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Le musée Rayimi ou le refus de l’oubli

Publié le vendredi 23 juillet 2010 à 20h10min

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Le promoteur donnant des explications aux visiteurs

Yisuka, le premier quartier de Koudougou a désormais son musée. Ce condensé d’histoire donne à voir la diversité culturelle de la région du centre-ouest, la rencontre de Koudougou avec l’occident et les religions importées. Le musée Rayimi, comme son nom l’indique, se veut le lieu du refus de l’oubli. Son inauguration est intervenue le 17 juillet 2010 sous le regard du fils du premier commandant de Koudougou sous l’ère coloniale (1925-1927).

Le musée est le reflet de la culture d’un peuple, pourtant le Burkina connaît un déficit d’institutions muséales. Pas faute d’avoir un riche passé culturel. Mais parce que les ex-colons ont emporté une partie importante de la mémoire de notre pays rendant la recherche documentaire très difficile. Naaba Saaga 1er de Yisuka, après ses études n’avaient presque rien retrouvé appartenant à son père. Touché dans son amour propre, ce choc se transforme en une révolte mais une révolte positive. Il se lance dans la recherche de sa mémoire perdue. L’appel du ministre de la culture, du tourisme et de la communication pour le rapatriement des fonds documentaires du pays résonne pour lui comme « va en guerre ». Naaba Saaga 1er de Yisuka, cet assoiffé de la culture (la culture est la battérie de ma vie, nous confiait-il en Mars dernier), trouve le moment opportun d’apporter sa contribution.

Le hasard faisant bien les choses, il rencontre de façon fortuite Claude de Beauminy, le fils du premier commandant de Koudougou (André Chrestien de Beauminy) sous l’ère coloniale lors d’un de ses nombreux déplacements en France. Il réussit à le convaincre, sans grandes difficultés, à lui rétrocéder les photographies faites par son père. Le premier pas est franchi par Naaba Saaga. C’est le début d’une longue histoire qui accouchera d’un musée. Son nom : Rayimi qui signifie n’oublies pas en langue Mooré. Et ce chef traditionnel refusera l’oubli jusqu’au bout.

Ensuite, il se rend ensuite à Rome chez les pères blancs, missionnaires au Burkina à l’époque. Après moultes discussions, ils acceptèrent eux aussi de rétrocéder les précieuses images des débuts de l’évangélisation. « Les pères blancs ont aussi accepté partager la richesse de leur premier contact avec nos parents », se réjouit le chef de Yisuka, promoteur du musée. En ce moment précis, Naaba Saaga est un homme comblé. Il peut réaliser enfin son rêve de mettre en place un musée. Ainsi naquit le musée Rayimi de Yisuka, celui du premier quartier de Koudougou.

Des travailleurs voltaïques sur les chantiers coloniaux, la fête au village avec les masques, l’histoire de l’empire mossi, l’histoire de l’évangélisation des diocèses de Koudougou et de Réo, le début de l’économie marchande, le bureau du commandant, sa résidence, ou encore les wiss-kamba ou cavaliers rouges ; bref tous les pans de l’histoire de la région du centre-ouest sont représentés dans ce temple de souvenir de 27mètres carré.

Au total, 29 photographies du début du XXe siècle, du temps de l’administration coloniale et de l’arrivée de l’église catholique à Koudougou, de l’accoutrement du premier prêtre de Yisuka sont exposées lors de la cérémonie inaugurale du musée Rayimi qui a eu lieu ce samedi 17 juillet 2010. Toutes les Photos exposées sont de la photothèque des pères blancs de Rome et de André Chrestien de Beauminy dont le fils a tenu à être présent lors de l’inauguration de ce musée. Il affirme d’ailleurs que son père a vécu les moments les plus émouvants de sa vie à Koudougou.

La reproduction d’une cour traditionnelle comprenant trois greniers de types différents et une meule traditionnelle complètent ce réservoir de l’histoire du centre-ouest qui n’attend que les visiteurs. Il s’ouvre à temps car le pays des hommes intègres est en train de célébrer ses 50 ans d’indépendance sous le thème « souvenir et espérance ». Rayimi permettra à sa façon de revisiter les souvenirs du Burkina et surtout ne rien oublier. C’est tout à l’honneur du Naaba de Yisuka.

Construit en Banco et induit à l’intérieur de terre gourounsi, ce musée met côte à côte les cultures Mossi et Gourounsi, les deux ethnies majoritaires de la région. Les photos de l’entrée du protestantisme et de l’islam à Koudougou sont attendues par le promoteur du musée. Il est aussi prévu l’ouverture d’un pavillon d’objet de la région en collection et traitement et un pavillon du textile notamment les habits traditionnels en cotonnade, tissage sans oublier les chaussures BATA (première usine de fabrication de chaussures qu’a abrité Koudougou).

Pour une meilleure représentativité de la culture de la région, Naaba Saaga 1er en appelle aux « détenteurs d’objets du quartier Yisuka pour que ce musée retrouve ce qui fait de nous des Yisukalais ». « Ensemble, nous devons le faire vivre, d’abord en le visitant, ensuite en apportant des objets d’arts et enfin en le faisant connaître à nos amis et visiteurs », conclut-il.

Moussa Diallo
Lefaso.net

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