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Coronavirus : N’oublions pas notre paludisme, ce grand tueur local !

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Publié le lundi 16 mars 2020 à 22h25min

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Coronavirus : N’oublions pas notre paludisme, ce grand tueur local !

Levée de boucliers mondiale contre le coronavirus, ce petit virus qui met au pilori les grandes puissances. Plus de 6 400 morts dans le monde à la date du 15 mars 2020. Trop de morts ? Absolument. Mais il y a bien pire chaque année au Burkina Faso, un seul pays. 11 970 321 de cas de paludisme dans le pays en 2018. 4 292 décès dans la même année. Le chiffre était plus catastrophique en 2010 (9 000 décès). Des morts silencieux chaque année.

Le paludisme tue chaque année des milliers de Burkinabè. Mourir de palu est devenu pratiquement banal. Surtout en période d’hivernage. Le décompte macabre qui s’en suit indigne pendant quelques jours, avant la prochaine saison des morts en masse. En 2017, c’était 11 915 816 de cas de paludisme enregistrés avec 4 144 décès.

L’année qui a suivi n’était guère meilleure. 11 970 321 de cas de paludisme avec, au compteur, 4 292 décès. En 2010, les chiffres étaient plus effroyables : 9 000 décès étaient répertoriés dans les formations sanitaires. Une réalité certainement bien pire, quand on connaît le taux de fréquentation des centres sanitaires dans le pays. Beaucoup, dans des hameaux de culture, meurent dans leurs cases, et ne sont donc pas comptabilisés.

Malgré les distributions massives de moustiquaires, la lutte contre l’anophèle n’est toujours pas gagnée. Les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes payent le plus lourd tribut.

Le « coronamédiatique » ou la force des grandes puissances

Il ne s’agit pas là de minimiser l’effet du coronavirus. La maladie fait des ravages, c’est sûr. Mais cet engouement mondial tient surtout au fait que le virus a poussé ses premiers vagissements dans les pays développés. « Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera », titrait Alain Peyrefitte dans son essai paru en 1973. L’exemple est là. Le pays s’est réveillé depuis plusieurs années sur les plans technologique, économique…pour ne citer que cela. Elle fait trembler l’Europe, les Etats-Unis qui auront tout fait pour freiner l’élan chinois. Mais hélas. Il est donc normal qu’un virus qui y est découvert irradie la planète.

Ce sont les grandes puissances qui disposent également des médias les plus puissants qui inondent même les villages les plus reculés de nos contrées. Leurs problèmes deviennent par ricochet des préoccupations mondiales. Quoi de plus normal que les confinements et les annulations de grands rendez-vous sportifs et économiques dans ces pays soient vécus presque en live par le paysan de Kikideni dans la région de l’Est ! A la radio, à la télé, sur internet ou dans les journaux, il n’y a plus que le coronavirus.

Pourtant, lors d’un point presse le 3 mars dernier, Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), révélait que le CoVid-19 présentait un taux de mortalité de 3,4% dans la population générale. Pour les Chinois, le taux de létalité de la maladie est bien moindre. Environ 1%, penchent les services de santé chinois.

Alors, si le coronavirus tuait comme le paludisme, l’on aurait assisté à une hécatombe mondiale. Et si le paludisme bénéficiait d’autant d’attention que le coronavirus, le Burkina Faso ne compterait pas autant de milliers de morts chaque année. Rendez-vous compte qu’avant même l’apparition de la maladie au Burkina, le gouvernement avait déjà son plan de riposte bien ficelé. Avec, s’il vous plaît, 12 milliards de F CFA.

A l’heure de la mondialisation des malheurs, le Burkina Faso enregistre déjà une dizaine de cas de cette maladie importée. Il faut donc respecter scrupuleusement les consignes de santé pour se protéger et protéger les autres. En revanche, il ne faut pas oublier nos pandémies locales. Nos maladies de pauvres qui nous déciment par milliers, loin des plages d’information des grands médias chinois, américains, italiens ou français.

Tiga Cheick Sawadogo
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