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Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

Publié le jeudi 29 mars 2018 à 19h08min

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Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

Dans cette lettre ouverte adressée à Madame le Premier président de la Cour de cassation, Me Paulin Salembéré, un des avocats des accusés (Badiel Eloi, Nébié Moussa et Deka Mamadi), conteste le rejet de leur demande de récusation du Président Seidou Ouédraogo et du Conseiller Emmanuel Konéné de la Chambre de jugement du Tribunal militaire.

Madame le Premier Président,

Suivant requête datée du 26 mars 2018, conformément aux dispositions de l’article 653 du code de procédure civile, notre cabinet a saisi la Chambre criminelle de la Cour de cassation, en récusation du Président et du Conseiller composant la Chambre de jugement du Tribunal militaire siègeant dans le cadre de l’affaire référencée en marge.

A l’ouverture de l’audience de la Chambre de jugement du Tribunal militaire du 27 mars 2018, le Président de ladite Chambre a dit poursuivre son audience parce que n’ayant toujours pas reçu de la Cour de cassation, comme il est dit à l’article 655 du code de procédure pénale, notification d’une requête en récusation déposée auprès de ladite juridiction.

Par correspondance datée du 27 mars 2018 adressée au Président de la Chambre criminelle de la Cour de cassation avec ampliation au Premier Président de ladite Cour que vous êtes, nous demandions que les diligences soient prises pour la mise en oeuvre des dispositions de l’article 655 ci-dessus cité.

De même, par correspondance datée du 28 mars 2018 adressée au Secrétaire Général de la Cour de cassation, nous lui réitérions la demande de mise en oeuvre effective des dispositions de l’article 655 du code de procédure pénale.

Quelle ne fut notre stupéfaction de recevoir dans la soirée du 28 mars 2018, notification d’une ordonnance portant incompétence de la Cour de cassation rendue par vos soins, motif pris de ce que “la récusation prévue à l’article 653 du code de procédure pénale ne concerne que le Président de la Cour d’Appel, alors que la juridiction du Tribunal militaire siégeant actuellement qui est présidée par Monsieur OUEDRAOGO Seidou dont la récusation est demandée n’est pas une chambre d’appel, mais une chambre de 1ère instance.“

Sans vouloir nous appesantir sur cette décision que vous avez rendue qui pourra peut-être un jour être soumise comme étude de cas aux étudiants en Droit, nous voudrions par la présente vous interpeler, vous et votre conscience, sur la procédure de récusation dont s’agit.

Afin que nous soyons au même niveau de connaissance des textes applicables, permettez-nous de faire leur rappel.

Article 653 du code de procédure pénale :
« Dans les cas prévus par la loi, les demandes en récusation visant le président de la Cour d’appel, soit plusieurs ou l’ensemble des conseillers ou juges composant une juridiction collégiale sont soumises à la chambre criminelle de la Cour de cassation. »

Sauf erreur de notre part, il ressort indubitablement que lorsque la récusation concerne soit le Président de la Cour d’appel, soit plusieurs conseillers, soit plusieurs juges d’une juridiction collégiale, la requête doit être soumise à la Chambre criminelle de la Cour de cassation.

Dans le cas présent, si vous aviez pris la peine de prendre connaissance de notre requête, vous auriez constaté que la requête soumise à la Chambre criminelle concerne les récusations de Messieurs OUEDRAOGO Seidou et KONENE Emmanuel, respectivement Président et Conseiller de la Chambre de jugement du Tribunal militaire.

Siégeant dans une chambre de 1ère instance comme vous le dite si bien dans votre ordonnance, ces magistrats sont appelés juges, même si par ailleurs ils sont conseillers à la Cour d’appel de Ouagadougou.

Il nous semble alors que les conditions de saisine de la Chambre criminelle telles que prévues à l’article 653 du code de procédure pénale sont réunies, la récusation concernant deux juges composant une juridiction collégiale, ce pourquoi notre requête est adressée à la Chambre criminelle de la Cour de cassation conformément à la loi.

Bref, qu’en est-il de la procédure légale à suivre.

