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SEM Sanné Mohamed Topan : “Nous avons une communauté forte et diverse au Mali”

Publié le jeudi 8 décembre 2005 à 07h44min

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S.E.M. Sanné Mohamed Topan

Monsieur Sanné Mohamed Topan est l’ambassadeur du Burkina Faso auprès du Mali, du Niger et de la Guinée avec résidence à Bamako. Nous l’avons rencontré à la faveur du XXIIIe sommet Afrique-France. Il nous parle des relations du Burkina avec les pays de sa juridiction, des difficultés rencontrées par les compatriotes et commente le déroulement de l’élection présidentielle du 13 novembre 2005.

Sidwaya (S) : Ils sont combien de burkinabè à vivre au Mali ?

Sanné Mohamed Topan (SMT) : Nous avons une communauté forte et diverse au Mali. Cela s’explique par l’histoire. Nous avons eu une histoire commune avec le Soudan français au temps colonial. De 1932 à 1947, une bonne partie du Burkina Faso était rattachée au Soudan français. Ce qui a amené une installation des populations sur cette partie du territoire d’alors, notamment dans la région de Ségou pour la construction du grand pont de Makala et l’aménagement de l’Office du Niger.

Aujourd’hui, nous constatons une concentration assez forte de Burkinabè d’origine dans cette partie du Mali. Bien entendu que pour d’autres raisons, des Voltaïques d’alors se sont retrouvés au Mali. Nous parlons de plus en plus de Burkinabè et de Maliens d’origine Burkinabè. Parce que les enfants nés sur le territoire malien et possédant des documents de ce pays sont des Maliens, mais d’origine burkinabè.

S : Des chiffres ?

SMT : Nous n’avons pas de statistiques fiables, mais ils ne sont pas moins du million ou du million et demi. Je n’exagère pas, c’est réel.

S : Dans quels secteurs d’activité ces Burkinabè exercent-ils ?

SMT : Les maliens d’origine burkinabè sont dans tous les domaines d’activité. Il y en a au niveau de la haute administration. Il y a également de grands opérateurs économiques parmi eux. Ils sont également présents dans le petit commerce notamment dans la vente de légumes dans certains marchés. A ce niveau, les Siémou (NDLR : une ethnie du Kénédougou) sont les plus nombreux. Dans les secteurs de l’élevage, de la production rizicole où selon les autorités maliennes nos groupements sont très disciplinés et organisés.

Dans des villages maliens comme Gourcy, Ouahigouya, Tougankoura, Bansa, Lanfièra,, les langues burkinabè sont parlées. Il y a des villages entiers où le mooré est parlé. L’année dernière la fête nationale a mis en exergue cette fraternité séculaire qui se consolide de jour en jour. Toute chose que nous saluons puisque notre travail consiste à renforcer ces liens entre deux pays frères qui sont comme le disait le président Sékou Touré, les deux poumons d’un même corps.

S : Quelles sont les préoccupations quotidiennes des Burkinabè vivant dans les pays de votre juridiction qui vous sont posées ?

SMT : Les préoccupations des Burkinabè sont d’abord d’ordre administratif, c’est-à-dire la délivrance des cartes consulaires. Nous nous attelons à délivrer ces pièces à nos compatriotes. Nous délivrons aussi des actes de naissance à ceux qui viennent déclarer les naissances. Nous célébrons également des mariages au niveau de l’ambassade. Il y a d’autres documents administratifs tels que les certificats de résidence, des légalisations de documents.

Sinon d’un point de vue de la vie courante lorsqu’il y a une situation qui nécessite la présence de l’ambassade aux côtés d’un compatriote, il est de notre devoir de réagir diligemment pour l’assister. Il y a des compatriotes indélicats, mais heureusement ils ne sont pas très nombreux à être incarcérés. Régulièrement nous leur rendons visite pour voir leurs conditions d’incarcération. Et lorsqu’ils sont libérés, nous prenons des dispositions pour qu’ils regagnent le pays. De nombreux cas sociaux, nous sont souvent soumis. Dans la mesure du possible, avec nos moyens très limités nous essayons de trouver une solution.

Le jeudi 23 novembre dernier une petite fille s’est retrouvée ici à l’ambassade. Elle aurait été amenée au Mali par sa marâtre. Arrivée à l’autogare, celle-ci lui aurait dit de l’attendre. Elle est rentrée en ville et n’est plus revenue. La petite désemparée a eu recours à une radio. Et c’est la radio qui l’a transportée à l’ambassade.

J’ai dû appeler un lycée privé à Wayalghin, à Ouagadougou pour vérifier si cette fille était effectivement inscrite à cet établissement. Oui, m’a confirmé mon interlocuteur au téléphone. La marâtre avait récupéré les papiers de la fille qui n’avait plus que la langue mooré pour me dire que c’est une Burkinabè. J’ai dû payer son transport et lui donner de quoi survivre et la confier au chauffeur pour qu’elle puisse regagner Ouagadougou.

Il y a d’autres cas où des Burkinabè de passage, perdent la vie. L’ambassade s’en charge de concert avec la communauté burkinabè. Mais ces cas ne sauront assombrir la vie. Nous nous battons bien et l’ambiance est bonne dans l’équipe. Je suis certain que mes collègues ambassadeurs burkinabè en Côte d’Ivoire, au Ghana rencontrent les mêmes difficultés. Je profite demander à mes autorités de tutelle de voir la problématique des cas sociaux burkinabè au niveau de toutes les juridictions et des pays voisins surtout.

