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Immigration clandestine : plus de 80 Burkinabè sauvés d’un naufrage au Cameroun

Publié le lundi 12 septembre 2005 à 08h04min

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Ils étaient partis pour se rendre au Gabon où selon eux la fortune les y attend ; mais leur rêve deviendra très vite un cauchemar. Après plusieurs semaines de souffrances au Nigeria leur lieu de transit, l’embarcation de fortune qui devait les conduire à la terre promise échoua le 12 juillet dernier dans les eaux de l’Océan Pacifique au Sud du Cameroun dans le département de l’Océan à Kribi.

L’embarcation de fortune (une grosse pirogue de fabrication artisanale) partie du Nigeria pour se rendre au Gabon transportait cent soixante et un (161) immigrants clandestins dont quatre vingt sept (87) Burkinabè.

Selon le témoignage des passagers, l’embarcation présentait déjà des défaillances au départ puisqu’après une première tentative de départ qui a duré quelques heures sur la mer, elle est revenue à son point de départ pour subir des réparations pendant une semaine. Ensuite vint le deuxième faux départ. Ce n’est que la troisième tentative qui sembla réussir jusqu’au moment où après deux jours d’errements en haute mer, la pirogue présenta à nouveau des défaillances.

Les passagers qui avaient flairé le danger, firent pression sur le conducteur qui malgré sa crainte des garde-côtes se rapprocha des berges. Cette pression leur sera salutaire car l’embarcation qui prenait de plus en plus de l’eau, céda sous la pression des vagues au bord des côtes camerounaises. Les cent soixante et une personnes eurent la vie sauve grâce à la compétence et à la rapidité des marins et des pêcheurs camerounais.

C’est dans un village du nom de Lokoundje, dans la préfecture de Kribi (département de l’Océan) situé à 300 km de Yaoundé (la capitale) que les naufragés ont été accueillis le 12 juillet. Dans ce village où on n’y accède que par voie maritime, les clandestins composés essentiellement de ressortissants ouest-africains dont des Burkinabé (87), des Nigériens, des Ghanéens, des Maliens, un Guinéen, des Béninois, des Nigérians commencent une nouvelle vie. Pendant un mois, ils attendront une solution à leur problème du moins pour ceux qui en avaient espoir, c’est-à-dire les Burkinabè dont le gouvernement décida d’envoyer une mission d’urgence sur les lieux du drame. Cette mission arriva sur les lieux le 19 août en compagnie des plus hautes autorités du département de l’Océan.

Une mission éprouvante

Arrivée le 18 août à Douala, la délégation burkinabè composée de sept personnes se rendit le 19 août à Kribi (environ 200 km de Douala).

Là, le préfet du département de l’Océan, Monsieur Grégoire Mvongo en compagnie de ses plus proches collaborateurs présenta la situation à la délégation, puis les deux parties convinrent de se rendre le lendemain au village qui a hébergé les sinistrés.

Le 20 août donc, le préfet de Kribi, ses collaborateurs, le consul honoraire du Burkina Faso au Cameroun, les membres de la délégation burkinabè, embarquèrent pour certains dans une pirogue, pour d’autres dans une petite barque pour se rendre à Lokoundje, site d’hébergement des naufragés. Le voyage dura au moins deux heures de temps. Sur les lieux, le préfet et sa suite trouvèrent des gens en pleine activité. En effet, les conducteurs de la pirogue s’activaient à la réparation de leur embarcation pour, selon leurs dires, « continuer la route ». Des 161 naufragés, plusieurs s’étaient déjà évanouis dans les forêts camerounaises. Ceux qui étaient là, attendaient la fin des travaux de réparation de leur pirogue pour partir ; parmi eux figuraient 19 Burkinabè.

Deux Burkinabè en quittant le site pour se rendre en ville ont malheureusement été emportés par les vagues. La visite du site tombait vraisemblablement à point car les travaux de réparation de la pirogue étaient presqu’achevés. Ayant réalisé l’ampleur du problème, la mission procéda à une sensibilisation et à un appel à la raison. Un appel qui porta ses fruits parce que soutenu par la décision du préfet de détruire l’embarcation et de raccompagner les uns et les autres à leurs pays d’origine.

