps. « Un canal que moi ni vous, n’avons créé », ajoute-t-il.

Des acteurs délaissés

C’est en effet le sentiment qui se dégage lorsqu’ils, chacun en fonction de son activité, s’expriment sur l’intérêt que leur accordent les autorités. Eux qui ne cherchent qu’à mener une activité pour laquelle ils s’y connaissent, dans des endroits qui leur sont propices, pour pouvoir subvenir au besoin de leurs familles. « Si on me dit de quitter ce lieu, où est-ce que je pourrai faire mon travail. Pourtant il faut que je vive, est ce qu’il faudra que je vole pour pouvoir survivre ? », s’est interrogé M. Ouarma. Pour lui, un intérêt et un soutien des autorités pourraient permettre de mieux organiser leur travail afin de ne pas nuire au barrage.

S’intéresser à eux revient aussi, surtout pour les maraichers et les vendeurs de plantes, à les aider dans l’exécution même de leur activité, notamment par un appui matériel. M. Nikiéma et ses camarades signifient à cet effet que la seule structure à s’être intéressée à ce qu’ils font est la FAO qui, il y a trois ans, a financé à hauteur d’environ 700 millions de F CFA la perforation de puits sur leur site et à Boulmiougou. Cependant, ce ne sont que douze puits qui ont été perforés à leur niveau. M. Nikiéma, en nous présentant les puits, souligne avec exaspération la qualité défectueuse de ces infrastructures qui déjà commencent à s’effondrer. L’évocation d’une collaboration entre les autorités et les principaux acteurs des activités laisse M. Kabré sceptique. Un scepticisme qui s’explique par le fait qu’il a reçu, à plusieurs reprises des représentants de structures sans qu’il y ait eu une suite quelconque.
Certes ces activités ont des impacts négatifs sur les barrages. Cependant, il est sans doute possible aussi de trouver des mesures pouvant permettre de résorber ces différends, car il s’avère incontestable que certains en ont besoin. M. Tiendrébeogo, maraicher, est pessimiste sur leur sort : « nous savons qu’un jour, on nous fera quitter cet endroit sans préavis, mais nous ne serons pas les seuls à en subir, bien de Burkinabè le subiront aussi ».

Martiale Zongo (stagiaire)
Lefaso.net

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