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ETAT MAJOR DE CAMPAGNE DE BLAISE COMPAORE : AUTOPSIE EN ATTENDANT LE PROGRAMME

Publié le lundi 13 septembre 2010 à 02h39min

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Assimi Kouanda

A quelques 70 jours de l’élection présidentielle, la priorité des Burkinabé n’est pas orientée vers cette consultation. Pour eux, elle ne contient ni suspense ni espérance qui puisse influer sur les dures conditions de leur quotidien. Ils savent qu’ils n’auront affaire qu’à une formalité. Ce qui par contre suscite encore quelque intérêt pour eux, c’est la perspective de réformes utiles qui viendraient opérer les changements qu’ils espèrent à tous les points de vue de la gouvernance nationale. Ils ont donc quelques motivations pour suivre le débat sur les réformes engagées par les politiques, surtout que le chef de l’Etat s’est solennellement prononcé sur le projet.

Si par conséquent, ce dernier, comme il a invité les citoyens à y réfléchir, est sincère, on se dit qu’on en verra des signes dans la configuration de sa « machine » de guerre comme dans son programme de campagne. Ce dernier n’étant pas encore publié, contentons-nous pour le moment, de l’autopsie de sa structure électorale.

Une chose est d’ores et déjà perçue comme une rupture : c’est la responsabilisation d’Assimi Kouanda en tant que Directeur de campagne. On aurait attendu à ce poste, un Salif Diallo, un Yé Bognessan, bref une pointure du CDP trempée dans les arcanes électoraux. En lieu et place, Blaise Compaoré a préféré quelqu’un de moins voyant, bien qu’aux compétences établies.

Au sein de la famille gouvernante, quelques-uns craignent que le nouveau patron de la campagne ne soit pas en mesure d’assurer au « Boss » les victoires éclatantes d’antan. D’autres dans l’opinion prédisent une campagne plus sereine dont la victoire au final ne reviendrait qu’au Directeur de campagne en chef, Blaise Compaoré lui-même. Mais au pied du mur, on verra bien le maçon ! Et Assimi pour sa part, nous démontrera si le chef de l’Etat a vu juste en misant sur lui.

Ce qui est sûr, c’est que pour cette équipe, des commentaires, il n’en manque pas. Au premier coup d’œil, on relève l’absence de grands ténors du parti : Salif Diallo, Juliette Bonkoungou, Naboho Kanidoua, Fatou Diendéré… Ensuite, si le CDP conserve une présence non négligeable dans l’Etat-major, nous avons eu droit à une cooptation en direction des éléments de la majorité présidentielle qui atteste sans doute d’une volonté de rassembler la grande famille pour donner des couleurs à la victoire. Il y en a qui avancent que c’est une façon de tailler des croupières au CDP et il y en a qui soutiennent que la mise au rencart d’un Salif Diallo, d’une Juliette Bonkoungou, d’une Fatou Diendéré, pourrait en fait cacher un agenda de leur part voire un projet de recompositions futures qui ne serait pas étranger à Blaise Compaoré en personne. De fait, on imagine difficilement des réformes crédibles de la part du pouvoir sans aucune participation de ces personnalités qui passent, aux yeux d’une grande partie des Burkinabé, pour être les plus engagées dans ce sens parmi les fidèles de Blaise Compaoré.

Mais des analyses, il y en a aussi par rapport à ce souci visible d’Assimi Kouanda, de ne pas encombrer son « gouvernement » par des figures contestées ou à problème. Est-ce pour ne pas courir le risque de plomber quelque peu sa campagne en donnant des possibilités de charge à des candidats adversaires ? Ca se pourrait !

Mais ce souci de pondération, de doigté, est quelque part contrarié par quelques observations.

Pourquoi avoir nommé Ernest Paramanga Yonli, ancien premier Ministre, adjoint de sa Majesté Koupiendeli, surtout quand on sait qu’entre les deux, ce n’est pas le parfait amour ?

Ensuite, il y a cette question du « genre » qui ne manquera pas de rebondir pendant la campagne. Sur 44 postes, il n’y a que 4 femmes. Moins de 10 % : ce ne sont pas les 30 % souhaités en général par la communauté internationale ! Et en plus, aucune n’a un poste plein : on a une directrice nationale adjointe, et en dessous, trois directrices régionales adjointes. On aurait pu faire mieux ! Mais bon, la politique a ses obligations, nous imaginons, qui ne peuvent laisser place au primat de la question « genre » !

L’ADF/RDA, relève-t-on, est bien représentée en nombre mais peut-être pas tant que ça en qualité puisque la plupart des postes occupés sont des postes d’adjoints.

Maintenant, quant à la capacité de cette équipe de mener une campagne axée sur les réformes, des doutes existent. Certains vont même jusqu’à dire qu’il ne faut pas rêver. Et le « baobab » Léonard Compaoré est là pour nous rappeler qu’on veillera au grain, comme par le passé.

Il y a certes le patron lui-même, Assimi Kouanda, Yé Bongnessan…, et dans une certaine mesure Tamboura Ousseini, qui ne sont ni par tempérament, ni par formation, hermétiques au changement, mais pourront-ils constituer le contrepoids suffisant à tous ceux qui sont dans la structure et qui manquent soit de compétences avérées, soit de volonté véritable de réformes parce que surtout préoccupés de garantir leur place au soleil ? Mais n’oublions pas que le dernier mot revient toujours à l’homme de Kossyam.

De tout cela, on sera certainement mieux fixé à la divulgation du Programme car c’est sur cette charpente que va se dérouler toute la campagne électorale. L’opinion saura également si les réformes s’entendent uniquement de celles énoncées par le CDP lors de son congrès ou si au-delà de ce parti, elles vont aussi concerner les préoccupations formulées par bien d’autres partis, associations et citoyens d’une manière générale. Nous saurons alors enfin si oui ou non, en parlant de réformes, le chef de l’Etat n’entendait qu’inviter les Burkinabé dans une auberge espagnole, laissant chacun y venir, habillé de ses rêves.

En tout les cas, il n’en manquera pas alors sur la brèche, même non candidats à la présidentielle, pour lui rendre la campagne difficile si jamais, l’entourloupe se confirmait !

San Finna

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