S : Comment se portent les relations entre les pays sous votre juridiction et le Burkina Faso ?

SMT : Franchement, il s’agit d’excellentes relations entre le Burkina Faso et le Mali. Je le dis sans sourciller. Nous travaillons à consolider ces relations. Pour revenir au cas du Burkina et du Mali, en 2004 nous avons eu la commission mixte qui a passé en revue beaucoup de dossiers. La coopération entre nos deux pays couvrent pratiquement tous les domaines de la vie. Et quotidiennement nous enregistrons de part et d’autre la présence de nos compatriotes en mission ou en voyage d’affaire. Cela est très important entre deux pays.

Les relations vont se consolider davantage avec le Niger où j’ai présenté mes lettres de créance. Et le Niger vient d’envoyer au Burkina Faso un consul général. C’est déjà un grand pas. Nous œuvrons aujourd’hui à ressusciter, à revoir, parce que cela fait un bout de temps que la commission mixte s’est tenue. Il faut travailler à mettre sur pied encore cette commission et à voir les dossiers importants entre nos deux pays.

Pour la Guinée, je n’ai pas encore présenté mes lettres de créances, mais j’ai l’agrément, c’est-à-dire que la Guinée a déjà donné son accord. Il me faut poser cet acte avant de pouvoir aller sur le terrain et voir dans quelles mesures nous pouvons reprendre certaines choses en matière de coopération, de commission mixte. Sinon dans l’ensemble les relations sont bonnes avec la Guinée, il n’y a pas de nuage.

S : Comment nos compatriotes ont vécu l’élection présidentielle du 13 novembre dernier ?

SMT : Une question difficile. Si je vous réponds à la place de nos compatriotes ici, est-ce que je vais coller à la réalité. Puisque pendant le scrutin j’étais au Burkina. Je suis revenu le 13 novembre dernier. Mais les échos qui me sont parvenus, c’est qu’à travers la radio et la télévision nationale (via Africable), les gens ont suivi la campagne. Et les résultats ont été très bien accueillis.

C’est l’occasion pour moi de féliciter l’ensemble des acteurs. A commencer par les responsables politiques qui ont été fair-play dans l’ensemble. C’est à l’honneur de tous les acteurs du jeu politique au niveau du pays. Les acteurs institutionnels sont également à féliciter notamment la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le Conseil supérieur de la communication (CSC), le Conseil constitutionnel, la presse qui a joué un rôle important.

J’ai lu les taux de couverture et tous les candidats qui ont souhaité la couverture médiatique de leurs activités ont eu dans une certaine mesure, satisfaction. J’ai suivi la complainte du directeur de la télévision. C’est une autre paire de manche où je ne veux pas trop m’engager. Mais si on peut leur remettre les douze véhicules qu’on le fasse. Qu’on permette à la presse d’avoir les moyens de poursuivre son travail.

S : D’aucuns demandent pour les échéances futures un plafonnement des budgets de campagne. Quelle est votre position sur la question ?

SMT : Même dans les pays où c’est plafonné, comment s’effectue le contrôle. Avons-nous aujourd’hui tous les moyens de contrôler ? Il faut y réfléchir, peut-être qu’on y parviendra un jour. Il faut plutôt prendre des dispositions soi-même, se donner une certaine ligne de conduite et avoir quelque chose à proposer à l’électorat. C’est le plus important. Le plafonnement à mon avis ne saurait être une panacée.

S : Le 11 décembre prochain, c’est la commémoration de la fête nationale du Burkina. Comment cela sera vécu au niveau de l’ambassade ?

SMT : On souhaite commémorer ici à l’ambassade en deux étapes. Avec la communauté, comme elle est très importante, dans la matinée, en mettant l’accent sur les enfants. Tous les Burkinabè résidant à Bamako ou dans les régions pourront se déplacer. Nous allons rester ensemble autour d’un repas familial de 8h à 14h à l’ambassade. L’après-midi, nous allons offrir une réception aux autorités du pays hôte et aux autres diplomates accrédités auprès du Mali.

Propos recueillis à Bamako par Koumia Alassane KARAMA

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 8 décembre 2005 à 19:07, par Salif. O En réponse à : > SEM Sanné Mohamed Topan : “Nous avons une communauté forte et diverse au Mali”

    Si j’ai bien compris il y’a bien un village qui s’appelle OUAHIGOUYA et un autre qui s’appelle
    GOURCY au Mali. Si quelqu’un pouvait nous apporter des précisions sur la localisation de ces villages nous le remercions d’avance

  • Le 8 janvier 2006 à 14:12, par M. TOPAN En réponse à : > SEM Sanné Mohamed Topan : “Nous avons une communauté forte et diverse au Mali”

    Oui, il s’agit bien de "OUAHIGOUYA et de GOURCI tout comme TOUGAN-COURA(nouveau TOUGAN),Bassan et non BANSAcomme écrit.Je pense que ces noms de villages ont été donnés en souvenir des villages d’origine des premiers habitants installés et venus de la colonie de la Haute-Volta d’alors.Bien d’autres villages portant des noms comme LAGO,OULLA GOURAN...existent dans la zone de l’office du Niger en quatrieme Région(SEGOU-MALI).J’espère avoir répondu àvotre question ; Bonne et Heureuse année à vous.S

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