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Enquêtes de la CPI en Guinée : Justice d’accord, paix d’abord

Publié le jeudi 18 février 2010 à 00h44min

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D’abord, que l’on s’entende bien. La tragédie du 28 septembre 2009 au stade de Conakry ne doit pas rester impunie. Que se soit devant les tribunaux guinéens ou devant les juridictions internationales, commanditaires et exécutants du massacre de quelque cent cinquante partisans civils de l’opposition doivent être châtiés à la hauteur de leur forfait. Ce préalable établi, abordons maintenant l’objet du présent édito qui se trouve être une inquiétude face aux travaux préliminaires de la Cour pénale internationale (CPI) en Guinée au sujet de la battue organisée par la soldatesque guinéenne au temps fort du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD), jadis dirigé sous la férule du capitaine Moussa Dadis Camara.

Compétente, ici, la juridiction permanente l’est assurément puisque la Guinée en est un Etat partie. « Mais où, diable, se trouve le problème ? », s’interrogeront certaines bonnes âmes. Sur la fragile sortie de crise, nom de Dieu !

Tenez ! Depuis le lundi 15 février dernier, une délégation d’experts de la CPI séjourne à Conakry. Rejointe le lendemain par la procureure adjointe de la Cour, Fatou Bensoua, elle a pour mission, entre autres, de faire sa propre conviction pertinente sur cette affaire en rencontrant les victimes et recouper les informations de manière contradictoire en se servant d’entretiens avec des personnes et autres organisations. Louable.

Seulement, c’est au niveau de l’opportunité d’une telle visite de travail que le bât blesse. En effet, elle intervient au moment où les protagonistes de la crise s’échinent à remettre le pays sur la voie d’une renaissance démocratique, conformément à l’accord de Ouagadougou signé le 15 janvier dernier. Avec les risques de dérapage et de ranimation des rancœurs à une période d’espérance mais ô combien sensible.

Aujourd’hui, quelle est la priorité des priorités au pays de Sékou Touré ? Serait-ce la soif de justice pour les tués du 28-Septembre ou plutôt le désir de paix ?

Questions que d’aucuns jugeront sans doute cynique. Mais à se référer à l’ordre normal des choses, la justice, la vraie, n’est que la fille de la paix. La première est une chimère sans la seconde. L’une ne prospère que dans l’autre.

Or en voulant désinfecter, à l’heure actuelle, le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest, la CPI prend inutilement le risque d’y ensemencer des germes de trouble. Car s’il se trouve que de présumés coupables ont toujours main sur les commandes de l’Etat, ils n’hésiteront guère à torpiller d’une manière ou d’une autre le processus de transition vers un véritable Etat de droit, celui-là même dans lequel ils ne pourraient se soustraire aux poursuites judiciaires.

Vu que les crimes abominables perpétrés au stade de Conakry sont imprescriptibles, l’urgence pour les Guinéens, c’est de parvenir à l’instauration et à l’enracinement d’institutions démocratiques. Le reste en découlera de source.

Inverser les priorités ou les juxtaposer pourrait compromettre les chances inouïes d’un pays d’en finir avec le martyre dans lequel l’ont, jusque-là, maintenu, ses dirigeants.

Alain Saint Robespierre

L’Observateur Paalga

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