LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Avec de la persévérance et de l’endurance, nous pouvons obtenir tout ce que nous voulons.” Mike Tyson

Soutenance de thèse : Aminata Ouédraogo devient docteur en sciences de l’information et de la communication de l’université de Bordeaux Montaigne

Publié le lundi 6 décembre 2021 à 22h45min

PARTAGER :                          
Soutenance de thèse : Aminata Ouédraogo devient docteur en sciences de l’information et de la communication de l’université de Bordeaux Montaigne

« Le processus de construction des opinions dans l’espace public numérique burkinabè : l’agora Facebook », tel est le titre de la thèse que Aminata Ouédraogo a soutenue ce 3 décembre 2021 à l’Université Bordeaux Montaigne en France. Elle en a été jugée digne du titre de docteur en sciences de l’information et de la communication de l’Université Bordeaux Montaigne par le jury présidée par le Pr Alain Kiyindou.

Facebook est une agora, un espace public numérique, où se jouent de nouveaux types d’engagements citoyens ; le titre même de la thèse pointe l’hypothèse première de la recherche qui explore les conditions de formation de l’opinion dans l’espace public numérique burkinabè. Elle analyse le recours des internautes à des pratiques de discussions en ligne, de publicisation, d’engagement dans le cadre des mobilisations actuelles. Toute cette réflexion puise dans une observation empirique en profondeur de deux communautés de discussions sur Facebook (« Tirs croisés » et « Burkina Faso (Victoire des forces de défense et de sécurité) ») ayant conduit à l’examen de 1021 publications, de 11 entretiens individuels menés entre août 2020 et mars 2021 auprès d’internautes essentiellement et de 264 réponses à un questionnaire en ligne.

La thèse d’Aminata Ouédraogo, sous la direction du Dr (HDR) Étienne Damome (U Bordeaux) et la co-direction du Dr Cyriaque Paré (CNRST Burkina) se situe dans le sillage des transformations de l’espace public et questionne l’influence des TIC sur les pratiques de prise de parole dans l’espace public qui débouche sur la construction de l’opinion publique. En quoi les formes actuelles de discussions dans les communautés en ligne burkinabè révèlent une formulation d’une opinion publique démocratique ? Qui s’engage en ligne et quelles sont les représentations qui sous-tendent les motivations des individus ? Voilà autant de questions qui sont abordées. Soulignant le caractère facultatif de la discussion, la recherche va examiner plus en profondeur la façon dont les internautes se représentent, expérimentent et interprètent leur apparition, co-présence, présence et participation à la construction de l’opinion dans l’espace public numérique.

L’impétrante face à un jury en présentiel et en distanciel

Les résultats auxquels la thèse d’Aminata Ouédraogo parvient suggèrent l’existence d’une culture renouvelée de la délibération prenant essentiellement appui sur des internautes fondé à apparaitre à leurs semblables et à établir avec eux une relation dans laquelle ils se révèlent comme des entités sans se fondre dans l’anonymat du collectif.

À la croisée d’une multitude de modes de participation et des modes d’interaction qui marquent l’univers social numérique avec des incidences politiques certaines, la recherche propose une nouvelle hypothèse théorique et une métaphore conceptuelle, l’« individu auctorial », pour penser la façon dont les pratiques d’apparition, de présence à soi et aux autres, de publicisation des problèmes sociaux, de relais, expérimentés par les internautes s’arriment en réseau à celles des autres pour produire des « transgressifs constructifs » : des changements importants dans les façons de concevoir, d’exécuter les projets et programmes politiques. Loin d’une prise de distance vis-à-vis de la politique, les récits recueillis en entretiens et ceux mis en sens à partir des réponses aux questions et de l’observation empirique suggèrent un réengagement dans la politique dont l’enjeu vise à établir un nouvel pacte social, à définir ensemble de nouveaux horizons.

Le jury de six membres, présidé par le Pr Alain Kiyindou de l’université de Bordeaux et qui a siégé en présentiel et en distanciel entre Bordeaux, Lille, Montpellier, Nancy, a grandement apprécié la densité du travail de l’impétrante. Il a souligné la finesse de ses analyses sur un sujet complexe et sa grande capacité de travail qui lui a permis de boucler ses recherches doctorales en trois ans chrono, parallèlement à ses tâches d’enseignante-chercheure. Il l’a jugée digne du titre de docteur en sciences de l’information et de la communication de l’Université Bordeaux Montaigne.

Le jury a particulièrement salué un document dense, synthétique sans redondance, ou « remplissage » inutiles ; avec un propos clair, quelques fois touffu mais avec un rendu soigné dans l’ensemble. Le jury a également salué une analyse convaincante qui s’appuie sur le « cadre de participation » de Goffman et sur le travail plus récent de Coutant et Stenger sur les identités et les interactions sur les réseaux socionumériques. L’éclairage que l’auteure apporte sur les codes conversationnels et les modes d’interaction propres à chacun des groupes analysés est jugé fin et instructif.

La nouvelle docteure avec ses directeurs de thèse, Dr Etienne Damome et Dr Cyriaque Paré

Le jury a apprécié un travail approfondi, inscrit clairement dans le champ des sciences de l’Information et de la Communication en lien avec la sociologie des mouvements sociaux et les sciences du langage, sans oublier les théories classiques de l’espace public et de l’influence. IL a aussi apprécié la réflexion méthodologique sur la « netnographie », que d’autres auteurs appellent ethnographie numérique.

Comme perspectives, le jury a enfin invité l’auteure à approfondir des trajectoires d’analyses qui concernent notamment certains éléments issus des résultats comme la continuité entre engagement virtuel et réel. Cette continuité pourrait sans doute être interprétée à la lumière du contexte politique et social actuel du Burkina Faso.
Enseignante-chercheure à l’Institut Supérieur de la Communication et du Multimédia (ISCOM), Aminata Ouédraogo avait soutenu en juillet 2018 son mémoire de Master sur la pratique de l’écriture Web dans les médias en ligne burkinabè

C. Paré
Lefaso.net

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Massaka SAS se lance à la conquête du monde