Article 655 du code de procédure pénale :
« La requête est notifiée par les soins du secrétaire général au président de la juridiction à laquelle appartiennent le ou les magistrats récusés. Il sera sursis à la continuation de l’information et aux débats jusqu’à l’arrêt statuant sur la récusation. »
Article 656 du code de procédure pénale :
« Le demandeur dans les quinze jours du dépôt de sa requête et le ou les magistrats dont la récusation est provoquée dans les quinze jours de la notification prévue à l’article précédent, doivent déposer un mémoire au secrétariat général de la Cour de cassation. »

Nous notons, Madame le Premier Président, plutôt que de faire diligence pour une bonne et saine application de la procédure de mise en état du dossier telle qu’édictée par les dispositions légales ci-dessus citées, vous avez opté de la méconnaître.

Non seulement, vous n’avez pas permis au Secrétaire général de la Cour de cassation de transmettre notre requête à la Chambre de jugement du Tribunal militaire comme il est dit à l’article 655 ci-dessus cité, mais de surcroît, vous avez violé les droits des requérants en rendant une décision précipitée et hasardeuse avant même l’expiration du délai de quinzaine que leur offrent les dispositions de l’article 656 du code de procédure pénale pour déposer leur mémoire à l’appui de leur requête.

Pourquoi une telle méprise ?

Article 657 du code de procédure pénale :
« Le procureur général prend ses réquisitions et la chambre criminelle de la Cour de cassation statue sans délai, sans autre forme de procédure.
A la lecture de votre ordonnance, nous notons que vous dite l’avoir rendue, le Procureur général entendu en ses observations orales.

Madame le Premier Président, vous comme moi savons que nous sommes dans une procédure écrite et que les réquisitions du Procureur général doivent être écrites.

Autrement dit, lorsque vous dites que vous avez rendue votre ordonnance, le Procureur général entendu dans ses observations orales, cela induit que vous avez tenu une audience à laquelle ni les juges dont récusation est provoquée ni les requérants n’y ont été conviés, violant ainsi le principe sacrosaint du contradictoire.

Faut-il vous le rappeler, le Procureur général est une partie au procès.

Autre fait aussi gravissime que les précédents, vous vous êtes subrogée à la Chambre criminelle pour rendre votre décision.

En rappel, notre requête en récusation est adressée à la Chambre criminelle de la Cour de cassation, et non à la juridiction du Premier Président de ladite Cour.

Aux termes des dispositions légales et vous le savez, la Chambre criminelle siège en collégialité (3 conseillers au moins). Pas même en votre qualité de Premier Président présidant la Chambre criminelle, vous ne pouvez vous substituer à cette Chambre et prendre une décision alors que vous n’êtes même pas saisi et que la matière échappe à votre pouvoir discrétionnaire de Président.

Mais hélas, vous avez outrepassé vos pouvoirs, et vous voulez empêcher la Chambre criminelle de connaître de sa saisine. Pourquoi ?

Comment pouvez-vous statuer dans une affaire qui ne vous est pas soumise en votre qualité de Premier Président ou de Président de Chambre ?

Madame le Premier Président,

Avec tout le respect que nous vous devons, nous sommes obligés de vous dire que le minimum auquel nous pouvions nous attendre du premier responsable de la plus Haute juridiction de notre pays, c’est le respect de la procédure.

Dans un passé récent, vous avez relevé de ses fonctions et remplacé le Président de la Chambre criminelle pour avoir entre autres, rendu seul en audience publique, hors la présence des deux autres conseillers composant la Chambre criminelle, un arrêt dans le cadre de la même affaire.

Ces faits lui ont valu d’être traduit devant le conseil de discipline du Conseil Supérieur de la Magistrature.

Nous espérons que vous vous appliquerez votre jurisprudence.

Pour notre part, l’ordonnance que vous avez rendue est inexistante et nous attendons que la juridiction saisie, notamment la Chambre criminelle de la Cour de cassation, qui n’est pas la juridiction du Premier Président, vide sa saisine conformément à la loi.

Madame le Premier Président,

Dans le cadre de la même affaire, vous avez déjà été interpelée par rapport à la gestion du dossier dit des “mandats d’arrêt“.

