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Burkina -France : les acteurs de la coopération décentralisée se concertent

Publié le lundi 27 octobre 2003 à 11h42min

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Le groupe Pays Burkina à Cités Unies France (CUF) qui fédère les collectivités territoriales françaises engagées au Burkina, s’est réuni les 17 et 18 octobre derniers pour ses journées annuelles de réflexion. Quelques participants évaluent ici le bilan de leur engagement dans notre pays et dressent les perspectives des actions de jumelage-coopération.

Michel Roux (Jumelage Chambéry - Ouahigouya, président du groupe Pays Burkina à Cités Unies France)

Le groupe Pays Burkina regroupe 80 à 90 collectivités et leurs associations supports. Nous venons de terminer ces deux journées de rencontres auxquelles ont participé une bonne quarantaine de collectivités. C’est l’occasion, une fois par an, de faire le point et de mieux harmonier nos interventions au niveau du Burkina Faso. Il s’agit de mieux harmoniser nos façons de fonctionner avec nos partenaires burkinabè. Il n’y a pas de ligne directrice valable pour tout le monde mais c’est une question de méthodologie, d’accompagnement, de cofinancement, de partenariat, de savoir comment travailler avec les uns et les autres de façon cohérente. Bien sûr la façon d’intervenir est différente selon les acteurs et la nature de leur partenariat.

Cette année, nous avons opté de faire la rencontre en deux temps : une journée consacrée à un thème particulier, qui a permis d’approfondir comment contractualiser, comment mettre en place des conventions financières, des circuits financiers, sur comment accompagner nos partenaires du Sud, les communes urbaines notamment sur les rentrées fiscales. La deuxième journée nous avons travaillé avec nos partenaires burkinabè, aussi bien les experts venus du Burkina qu’avec les techniciens de l’ambassade du Burkina ici en France, autour essentiellement de la mise en œuvre de la coopération décentralisée, l’évolution des textes (notamment les communes rurales). Nous avons terminé par un sujet particulier, nouveau dans le cadre de la coopération décentralisée, à savoir l’électrification des zones rurales.

La spécificité de la coopération décentralisée avec le Burkina, c’est la multitude des acteurs et des interventions, le renouvellement des animateurs et en conséquence la nécessité de plus de cohérence et de bilans périodiques pour voir ce qui marche ou ce qui ne marche pas.

Pierre MIichaillards (conseiller technique du MAT (BF) pour la coopération décentralisée)

Cette rencontre est utile car, comme on a pu le voir avec les exposés qui ont été faits, la situation de la coopération décentralisée au Burkina a comme caractéristiques d’avancer, de piétiner, et d’avancer encore et parfois de reculer. Il faut donc que les partenaires soient tenus au courant de la façon la plus précise possible parce que chacun d’entre eux, comité de jumelage ou collectivité territoriale du Nord, est à la recherche du partenaire institutionnel qui lui convient pour engager ensemble des projets de codéveloppement dans le cadre de la coopération décentralisée. Nous sommes donc contraints de faire une formation permanente sur le processus de décentralisation au Burkina.

J’ai déjà participé à plusieurs rencontres de ce genre et je pense que celle-ci s’est bien passée. Ce que l’on souhaite véritablement, surtout vu du côté du gouvernement burkinabè, c’est que les comités de jumelage du Nord, français ou autres, sortent de leurs habitudes qui étaient plutôt marquées par les débuts, c’est-à-dire par l’humanitaire, par le caritatif, pour aller vers un accompagnement du développement local et du processus de décentralisation. Et c’est à la faveur de ce genre de rencontres que l’on arrive à faire évoluer les mentalités.

Issa Sorgho (Directeur de la coopération décentralisée, secrétaire permanent de la CONACOD, MATD)

Ces journées sont des rencontres que Cités Unies France a l’habitude d’organiser autour du fonctionnement des associations. Ce sont des rencontres au cours desquelles nous échangions sur les pratiques en cours en matière de coopération décentralisée et où nous, partenaires du Burkina, saisissons l’occasion pour diffuser les informations récentes, notamment les évolutions du contexte institutionnel. Cela, pour faire en sorte que les acteurs prennent en compte ces évolutions au niveau du pays. Le but de la coopération étant d’accompagner la transformation administrative et politique, il est important chaque fois qu’il y a des modifications, de les porter à la connaissance des partenaires.

