Journée africaine de lutte contre la corruption : « Les fonds Covid-19 n’ont pas été gérés de façon transparente selon les normes internationales », Philippe Nion, contrôleur général de l’ASCE-LC
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L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) en partenariat avec le REN-LAC et le PNUD commémore ce lundi 11 juillet 2022 à Ouagadougou, la 6e édition de la Journée africaine de lutte contre la corruption au Burkina Faso. Le thème retenu pour cette journée est « Stratégies et mécanismes de transparence dans la gestion des fonds Covid-19 ».
Malgré les nombreux engagements pris et les outils mis en place par les pays africains, la corruption ne semble pas reculer dans plusieurs pays de cette partie du monde. Selon Transparency International, en 2021 avec un score de 33 sur 100, l’Afrique subsaharienne ne montre aucune amélioration significative de l’indice de perception de la corruption. Les progrès réalisés par certains pays étant éclipsés par d’autres qui stagnent ou reculent dans la lutte contre ce phénomène. La corruption continue donc de compromettre les efforts de développement des pays du continent.
Le représentant-résident du PNUD au Burkina Faso, Mathieu Ciowela, rappelle que les conséquences de la corruption sont indéniables sur les pays, notamment dans les domaines socio-économiques. Elle prive des millions d’enfants d’une éducation de qualité, des millions de personnes de leur droit à la santé par l’affaiblissement des capacités institutionnelles. Citant l’estimation de la Commission économique des nations unies pour l’Afrique en 2021, il souligne que l’Afrique perd chaque année plus de 50 milliards de dollars en raison des flux financiers illicites. Il est donc urgent de lutter contre la corruption sous toutes ses formes : détournement de biens publics, enrichissement illicite, blanchiment de capitaux, etc.
D’où l’intérêt de cette Journée africaine de lutte contre la corruption, qui se veut l’occasion en plus de réfléchir aux progrès de la lutte contre la corruption, de proposer des pistes de solutions pour un meilleur impact des actions entreprises pour lutter contre le phénomène.
Ainsi pour cette 6e édition, c’est la gestion des fonds covid-19 qui s’invite au cœur de la réflexion dans les pays africains. Selon Philippe Néri Kouthon Nion contrôleur général de l’ASCE-LC, pendant la pandémie de Covid-19, les Etats ont mobilisé beaucoup d’argent pour assurer la prise en charge de la pandémie. Mais le dispositif de transparence qui doit assurer une saine gestion de ces fonds n’a pas été mis en place ou n’a pas correctement fonctionné. Il a donc été décidé qu’à l’occasion de la Journée africaine de lutte contre la corruption, la réflexion soit menée dans chaque pays autour de la question de la transparence dans la gestion des fonds Covid-19, mais aussi de faire ressortir les faiblesses liées à la mise en œuvre de ce dispositif de transparence.
« Les fonds Covid-19 n’ont pas été gérés dans la transparence », Philippe Nion
Le contrôleur général de l’ASCE-LC explique que la transparence, c’est la mise à disposition des éléments d’information de gestion à l’intention du public. Sur ce point, il indique qu’il n’a pas connaissance d’un rapport officiel de la gestion des fonds covid-19 au Burkina Faso. « Nous n’avons pas vu de rapport officiel sur les montants, les sommes qui ont été mobilisées, nous n’avons pas vu également une restitution officielle. Nous n’avons pas vu d’état de rapport financier publié à l’occasion de ces fonds covid. Quand nous parlons de transparence, nous parlons de publication de données à l’intention du public, lorsque nous parlons de transparence, nous parlons de la responsabilisation des acteurs chargés de la gestion des fonds covid. Lorsque nous parlons de transparence, nous parlons aussi d’imputabilité et je crois que chacun a pu mesurer les différents griefs portés à la gestion des fonds publics. Mais si je dois donner une opinion sur la gestion des fonds covid, je dirai que cela n’a pas été fait dans la transparence telle que requise par les normes au niveau international, mais aussi par notre loi relative au code de transparence sur la gestion des finances publiques », a-t-il laissé entendre.
Pour cette 6e édition de la Journée africaine de lutte contre la corruption, outre la communication inaugurale, d’autres communications sur plusieurs thématiques seront servies aux participants à la cérémonie de célébration de la Journée. Les thèmes abordés sont relatifs aux outils de prévention de la corruption prévues par la loi anti-corruption, les mécanismes de transparence dans la gestion des finances publiques et les éléments d’expérience respectifs de la Cour des comptes et de l’ASCE-LC en matière d’audit des fonds covid-19.
Justine Bonkoungou
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