C’est vrai, sous nos cieux l’Honneur semble être la vertu la moins partagée. Toutefois, nous vous invitons en toute indépendance à faire honneur à votre serment, à votre corps et à votre devancier au poste de Premier Président.

Après le dossier dit du “Putsch de septembre 2015“, nos différentes juridictions connaîtront de multiples et diverses autres affaires.

La Maison Justice, est commune à tous, nous n’en sommes que des acteurs qui passent, ne l’oublions pas.

Puisse le Seigneur vous assister et vous éclairer de sagesse le reste de votre carrière.

Recevez, Madame le Premier Président, nos salutations respectueuses.

Pour la SCPA OUATTARA-SORY & SALAMBERE

Maître Paulin M. SALAMBERE
Avocat Associé

Ampliation : -Conseil Supérieur de la Magistrature
-Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Burkina

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Vos commentaires

  • Le 29 mars 2018 à 18:32, par lent En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Voyez vous en voulant vos précipiter pour faire condamner ces gens , madame la présidente risque de donner au putchistes une voie royale pour échapper a la justice tout simplement et c’est vraiment dommage

  • Le 29 mars 2018 à 22:21, par Issaka En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Je m y connais pas dans les choses du droit , mais ce que je vois depuis le début du procès est que on dirait que nos avocats ne moyen pas ceux des diendere. Ça me rappelle un match étalons contre black stars du Ghana. La veille le Ghana a annoncé que abêti Pelé et Anthony yeboa ne seront pas là et ces derniers sont apparus à 15 mon du début du match. Les étalons devaient immédiatement changer de stratégie mais c’était trop tard .
    Jai l impression que l autre camp a bien préparer son coup et le tribunal n est pas à la hauteur de gros dossiers de ce niveau d ou les nombreuses failles dans lesquelles les avocats de La Défense s engouffrent pour bloquer le procès sur les procédures. DE l autre côté les avocats du peuple ne rassurent pas sur leurs capacités techniques ce qui les poussent à simplement bâtir leur argumentaire sur une phraséologie du genre" le peuple a besoin de justice les victimes sont la ......."
    Bonne chance au peuple

  • Le 30 mars 2018 à 06:16, par war En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Les avocats de la défense ont raison d’exiger un bon arbitre impartial pour arbitrer ce grand match. La réponse est précipitée et pire c’est la chambre criminelle qui était qualifiée pour répondre peut-être via la présidence. Actuellement les gens sont dépassés par ce dossier mais les avocats de la défense sont plus perspicaces.la seule issue courageuse est la démission en bloc de toute la cour pour installer rapidement une cour neutre et compétente.les premières listes proposees par la cour criminelle et ignorée par le tribunal militaire doit être ré proposée pour conduire le jugement sinon tout verdict prononcé par cette cour contestee meme justifiee sera contestee éternellement. Nous voulons un jugement juste et un verdict vrai. Le peuple et la communauté internationale vous observe et je pense qu’après cette étape la défense va saisir la cour de la cedeao et l’UA(peut-être c’est déjà fait ) pour arbitrer ce contentieux et ce sera encore une fois la honte pour notre pays.Âpres ce jugement il va falloir réformer à fonds la justice militaire ou carrément la supprimer ou en faire une direction spécialisée au sein de notre justice normale et non une justice d’exception.

  • Le 30 mars 2018 à 07:38, par Abob En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Mon frère Issaka, internaute 2, je fais le même constat que toi. Selon moi, la justice militaire se montre frileuse sciemment par complicité avec les putschistes au détriment des intérêts du peuple ou par amateurisme et incompétence notoire. Si c’est le cas, ce tribunal politico-militaire (au lieu d’être un tribunal militaire stricto-sensu) peut être reconstitué ou pas ? Que prévoit la loi dans ce cas ? C’est ce que nous autres profanes du droit voulons savoir.

