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Urbanisation : Ouagadougou, mégalopole mégalo d’un pays méga pauvre

Publié le mercredi 2 janvier 2008 à 10h42min

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Ouagadougou, la ville aux mille projets, telle est l’ambition que le grand petit maire de la capitale nourrit pour la cité qu’il dirige depuis 1995. Tout semble indiquer que ces projets ne seront pas que de simples vœux. Depuis quelques mois, en effet, les chantiers sortent de terre et Ouaga est en train de changer de look. Elle fait pâlir de jalousie certaines capitales africaines.

La voie du développement passant forcément par le développement de la voie, les autorités municipales - fortement appuyées par le gouvernement - ont entrepris la construction de routes dans les différents arrondissements de la ville. Mais le projet qui tient le plus à cœur au maire Simon Compaoré est sans nul doute les trois échangeurs qui devront être construits aux carrefours stratégiques de la cité. Ce sont de véritables fiertés pour la ville. Il n’y a pas longtemps, les Burkinabè étaient de vrais gaous quand ils se rendaient à Abidjan ou Bamako. Assurément, Ouaga ne présentera plus le même visage avec la Zaca qui est en construction, le marché central que l’on promet ultramoderne et les 10 000 logements sociaux qui seront disponibles dans quelques mois. Cela est d’autant plus vrai que qui parle de Ouagadougou évoque Ouaga 2000 et aussi la construction d’un centre hospitalier d’une capacité de 550 lits. Si on se fie donc à l’adage qui veut que quand le bâtiment va, tout va, on peut dire que tout semble rose dans Simonville. Or, l’arbre ne doit pas cacher la forêt.

Ces grands chantiers contribueront, certes, à embellir la capitale, mais ils ne changeront pas fondamentalement l’existence du commun des mortels de Ouagadougou, sinon qu’à le perturber dans son quotidien. Il ne s’agit pas de remettre en cause l’intérêt de tels travaux mais plutôt de savoir si, quelque part, on ne met pas la charrue devant les bœufs. Par ces grandes réalisations, les décideurs restent dans leur attachement aux dépenses de prestige et font peu de place aux souffrances des citoyens ; car, pour l’instant en tout cas, rien d’audacieux n’a été fait pour vaincre la pauvreté qui ronge les Burkinabè. Il est indiscutable que les déguerpissements dont certains citoyens feront justement l’objet pour faire place aux travaux ne feront pas déguerpir la pauvreté de Simonville.

Il faut craindre que toutes ces infrastructures de luxe n’approfondissent le fossé déjà énorme entre les pauvres et les riches. Les premiers seront toujours les laissés-pour-compte et seront donc en marge des progrès induits par ces infrastructures. Cela pourrait conduire à des frustrations compréhensibles et à des récriminations contre une élite qui concentre l’essentiel des programmes de développement sur ses seuls intérêts. Il faut donc rectifier le tir et faire en sorte que l’urbanisation à grande vitesse rime avec un réel épanouissement des populations de la ville. Cela passe par des investissements conséquents dans les domaines sociaux notamment.

C’est à ce prix que ces infrastructures hypermodernes pourront influencer positivement le rang du Burkina dans le classement du développement humain durable du Pnud.
A défaut, on court le risque de créer des citoyens de seconde zone cantonnés dans les périphéries d’une belle ville où l’espérance d’un progrès continue de s’éloigner d’eux.

Adam Igor

Journal du jeudi

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