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Aucun obstacle juridique ou politique ne s’oppose à une candidature de Blaise COMPAORE en 2005

Publié le lundi 16 février 2004 à 13h26min

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Un bref rappel historique

Le constituant originel en 1991 avait rédigé l’article 37 de la façon suivante : « Le Président du Faso est élu pour sept ans au suffrage universel, direct, égal et secret. Il est rééligible une fois ». Le mandat était donc à l’origine fermé(limitation du nombre de mandats) et sur cette base Blaise COMPAORE a été élu pour un premier mandat de 7 ans.

Une première modification de cet article 37 est faite par la loi constitutionnelle du 27 janvier 1997 qui tout en maintenant le septennat, supprime la limitation du nombre de mandats. Sur la base donc d’un mandat ouvert, Blaise COMPAORE a été réélu en 1998 pour 7 ans qui expire en 2005. Mais une seconde modification de l’article 37 sera opérée par la loi constitutionnelle du 11 avril 2000.

Cette loi instaure le quinquennat et réintroduit la limitation du nombre de mandats, le nouvel article 37 est libellé de la manière suivante : « Le Président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel, direct, égal et secret. Il est rééligible une fois ». Il s’agit donc d’un nouveau mandat qui n’a rien à voir avec le précédent tant du point de vue de sa durée(5 ans) que de ses possibilités de renouvellement(une fois). Le mandat est donc de nouveau fermé.

La question de droit

La question qui se pose est de savoir si cette nouvelle disposition est opposable au Président du Faso au cas où il souhaiterait rebelloter en 2005. La réponse juridiquement est simple, c’est NON.

On vous explique pourquoi :

En droit, lorsque plusieurs lois se succèdent sur le même objet dans le temps, comme c’est le cas des révisions successives de l’article 37, on dit qu’il y a conflit de lois dans le temps. Il faut donc définir les règles permettant de donner une solution au conflit pour dire quelle est la loi qui régit une situation déterminée. Est-ce la nouvelle loi ou est-ce l’ancienne ? Les solutions au conflit de lois dans le temps regroupées sous le vocable de « droit transitoire » sont dominées par une règle posée par l’article 2 du code civil et libellée ainsi qu’il suit :

« la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».

Selon cette règle, la loi n’a pas d’effet rétroactif (principe de la non rétroactivité) signifie selon tous les auteurs unanimes , qu’elle est sans application aux situations juridiques dont les effets ont été entièrement consommés sous l’empire d’une loi précédente et dire qu’elle ne dispose que pour l’avenir(principe de l’effet immédiat) signifie qu’à partir du moment où une loi est en vigueur, elle régira les situations juridiques nées postérieurement à son entrée en vigueur.

Lorsqu’on applique cette règle à la situation de SEM le Président Blaise COMPAORE on relève que le principe de non rétroactivité veut qu’on ne touche pas à la durée de son mandat qui est de 7 ans, d’ailleurs il est établi que personne n’a remis en cause cette durée qui expire en 2005. Ce principe veut également que le Président Blaise COMPAORE qui a été réélu sur la base d’un mandat ouvert conserve son droit à se représenter.

En effet, on ne peut pas interpréter une disposition législative de façon à porter atteinte aux droits acquis(un principe de droit bien connu des travailleurs et syndicalistes). Nonobstant donc les dispositions de la loi constitutionnelle du 11 avril 2000, le Président Blaise COMPAORE a sur la base de la loi constitutionnelle du 27 janvier 1997 un droit acquis à se représenter.

Mais, cette fois -ci et en raison de l’effet immédiat de la loi, le Président - candidat postulera pour un mandat de 5 ans au lieu de 7 et pour un mandat fermé car il sera rééligible une fois. Telles sont les solutions juridiques auxquelles parviennent l’interprétation stricte et sans passion de l’article 37 de la Constitution.

Pourquoi tant d’analyses erronées

Les analystes de la scène politique aboutissent souvent à des résultats erronés lorsqu’ils occultent le fait qu’actuellement la situation juridique du Président Blaise COMPAORE est régie par la loi constitutionnelle du 27 janvier 1997 laquelle lui donne la possibilité de se faire réélire et par une mauvaise appréciation de l’effet immédiat qui signifie que dorénavant le Président du Faso sera élu pour cinq ans et sera rééligible une fois.

D’ailleurs de façon arbitraire ou pour servir on ne sait quelle cause, ces analystes procèdent à une dissection de l’article 37 en distinguant entre la durée du mandat où ils admettent le principe de non rétroactivité et la possibilité de renouvellement où ils refusent d’appliquer ce même principe de la non - rétroactivité pour invoquer en lieu et place le principe de l’effet immédiat.

Or l’article 37 est un tout indivisible, la loi constitutionnelle du 11 avril 2000 définit tout simplement un nouveau mandat( cinq ans renouvelable une fois) que personne n’a encore exercé. D’ailleurs dans les systèmes où l’on est passé d’un mandat ouvert à un mandat fermé, la solution généralement admise est que le Président sortant n’est pas disqualifié pour l’avenir.

