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Société minière Kalsaka Mining : Une grève illimitée déclenchée par les travailleurs

Publié le mardi 24 mai 2011 à 02h07min

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Les travailleurs de Kalsaka Mining observent depuis le 14 mai un arrêt de travail. La grève qui a mobilisé les 350 agents, a touché tous les secteurs de la mine. Malgré les négociations entamées, les deux camps se regardent en chien de faïence. Selon les grévistes, le départ du DG de la mine serait la solution.

Gros engins, citernes, camions stationnés, des bureaux hermétiquement fermés, voici ce que présente maintenant Kalsaka Mining, suite à la grève déclenchée par les travailleurs de la mine depuis le 14 mai 2010. Par cet arrêt de travail illimitée, les miniers veulent se faire entendre par la direction générale et le monde entier sur leurs conditions de vie et de travail qu’ils jugent misérables et lamentables, a laissé entendre le délégué du personnel, Zèba Moussa. Pour les grévistes, il n’y a pas de négociation sans le départ sans condition du directeur général, Reynolds Anin Yeboah et une augmentation salariale non négociable de 80% applicable à tous les travailleurs.

Pourtant le directeur général, voué à l’hégémonie, propose seulement 5%. Un dialogue de sourds s’est installé entre les deux camps qui a conduit à l’arrêt du travail : « nos salaires sont assez bas, la majorité de nos travailleurs sont des ouvriers et si on parle de 5%, ça ne représente rien. Entre leurs salaires et les nôtres, c’est le jour et la nuit », s’est exclamé le délégué du personnel, Kaboré T Yves. Salif Ouédraogo, la soixantaine bien sonnée est un vieux de la vieille des mines. Il a même été un cadre du département en charge des mines. Aujourd’hui, travailleur de Kalsaka Mining , il est déçu et interpelle les autorités à être regardantes sur nos mines, car il y a péril en la demeure : « ça fait deux ans que j’ai attiré l’attention du ministère des mines. J’ai même rencontré l’inspecteur technique (sans préciser le nom et prénom) pour lui expliquer la situation catastrophe de la mine.

Tenez en tant qu’ingénieur je n’ai même pas le 1/4 de salaire d’un ouvrier ghanéen sur ce site minier. Le plus bas salaire des travailleurs ghanéens est de 4.000.000 F CFA. Ils font 80% de la masse salariale ». Les frondeurs sont exaspérés et révoltés de voir des Ghanéens sans diplôme, sans qualification et sans compétence ravir les vedettes en matière de salaire pendant que ceux qui ont des compétences broient le noir, a laissé entendre Salif Ouédraogo, suivi d’un soupir qui en dit long. Le délégué du personnel a tenu à préciser qu’ils ne sont pas xénophobes car dit-il, nous avons aussi des frères burkinabè dans d’autres pays mais soutient-il, donnez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui lui appartient. Un jeune minier connu sous le sobriquet

« Commandant Zabra » a été on ne peut plus clair : « dans l’armée, chacun connaît sa place mais dans cette mine, les caporaux gèrent les généraux ». Cette déclaration du jeune minier a été suivie d’un tonnerre d’applaudissements. Les travailleurs de Kalsaka Mining ont une longue liste de récriminations contre leur directeur général, le Ghanéen Yeboah, tantôt dictateur, tantôt d’avoir privilégié, les Ghanéens, réfractaires à tous les produits burkinabè, manque de respect aux couleurs nationales, des menaces de licenciements, des voyages privilégiés aux Ghanéens... Les travailleurs de Kalsaka Mining semblent être décidés à en finir avec le directeur général : « le directeur général nous a informés qu’il arrêtait toute négociation et celui qui ne veut pas travailler peut rentrer », a expliqué un minier.

Cette phrase a blessé plus d’un sur le site et cela s’est traduit pas le départ précipité du directeur général du site : « nous avons donné quelques minutes à la direction générale pour déguerpir les lieux le 15 mai à 14h, il s’est exécuté immédiatement », a laissé entendre les miniers. En plus des augmentations de salaire, les miniers disent être dépourvus de tout : équipements vestimentaires délabrés, chaussures de sécurité qui n’existent que de nom, nourriture servie dans des conditions inimaginables, avenir sombre .« Il y a 3 à 4 démissions par mois à Kalsaka Mining pour d’autres mines. Nous ne mangeons que des conserves ; même les sachets d’eau sont importés pourtant il y a des sachets d’eau au Burkina, de bons restaurants également », a laissé entendre le délégué du personnel, M. Kaboré T Yves. Les travailleurs de Kalsaka Mining étaient très nombreux à nous informer qu’ils travaillaient depuis 15 mois sur la mine sans contrat.

Les miniers reprochent également au directeur général de faire bénéficier ses compatriotes de voyages dorés en avion, alors que les Burkinabè sont obligés de débourser leurs propres frais pour se rendre dans leurs familles respectives. A.K a préféré requérir l’anonymat. Il nous a révélé que la fosse est en surproduction. Cela veut dire que Kalsaka Mining fermera les portes bien avant les six ans de contrat qui le lie à l’Etat burkinabé. Cela signifie également que la mine ne payera pas les taxes car elle bouclera les exploitations avant décembre 2011. Vrai ou faux ? Le temps nous situera.

Une chose est sûre, rien ne semble être respecté à Kalsaka Mining, la mine n’est pas clôturée et la poudrière est à moins de 100 mètres d’un dépôt de carburant, les concessions de Kalsaka Mining portent les fissures des explosions de la mine. Suite à la crise, le département en charge des mines a dépêché une délégation conduite par le secrétaire général dudit ministère. La province du Yatenga était représentée par le haut-commissaire, Jean-Baptiste Zongo et le directeur régional du travail, Abdoulaye Sakandé . La mission a entamé les négociations le 18 mai à 12h 46 et s’est poursuivi le 19 mai à 2h 37mn. La direction générale qui était de la partie était sous escorte policière et gendarme. Ce qui a étonné plus d’un, c’est le fait que la mission ait demandé au maire de Kalsaka de se retirer de la salle ; pourtant sa population demande également le départ du DG car dit-elle , elle n’aurait pas respecté ses engagements vis-à-vis des propriétaires terriens.

Le maire de Kalsaka qui est resté dehors avec la sécurité somnolait sous le hangar, las d’attendre il s’est retiré quelques heures après. Nous avons tenté de rentrer en contact avec la direction générale pour écouter sa version des choses. Depuis le 15 mai jusqu’à l’heure où nous bouclions ce reportage, le directeur des ressources humaines qui avait promis de donner suite à notre rencontre est lui aussi resté muet.

Jean-victor ouedraogo (Ouedraogo_ jeanvictor@yahoo.fr)

Sidwaya

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