    Quant aux avocats des parties civiles, c’est la même chose.
    1 - Soit ils sont complices en silence de la cabale politico-militaire qui roule pour les putschistes et leurs alliés. Dans ce cas, ils se sont constitués avocats des parties civiles par pur mercantilisme. Ils feront le strict minimum et se feront payer royalement.
    - 2 - Soit ils sont véritablement incompétents et amateurs en la circonstance. Dans ce cas, il faut les changer et prendre d’autres. Point !

    Ce début de procès traine trop le pied et ce n’est pas normal. Nous devrions avoir honte devant la face du monde d’avoir d’aussi piètres juristes et d’aussi piètres militaires manipulables par de minables "putschistes". Je ne reconnais plus le Burkina et son peuple. La dégringolade de notre pays va trop loin avec tout ce beau monde tant au civil que dans l’armée qui n’ont de cesse de s’humilier et d’humilier le pays, comme amateurs dans la gestion de la chose publique ou comme collabos des forces obscures internes et extérieures. On ne comprend plus rien dans ce procès. Où va-t-on ?

  • Le 30 mars 2018 à 07:49, par Sapience En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Ce qui est intéressant dans l’exercice pour la manifestation de la vérité c’est la place et le sens que les juges ont dans notre architecture judiciaire. Comment les juges exercent leur indépendance tant souhait ? Comment ils exercent leur responsabilité et l’éthique dans la sphère de justice ? Etc,.

  • Le 30 mars 2018 à 08:54, par Victor En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    En tant qu’insurgé, je me demande comment on peut conduire un tel dossier avec autant de légèreté. je veux bien taper sur la défense des putschistes, mais les explications simples qu’elle nous déroule depuis le depuis du procès vont finir par convaincre, et avoir l’adhésion des plus sceptiques. Est-ce qu’il y a pas de compétence juridiques dans la justice pour opposer les même explications convaincantes en riposte. Faire le forcing c’est bien, se déclarer incompétent à chaque fois c’est bien, dire que la justice militaire est au-dessus de la constitution (pour laquelle on a fait l’insurrection) c’est bien, ... mais pardon, on va perdre en crédibilité à ce rythme, en faisant ainsi. il faut leur opposer des arguments acceptables et bien ficelés sinon même après on aura du mal a stabiliser le pays, et c’est ma seule préoccupation, ....

  • Le 30 mars 2018 à 09:42, par Lynn Hien En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Tout ce tralala de procedures judiciaires donne en tout cas une bonne image de notre justice, qui se munit de tous les gants possibles de normalités et de precisions pour être correcte. Pour le citoyen lamda que je suis, cette bande de tueurs qui ont cassé et fracasé des burkinabè innocents au vu et au su de tout le monde, avec même des aveux de leur chef, il est difficile de comprendre ce qui se passe en ce moment.

  • Le 30 mars 2018 à 11:05, par Gohooga En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Le code de procédure pénal régi t-il la procédure devant le tribunal militaire ? Que dit le code de justice militaire en matière récusation ?

  • Le 30 mars 2018 à 20:59, par warbita En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    La justice militaire est une simple direction du ministère de la défense ,elle relève du ministre de la défense et non de la magistrature normale. Voilà pourquoi il y a une confusion générale des rôles parce qu’il y a un grand vide juridique entre cette justice et le corps de la magistrature. La justice civile refusera sûrement d’endosser les erreurs de la justice militaire voilà pour quoi la présidente se déclare chaque fois incompétente et ne mouille pas suffisamment le maillot. Elle pourra même se démarquer des futures décisions de la cour de justice

  • Le 31 mars 2018 à 00:07, par Mogo En réponse à : Tribunal militaire : Me Paulin Salembéré conteste la décision de maintien du président Seidou OUEDRAOGO et du conseiller Emmanuel KONENE

    Décidément, cette justice militaire semble être un montage rapide avec trop de failles. Si cette justice est incapable et elle est en train de le montrer, qu’on transfere le dossier à la CPI et c’est vite réglé. Il y a trop de preuves contre beaucoup de ces individus (dossiers Thomas Sankara, Norbert Zongo, Juge Nebié, Oumarou Clément Ouedraogo, Dabo Boukary, Pr Sessouma, Liberia, Sierra Leone, Nord Mali, etc. etc. etc.)

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