Cette décision soulagea la mission, qui le sera davantage lorsque le préfet ordonna que les deux moteurs de la pirogue soient embarqués dans la barque où il a pris place pour le retour à Kribi. La mission également embarqua pour Kribi en promettant aux naufragés burkinabè de revenir les chercher dans un très bref délai.

Elle trouva à son arrivée environ une trentaine de Burkinabè qui avaient fuit le site de Lokoundje pour se retrouver en ces lieux dans les mosquées où ils y dormaient et demandaient leur pitance.

Ils furent immédiatement enregistrés et pris en charge dans un établissement scolaire que les autorités départementales ont bien voulu mettre à leur disposition. Les autres naufragés, Burkinabè et autres furent également conduits du site de Lokoundje vers l’école où fut organisé leur rapatriement. Au total, soixante cinq (65) Burkinabè parmi les sinistrés ont été retrouvés et convoyés au pays. Soixante cinq Burkinabè réunis ici et là après plusieurs expéditions en ville (dans les mosquées et les bistrots) et dans les forêts camerounaises parce qu’au départ, certains semblaient hostiles au retour au bercail et d’autres ont même pris la clé des champs à la dernière minute. En effet, quarante (45) ont été convoyés le 6 septembre et 20 autres, le 10 septembre dernier. Le Burkina Faso, attaché à la solidarité et à la fraternité africaines a aussi convoyé les ressortissants maliens, nigériens et ghanéens à Cotonou où ils ont été confiés aux autorités compétentes de leurs pays respectifs. Les autres, notamment les Béninois ont préféré partir avec les Nigérians.

Des conditions inhumanitaires

L’immigration clandestine en Afrique de l’Ouest et particulièrement au Burkina Faso prend des proportions inquiétantes. Au vu de ce qui se passe actuellement, nous assistons à une « hémorragie » de la jeunesse burkinabè qui, pour la recherche d’un mieux-être, est de plus en plus arnaquée par des vendeurs d’illusions qui lui proposent un hypothétique paradis en contrepartie de ses ressources.

En effet, le témoignage de tous les clandestins fait cas de l’existence de réseaux qui prennent racine même dans le pays et s’étendent dans des pays comme le Nigeria. Les candidats sont convoyés par petits groupes hors du pays et gardés dans des endroits où ils sont dépouillés du reste de leur argent avant d’être « balancés dans des cercueils flottants » au Nigeria.

Le 30 juin dernier, une embarcation du genre a fait naufrage toujours aux larges des côtes camerounaises dans la ville de Campo dans le département de l’Océan. Les passagers de cette embarcation n’ont pas eu la même chance que ceux de Kribi car sur la centaine de personnes qu’elle transportait, moins d’une trentaine a pu être sauvée du naufrage. Et c’est moins de deux semaines après ce drame que s’est produit celui de Kribi. A Yaoundé, la capitale où la délégation a fait un tour pour rencontrer les Burkinabè résidant au Cameroun, plusieurs chômeurs figuraient parmi les présents à cette rencontre initiée par Madame Oumou Owona, consul honoraire du Burkina Faso au Cameroun. En effet, hormis les étudiants, moins de cinq (05) personnes sur les quarante trois (43) inscrits ce jour, avaient un emploi honorable.

En effet la majorité lorsqu’elle n’est pas au chômage, exerce des emplois tels le cirage, la vente de gâteaux, d’eau, de bouillie... Et selon les témoignages, chaque jour que Dieu fait, plusieurs jeunes ressortissants ouest-africains dont des Burkinabé viennent agrandir le lot de ces miséreux.

peuvent. La délégation qui a fait une halte à Cotonou a trouvé un consul honoraire débordé par un flux abondant de jeunes candidats à l’immigration. Leur objectif : retourner « à la maison ». Trompés pour la plupart par des démarcheurs qui se sont proposés de leur trouver des visas, ces jeunes dont le rêve était de se rendre en Guinée Equatoriale pour se faire de l’argent, se retrouvent dans les rues, affamés, démunis, loin de leurs familles.

Monsieur Mahamadou Lamine Ouédraogo, consul honoraire du Burkina Faso au Bénin qui venait d’organiser le retour au pays de 17 candidats à l’immigration avait encore plus d’une vingtaine de cas à gérer.

Le 10 septembre, il a convoyé vingtaine et une personnes venues du Cameroun par les soins de son homologue dans ce pays, Madame Oumou Owona.

Yolande Kalwoulé
(DCPM / MAE-CR)

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