Si comme indiqué, les éliminatoires du Mondial 2006 ont permis d’assister à une vraie révolution avec les qualifications du Togo et de l’Angola et dans une moindre mesure du Ghana, la phase finale de la CAN égyptienne risque d’être d’un tout autre cru. Première raison, la « spontanéité » de la compétition avec des matchs rapprochés et au verdict couperet ce qui laisse peu de place au « rattrapage » et à la surprise.

Autrement dit l’habitude de la haute compétition qui, seule, confère un mental de « winner » interviendra pour beaucoup, ce qui donne une longueur d’avance aux équipes ayant un vécu à ce niveau. Deuxième maison, l’esprit revanchard qui animera certains de ces cadors qui ne seraient pas fâchés de prouver que leur élimination du mondial relève d’un accident de parcours.

Habitude de la victoire, esprit revanchard, les grands perdants d’Allemagne 2006 seront sans doute au rendez-vous d’autant que l’Egypte, le Cameroun, le Nigeria, le Maroc et le Sénégal aligneront toutes leurs stars. A tout seigneur, tout honneur, l’Egypte, le pays-hôte sera le favori numéro un de la compétition.

Bâti sur l’ossature du National Al Ahly du Caire, l’équipe qui a remporté la Champions league africaine sans connaître la moindre défaite, le onze égyptien sera difficile à manoeuvrer sur ses terres.

Avec son public chaud et passionné, sa star Hassan Mido et son entraîneur Hassan Shehata, maître-acticien connaissant parfaitement la mentalité des joueurs, l’Egypte visera un cinquième sacre qui le mettrait définitivement sur le toit de l’Afrique. Seul problème, elle n’a pas bénéficié d’un tirage facile avec un autre déçu du Mondial, le Maroc et le nouvel épouvantail du foot africain, la Côte d’Ivoire. Le Maroc d’abord, qui a confirmé tout le bien que l’on pensait de lui lors de la CAN 2004 en Tunisie (finaliste) et qui a été éliminé sur le fil du rasoir par la Tunisie pour le Mondial allemand.

Avec une défense de fer où la paire Naybet-El Karkouri est un mélange d’expérience et d’intelligence, un milieu « aérodynamique » et une attaque tranchante avec Marwan Chamakh, le joyau de la couronne, les enfants du Roi peuvent aller loin. Ils devront cependant se sortir d’abord d’un groupe qui n’est pas loin de ressembler à celui de la mort avec la Côte d’Ivoire de Drogba, révélée à elle-même lors des éliminatoires du Mondial 2006 et qui depuis, ne cesse de confirmer tout le bien que l’on pense d’elle.

Seuls handicaps, son absence de concentration à certains moments clés (son avant dernier match en éliminatoires du mondial, face au Cameroun en est la parfaite illustration) et une défense pas toujours très sûre, notamment dans les duels aériens. Aussi, l’équation Kalou Bonaventure devra être résolue, les Eléphants ne pouvant se passer des talents de ce joueur dont le dilettantisme irrite par moments.

Les Lions encore indomptables

Egypte, Maroc ou Côte d’Ivoire, un grand va tomber dans le groupe A tout comme dans le groupe D où la bataille sera rude entre Nigérians, Ghanéens et Sénégalais. Le Nigeria qui a été sorti contre toute attente du Mondial 2006 par un Angola euphorique aura à cœur de prouver qu’il est toujours une place forte du football.

Sa nouvelle vague emmenée par Obafemi Martins et John Utaka avec le maestro Augustine Okocha à la baguette, voudra sans doute marquer les esprits et prendre date pour l’avenir. En face, les mondialistes ghanéens, amenés par Stephen Appiah, Sammy Osei Kuffour et Asamoah Gyan auront à cœur de réciter leurs gammes avant le show allemand de l’été. Un « concert » que les Sénégalais, autres déçus d’Allemagne 2006, se feront fort de perturber.

Pour ce faire, le banc et l’arrière-banc des « pros » ont été appelés avec les Habib Bèye, Ferdinand Coly, Papa Bouba Diop, Diomansy Camara, Mamadou Niang sans oublier le fantasque El Hadji Ousseynou Diouf. Le groupe C paraît moins relevé avec des « revenants » comme la Zambie et la Guinée qui auront fort à faire face au favori logique, la Tunisie.

Quant à l’Afrique du Sud, son parcours lors des éliminatoires ne plaide pas en sa faveur, même si le contexte ne sera pas identique. Et puis, l’Afrique du Sud a toujours réussi ses phases finales même si entre 1996 (première sortie, premier sacre) et 2004, elle a reculé dans la hiérarchie.

Un groupe qui semble donc promis à la Tunisie même si Zambiens et Guinéens seront durs à manoeuvrer. Dans le groupe B enfin, le Cameroun donne la même impression de favori, nonobstant la présence des mondialistes togolais et angolais et de l’athlétique RD Congo.

Asphyxié et assommé par leur sortie d’un Mondial 2006 qui leur semblait promis, le Cameroun avec Samuel Eto’o Fils en tête, ne veut pas rater cette belle occasion de remettre les pendules à l’heure. Même le vétéran Raymond Kalla Kongo qui effectuait une dernière pige lors de ces éliminatoires à accepter d’honorer la CAN égyptienne afin de ne pas partir sur une « fausse note ».

Avec lui, le capitaine-courage Rigobert Song quoique vieillissant, le sociétaire de Chelsea Jérémie N’jitaph, le Hambourgeois Atouba et le feu-follet d’Ossassuna (liga espagnole) constitueront avec Eto’o, l’âme d’une équipe qui a toutes les allures d’un coffre-fort ou d’une citadelle imprenable. Avec un mental jamais pris à défaut, les Lions Indomptables sont partis pour figurer au moins dans le dernier carré. Ils devront se méfier cependant de l’envie des Togolais et des Angolais et se préparer à des quarts de finale explosifs avec les vainqueurs potentiels du groupe A.

On salive déjà à l’idée d’un Cameroun-Côte d’Ivoire, qui nous situera davantage sur la nouvelle hiérarchie du foot africain. Un plateau, somme toute relevé, donc que celui de la CAN 2006, toute chose qui nous fait dire que les vainqueurs qu’ils soient Camerounais, Egyptiens, Ivoiriens, Marocains ou autres seront forcément beaux. Que la lumière soit donc !

Boubakar SY
Sidwaya