C’est l’occasion également de revoir ensemble les pratiques passées. Cette année particulièrement, suite aux rencontres nationales en décembre dernier à Ouaga, au cours desquelles on a pris des résolutions et des recommandations, il était important de faire ensemble un bilan de tout cela sur les perspectives en matière de coopération décentralisée.

Deux jours, ce n’est certainement pas suffisant pour aborder tous les sujets mais l’essentiel a été dit.

André Brision (Jumelage Bassemyam- Mirbeau et comité d’animation de Cités Unies France)

Le jumelage Bassemyam- Mirbeau est parti d’un coup de cœur d’un ancien secrétaire général de la mairie de Ouaga qui s’appelait Adrien Tapsoba (qui est décédé il y a un an environ). Il cherchait à jumeler son village, Bassemyam avec une ville de la Vienne. Ouaga étant jumelée à Loudun et Mirbeau étant près de Loudun, le coup de cœur est parti très vite car nous cherchions aussi une ville du Sud pour un jumelage.

Jusqu’en 1990, nous avons fait de la coopération caritative et cela nous donnait bonne conscience. Mais nous avons estimé que ce n’était pas la bonne solution et nous avons décidé de faire autrement. Personnellement j’avais beaucoup lu sur les programmes de développement local, j’ai pris contact avec nos partenaires du Burkina pour leur faire comprendre que notre relation de l’époque qui était plus de dominant à dominé, de donateur à récipiendaire, n’était pas la meilleure, ni pour nous, ni pour eux. Il fallait donc que nous aboutissions à un programme qui leur permette d’être responsables et autonomes à terme, d’où l’idée de Programme de développement local (PDL). Le jumelage Bassemyam-Mirbeau a ainsi été le premier à mettre en place un tel programme. Il a fait des petits car par la suite nous avons reçu Pierre Michaillard qui est venu voir comment nous nous y prenions dans les années 1993-94. Il a lancé des programmes similaires à Komki-Ipala, à Tanghin-Dassouri et par la suite ce genre de programmes a été lancé dans d’autres localités comme Béguédo.

En tant qu’expérience pilote, nous avons essuyé beaucoup de plâtres. Car ce n’était pas facile de faire comprendre à nos partenaires burkinabè que c’était à eux de décider.

Aujourd’hui, nous sommes conscients qu’il faut agir dans la cohérence dans les 13 villages qui relèvent de Ouagadougou. Nous avons proposé un forum pour réfléchir sur cela. Les ressortissants des villages, où qu’ils se trouvent, les villes jumelées et tous les bailleurs ont été invités à ce forum qui aura lieu en fin novembre prochain.

Laure Trépier (Ville de Grenoble)

Notre plus gros projet de coopération, c’est avec Ouagadougou qui est jumelée avec beaucoup de villes françaises. Le maire de Grenoble, Michel Destot, a eu l’idée d’organiser une rencontre de toutes les villes francophones jumelées avec Ouagadougou pour qu’il y ait plus de concertation sur les différents projets qui sont menés. Cette rencontre qui est organisée de concert avec le maire de Ouagadougou, Simon Compaoré, devrait avoir lieu lors du sommet de la Francophonie en novembre 2004. Car au départ, le maire de Grenoble avait pensé aux villes françaises mais vu le nombre de villes francophones qui travaillent sur la région de Ouagadougou, il a décidé d’élargir le champ.

L’objectif, c’est, bien sûr, d’essayer de faire en sorte qu’il y ait une réelle concertation entre les partenaires, pour que les projets soient menés d’une manière cohérente et qu’il n’y ait pas de doublon : il n’y a pas de concertation entre par exemple Grenoble et Lyon qui ne sont pourtant pas loin l’une de l’autre. Chacun agit de son côté et il n’y pas de politique concertée. A cette occasion, nous allons mettre les cartes sur table pour susciter une concertation et faire en sorte que tous les domaines d’intervention possibles soient couverts par la coopération décentralisée. Nous par exemple à Grenoble, nous sommes plus sur l’environnement et la culture alors que Lyon, c’est plus les problèmes d’urbanisme et d’assainissement, etc. Ce serait bien de travailler sur thématique et faire en sorte qu’il y ait une thématique de la coopération décentralisée ; c’est ce que nous souhaitons aborder lors de cette rencontre.

