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Ibrahim Sy, un Burkinabè « coincé » en Gambie : « Si Dieu me donne les moyens, je retourne au pays »

Publié le mercredi 6 septembre 2006 à 08h05min

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Ibrahim Sy

Ibrahim Sy est un Burkinabè vivant en Gambie. Parti du Burkina en 1994 avec l’espoir d’attente l’Europe, il dit être actuellement « coincé » en Gambie depuis 1998 où il a fondé une famille. Son plus grand rêve à l’heure actuelle est de retourner au Burkina.

Sidwaya (S.) : Une bonne partie des Burkinabè vivant en Gambie serait en transit à la recherche de moyens pour traverser afin de se rendre en Europe. Qu’en dites-vous ?

Ibrahim Sy (I.S.) : A ma connaissance, les Burkkinabè vivant en Gambie sont là pour travailler. Personne ne m’a parlé de traversée. On ne m’a jamais amené un Burkinabè ici disant qu’il a échoué dans sa tentative de traversée. Moi je vis à Banjul depuis huit ans.

Je suis instituteur à l’école sénégalaise. La plupart des Burkinabè vivant dans ce pays sont dans la campagne. Ce sont des paysans. Nous qui sommes en ville, nous essayons de nous organiser en association afin de pouvoir être à l’écoute les uns des autres.

S. : Rencontrez-vous des problèmes de cohabitation avec les Gambiens ?

I.S. : Les Burkinabè et tous les autres étrangers vivant en Gambie ont une obligation de se prémunir d’une carte de séjour appelée « alliance ». La carte coûte 25 000 F. Pour les Burkinabè, il faut en plus, avoir un permis d’habitation d’une valeur de 20 000 F CFA. Voyez-vous, on doit débourser annuellement 45 000 F CFA pour être en règle. De ce fait, ceux qui n’ont pas les moyens d’être en règle sont obligés d’être toujours en alerte afin de ne pas se faire prendre. Environ 1000 Burkinabè vivent en Gambie.

S. : Hier instituteur au Burkina, aujourd’hui vous enseignez en Gambie. Pouvez-vous nous racontez votre histoire ?

I.S. : Une fois en Gambie, je me suis dit qu’avec mes diplômes, je pouvais enseigner. Mais avant l’enseignement, j’ai pratiqué la médecine traditionnelle pour commencer. Ce n’est que par la suite que j’ai sollicité le poste d’instituteur à l’école sénégalaise. Après le dépôt de mes dossiers, on m’a accordé une interview. Depuis, j’enseigne actuellement au cours préparatoire à l’école sénégalaise, une école française différente de l’école gambienne, la Gambie étant un pays anglophone.

S. : Pourquoi dans votre quête d’aventure êtes-vous allé en Gambie et non ailleurs ?

I.S. : Quand je partais du Burkina, mon objectif était de me rendre en Europe. Mais le destin a voulu que je me retrouve ici en Gambie. Je suis parti du Burkina Faso en 1994. Mais c’est seulement en 1998 que je suis arrivé en Gambie. Auparavant, j’ai fait la Guinée Conakry, la Guinée-Bissau et le Sénégal. Le destin a voulu que je reste en Gambie. J’ai une grande famille mais pas assez de ressources financières qui puissent me permettre de retourner au Burkina pour m’y installer. Mais si Dieu me donnait les moyens, je retournerai chez moi.

S. : Etes-vous là en attendant ?

I.S. : Oui parce que jusqu’à présent, je suis en contact direct avec mes parents au Burkina. Je leur téléphone régulièrement. Ils ont de mes nouvelles et je suis également au courant de ce qui se passe au pays...

S. : En attendant de repartir...!

I.S. : Oui si Dieu me donne la chance de repartir au Burkina Faso, je rentre.

S. : Et le rêve de l’Europe ?

I.S. : J’ai abandonné cette idée depuis longtemps car j’ai maintenant une femme et cinq enfants. Si Dieu m’accorde la route, je retourne au Burkina Faso.

S. : Votre épouse est-elle Gambienne ?

I.S. : Oui elle est Gambienne...Mes cinq enfants sont tous nés ici.

S. : Avez-vous un message à l’adresse des Burkinabè restés au pays ?

I.S. : Le seul message que j’ai, s’adresse aux jeunes qui veulent tenter l’aventure européenne en passant par la Gambie. Je leur dit de renoncer à cette idée périlleuse...C’est tout ce que j’ai à leur dire.

S. : Pourquoi un tel message ?

I.S. : Un tel message car je suis actuellement coincé en Gambie. J’y ai fondé un foyer. Je ne sais pas si un jour je retournerai dans mon pays avec ma femme et mes cinq enfants. C’est l’aventure qui m’a mis dans une telle situation. Ce n’est pas un regret mais...

Interview réalisée par Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA (rabankhi@yahoo.fr)

Sidwaya

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