C’est la solution du Constituant Américain qui lors du vote en 1951 du XXII ème amendement de la Constitution américaine limitant le nombre de mandats à expressément prévu que la réforme ne s’appliquait pas au Président sortant. Même si le constituant dérivé burkinabé ne l’a pas expressément prévu en raison sans doute de la connaissance qu’il avait du droit transitoire applicable au Burkina et du consensus qui s’était dégagé au sein de la commission de concertations sur les réformes politiques sur la non application de l’article 37 nouveau au Président Blaise COMPAORE, cette solution est la seule juridiquement admissible.

Sur le plan politique aussi

Sur le plan politique, il convient d’attirer l’attention de nos concitoyens sur les dangers que fait courir à la nation, une certaine classe politique en brandissant l’arme de la haine et de l’exclusion. Ce pays s’est construit autour d’un certain nombre de principes de dialogue et de tolérance, partagés par la majeure partie de la classe politique et de la société civile, que le Président Blaise COMPAORE s’est évertué à maintenir et même à faire fructifier.

Jamais dans l’histoire récente de notre pays on a cherché à manipuler l’interprétation de textes clairs afin de parvenir à l’élimination artificielle de candidats. Bien au contraire les réformes hardies engagées sous la houlette de l’actuel locataire de la Présidence du faso sur une base consensuelle ont permis la modernisation de notre système politique qui est plus transparent et plus crédible(instauration d’une CENI et du bulletin unique par exemple) et qui a permis la participation lors des dernières consultations législatives de 30 partis ou formations politiques à la compétition électorale et la représentation au sein de l’Assemblée nationale de 13 d’entre eux.

En refusant l’exclusion et la haine et en prônant le dialogue, le partage et la solidarité, les plus hautes autorités de notre pays ont permis aux Burkinabè de jouir d’une tranquillité et d’une paix fort enviables. Dans des pays pas très lointains la redoutable machine de l’exclusion politique et sociale ainsi que de la haine y a produit des effets dévastateurs pour tous. Alors concitoyens de grâce, ne mettons pas la main dans l’engrenage car faut - il le répéter ; juridiquement et politiquement rien n’empêche Blaise COMPAORE de se présenter en 2005.

Un Réseau de Citoyens pour le Respect
de la Constitution et contre l’Exclusion.

Rejoignez le réseau en écrivant à l’adresse Email : burkina2005@yahoo.fr

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Vos commentaires

  • Le 18 février 2004 à 08:10 En réponse à : > Aucun obstacle juridique ou politique ne s’oppose à une candidature de Blaise COMPAORE en 2005

    Bonjour,

    J’admets le raisonnement juridique qui est tenu dans l’article, conduisant à autoriser notre Président à se représenter en 2005, mais cette fois pour un mandat fermé. Il est simple et cohérent. Il suscite néanmoins deux questions, d’inégale importance.

    Mon premier exemple concerne la loi française de 1974 qui avançait l’âge de la majorité de 21 à 18 ans. Un jeune né avant la date de mise en aplication de cette loi avait acquis à la naissance le droit d’être majeur à 21 ans. Selon les principes de droit transitoire expliqués dans cet article, la loi n’a pas d’effet rétroctif et cet âge de 21 ans ne peut être remis en cause. On serait ainsi arrivé au paradoxe où un jeune né en 1966 aurait été majeur avant celui-ci, né deux plus tôt. On nous dira que la retroactivité était globalement avantageuse (je crois que cette notion d’"avantage" a aussi sa place dans l’interprétation juridique de la rétroactivité) et c’est ainsi que tous les jeunes agés de 18 à 21 ans en 1974 ont été déclarés majeurs du jour au lendemain.

    Le deuxième cas que je voudrais vous soumettre est plus lourd d’enjeux. Revenons à la situation qui nous occupe et imaginons que SEM Blaise Compaoré soit rééelu en 2005, pour un mandat de 5 ans, fermé (donc réélligible une seconde fois). Que se passerait-il si une nouvelle modification de l’article 37 modifiait la nature du mandat, par exemple en le rendant ouvert ? Cette modification devrait avoir lieu avant 2010 pour ainsi modifier la nature du mandat suivant. La ficelle serait un peu grosse, direz-vous. Juste. Il suffirait de procéder en deux temps, comme il a été fait en 1997 puis en 2000, pour obtenir le même résultat.

    Je dirais pour conclure que le principe de rétraoctivité a ses limites. Il ne peut être invoqué seul comme référence juridique ultime. Sous peine justement de tomber dans le travers "politicien" dénoncé dans la deuxième partie de l’article, et à laquelle je souscris complètement.

  • Le 22 février 2004 à 06:26 En réponse à : > Aucun obstacle juridique ou politique ne s’oppose à une candidature de Blaise COMPAORE en 2005

    Un peu de bonne foi les amis car que faites-vous de l’esprit de la loi chers emiments juristes.Attention a l’acte fautif premedite car la sanction pourrait etre populaire.Attention !!!!

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