Jean Pérrin (Jumelage Limonest-Boura)

C’est un jumelage qui a démarré dans les années 1986. L’essentiel du travail a consisté en l’aménagement d’une plaine avec un barrage. Récemment nous avons acheté une décortiqueuse et nous avons aidé pour la réfection de bâtiments. C’est une petite coopération mais le problème que nous avons, c’est celui du suivi. Nous essayons d’avoir des contacts réguliers mais ce n’est pas facile, au risque d’y consacrer l’essentiel de nos ressources.

Après les forages que nous allons étendre à d’autres parties plus éloignées de la commune, nous allons démarrer un nouveau projet, à savoir la construction d’une maison des jeunes, maison d’accueil, qui serait polyvalente. Dans le cadre de ce projet, nous nous sommes demandés, dans la logique de la maison des associations dont on a parlée au cours de cette rencontre, comment nous pourrions faire un collectif qui permettrait de supporter les charges de suivi et d’évaluation pour des actions rassemblant plusieurs communes, notamment celles qui sont de la même région que nous et qui travaillent sur le Burkina.

Jacques Vanneste (Bousbecque - Zorgho)

Notre jumelage est effectif depuis 1988. Il y a eu toute une évolution et de profondes relations entre nos deux populations.

Les rencontres comme celles-ci, dans le cadre de Cités Unies France, sont un enrichissement, une meilleure connaissance sur ce qui se passe autour de la coopération décentralisée et dont on n’est pas toujours informé. L’on discute de questions, avec les experts locaux qui sont présents et c’est une occasion d’une meilleure connaissance du pays, en espérant qu’au niveau du Burkina, il y a aussi de telles occasions pour les acteurs locaux de mieux connaître les partenaires français.

Je trouve que les Burkinabè du Nord sont les meilleurs ambassadeurs locaux et acteurs du développement de leur pays. Ils nous apportent énormément sur la connaissance puisqu’ils arrivent à faire le lien entre notre mentalité et la mentalité burkinabè.

Pour ce qui est de notre jumelage, il faut reconnaître qu’au bout de 15 ans, nous vivons une crise d’adolescence et nous devons nous interroger de part et d’autre sur l’avenir. En 1990, une charte de jumelage-coopération a été signée mais elle ne détermine pas de façon précise le pourquoi de notre coopération et les axes de nos rencontres et de nos interventions. Aujourd’hui, nous devons nous demander pourquoi nous continuons au bout de 15 ans, et quelles sont les orientations que nous nous donnons, quel est le plan de développement à Zorgho, qui sont les interlocuteurs précis. Nous n’avons pas ces réponses de nos partenaires de Zorgho et je pense que nous allons nous donner un à deux ans de réflexion car il y a des non-dits et des incompréhensions. Je suis confiant car l’essentiel c’est de savoir se parler pour avancer.

Jacques Lucas (Jumelage Ouaga - Loudun)

Notre jumelage est le premier jumelage Nord-Sud et le premier jumelage avec le Burkina Faso, initié par René Monory en 1967. Les choses ont beaucoup évolué ; aujourd’hui le maire de Loudun est Jean Touret et Ouagadougou a un maire élu, Simon Compaoré, qui est très dynamique et très actif. Il a initié plusieurs coopérations internationales ; ce qui fait que le paysage de la coopération avec Ouagadougou a beaucoup changé. C’est tant mieux pour Ouagadougou mais cela demande davantage de coordination entre les intervenants. Le maire de Loudun en particulier, Jean Touret, voudrait que nous ayons plus de communication entre intervenants français et burkinabè. Le maire de Loudun a reçu une lettre du maire de Grenoble il y a quelques mois qui l’invitait à une réunion lors du sommet de la Francophonie. A Loudun nous sommes très intéressés par une telle idée et partants pour mettre en place un collectif qui se réunirait de manière périodique (une fois par an) pour discuter avec le maire de Ouagadougou des opportunités, du programme de développement de la ville et voir comment ces différentes coopérations peuvent s’articuler dans le schéma de développement de la ville de Ouagadougou, de manière à ce que chacun trouve sa place et sache ce qu’on attend de lui. Cela permettrait que nous évitions les doublons et que nous ayions une coopération qui soit rentabilisée au maximum. Je pense que le maire de Ouaga a un rôle très important à jouer dans ce sens car c’est lui qui est en relation avec tous les partenaires.

Cyriaque Paré
(Ambassade du Burkina en France)
Sidwaya du 27/10/03

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