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FILSAH  : Un coton mal tissé et qui fait le buzz

Publié le lundi 1er avril 2013 à 22h33min

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FILSAH 	 :     Un coton mal tissé et qui fait le buzz

Abdoulaye Nabolé, le Directeur de la filature du Sahel veut croire que son entreprise n’est pas en crise en ce moment. Lui qui parie sur des perspectives plus qu’encourageantes. Sauf que l’information de la grève de la faim entamée par l’un de ses agents et relayée dans la presse en ligne, n’est pas de nature à apporter la sérénité. Bien évidemment, le faso.net suit cette affaire depuis le début. Ainsi, après avoir rencontré le patron de la Filsah, à sa demande, nous vous donnons à lire d’autres éléments qui permettront à chacune et à chacun de se faire son idée sur la question.

Du mot liminaire du Directeur général de la Filsah

« Je m’appelle Abdoulaye Nabolé. Je suis le Directeur général de la Filature du Sahel. J’ai sollicité à rencontrer les animateurs du site lefaso.net, pour leur présenter mes sentiments par rapport à ce qui se passe. En réalité, depuis une semaine à peu près, les uns et les autres m’auraient dit que j’ai sur moi le délégué général qui a décidé de faire une grève de la faim.

Il a fallu attendre pour avoir un certain nombre d’éléments. Je ne veux pas rentrer dans la polémique, mais en tant que responsable de la société, c’était tout à fait normal que je regarde un peu autour de cette question.

Parce que je me suis aperçu qu’en fait, y a un message qu’il a lancé à l’endroit des autorités. Personnellement, je pense que ce n’est pas bien présenté. Parce que je pense que c’est une espèce d’ultimatum. Ce n’est pas une très bonne manière de procéder. Néanmoins je considère que c’est un jeune et que des fois, par dépit, on peut se comporter d’une certaine manière.

Cela fait maintenant près d’une semaine que cette nouvelle est là et que c’est donc une préoccupation qui dure. Donc en tant que Directeur général de Filsah, il me faut aller en dehors des questions de gestion pures et dures de l’entreprise, dans une démarche humanitaire et sensible dirais-je, de voir qu’est-ce qui ne va pas ? Qu’est-ce qui est lié à cette détresse.

Mais dans la mesure où la démarche n’était pas directement adressée à moi, moi je ne peux pas non plus l’interpeller au niveau de la société. Tout simplement parce que depuis cette date-là, monsieur Ouédraogo Seydou travaille normalement à ses heures de service, conformément à son contrat qu’il remplit jusqu’aujourd’hui.

A l’heure où je vous parle, il travaille normalement et son travail consiste à conduire une machine. Et ça se fait debout ! Bon, je veux bien qu’il soit solide comme ça ! C’est très bien d’ailleurs ! Mais je dirais que ce n’est pas une bonne façon de régler les problèmes.

Et franchement, c’est la première fois qu’on voit une telle démarche au Burkina ! Je ne sais pas qu’elle est la solution appropriée. Et c’est pour cette raison que je dis que je quitte le cadre de la gestion de l’entreprise, c’est-à-dire mes responsabilités qui existent au niveau de Filsah. Puisqu’il y a un Conseil qui m’a désigné comme Directeur général !

C’est justement pour présider à la bonne réussite de cette société et donc à la pérennisation de ses activités fondamentales. Donc c’est cela ma préoccupation fondamentale. Donc je vois maintenant qu’après une semaine et qu’il y a tous ces échanges.

C’est dans ce sens que j’ai fait cette démarche. Comme je suis absent de Bobo, je demande à monsieur Ouédraogo Seydou de surseoir à cette action que je troue suicidaire. Et qui n’arrange rien, qui n’apporte rien nulle part. Et puis à mon retour, je vais le rencontrer et puis je vais l’écouter. »

Questions d’éclaircissements à Abdoulaye Nabolé

Lefaso.net : Vous confirmez donc bien que l’agent en question fait partie de vos effectifs ?

Abdoulaye Nabolé : Ouédraogo Seydou, j’ai vu les photos. En tout cas si c’est bien lui il fait partie de nos effectifs. Et il se trouve être le délégué général, donc des représentants délégués de notre société.

Lefaso.net : Concernant son mouvement et les raisons qu’il avance, l’aviez-vous-déjà approché pour savoir ce qu’il en est exactement ?

Abdoulaye Nabolé : Vous savez, pour vous dire la vérité, je ne veux pas faire dans la polémique. Quoi qu’il en soit, il existe des institutions et des structures pour ce genre de questions(…)Mais je dis que j’interviens aujourd’hui en dehors de toute démarche de gestion d’entreprise et qui comprend les différents éléments dont je viens de vous parler. Je quitte ce domaine-là, pour lancer un appel à ce monsieur de surseoir à son action et quand je vais rentrer, je vais le rencontrer. Et de cette façon, à l’issue de ce qui sera dit, je vous ferai appel d’ailleurs.

Lefaso.net : Il n’y a donc aucun problème à la Filsah ?

Abdoulaye Nabolé : Il n’y a aucun problème de fonctionnement à la Filature du Sahel. Les choses se font normalement. Ce qui se passe comme dans toute société, elle a un règlement intérieur. Et donc s’il existe un règlement intérieur, cela veut dire qu’il ya des règles qu’il faut respecter pour faciliter le travail à tout le monde.

Seydou Ouédraogo, le buzzman

Seydou Ouédraogo le délégué général des travailleurs de la Filature du Sahel se dit déterminé à poursuivre son combat.

Peu importe la polémique sur le nombre de kilogrammes perdus, 2 ou 10, toujours est-il que cet agent sera parvenu à attirer les projecteurs médiatiques sur sa situation. L’intéressé en a-t-il lui- même conscience à présent ? A l’évidence oui.

Sans aucun doute victime de l’indifférence générale dès le départ, son action tend désormais à être prise avec tout le sérieux requis.
Et pour cause les cendres de l’affaire Justin Zongo en 2011, sont encore toutes chaudes. Avec leurs conséquences multiples et leurs nombreuses implications sociales et politiques. Par conséquent, mieux vaut ne pas trop négliger le petit caillou qui traine dans la chaussure.

Emotion contre communication de crise

L’émotion suscitée par cette affaire de grève de la faim à la Filsah et le déchaînement de passion qui en résulte est sans aucun doute à l’image d’une certaine vision des relations entre employeurs et employés au Burkina. Et sans aucun doute au-delà, entre gouvernants et gouvernés, entre le service public de l’administration et les administrés.

Dans un pays qui traîne un lourd passif en matière de protection des droits humains et qui en plus fait un apprentissage difficile de la démocratie, l’idée, même effleurée, d’un agent en grève de la faim pour faire entendre sa petite voix face à la machine médiatique du capital peut sembler des plus déséquilibrées.

Au point que donner la parole à l’un ou à l’autre n’est pas toujours aisé. Quand cela n’est pas incompris tout simplement. Il est vrai que dans ce genre de conflit, la tentation (facile) de l’’’intox’’ et/ou de la manipulation est présente à chaque occasion. D’où la nécessité de garder une distanciation d’avec les faits, pour ne pas dire d’avec les prétentions tels/telles que présentés/présentées ici où là.

En outre, la récurrence des conflits sociaux dans notre pays ces dernières années, est un indicateur qui doit donner à réfléchir aux pouvoirs publics. Une économie de marché n’est viable que lorsqu’elle permet à tous, travailleurs et employés de bénéficier des fruits de la redistribution.

Dans leur volonté de paraitre les bons élèves (réformateurs) de la Banque Mondiale et du FMI, les pays africains dont le Burkina ont hélas cédé des parcelles entières de souveraineté dans les secteurs stratégiques de l’entreprise. D’où ces récriminations sur fond de paupérisation (47% en moyenne) et qui font craindre le pire.

Souhaitons simplement que la sagesse puisse prévaloir in fine à tous les niveaux. Et que le coton puisse à nouveau se remettre sur le métier à tisser en profitant à tous les acteurs de la chaîne.

Dossier : Juvénal SOME

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