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Burkina/Gouvernance : « Que l’on soit civil ou militaire, tout le monde est hostile au contrôle ; aucune personne ne veut être contrôlée » (ASCE-LC)

Publié le mardi 6 février 2024 à 22h24min

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Burkina/Gouvernance : « Que l’on soit civil ou militaire, tout le monde est hostile au contrôle ; aucune personne ne veut être contrôlée » (ASCE-LC)

Au cours de la conférence de presse qu’elle a animée ce mardi 6 février 2024 à Ouagadougou sur son rapport général d’activités 2022, l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) a décliné l’environnement global qui prévaut pendant ses missions de contrôle.

Selon les conférenciers, le climat au niveau de l’armée ne diffère pas de celui chez le civil. « Que l’on soit civil ou militaire, tout le monde est hostile au contrôle ; personne ne veut être contrôlée. Donc, la même chose qu’on a chez les civils, c’est la même qu’on a chez les militaires. La différence, c’est que là-bas, il y a la réalité de la situation d’insécurité ; donc il y a la crainte qu’on ne peut pas communiquer sur tout (au risque que cela puisse être mal utilisé et porte atteinte à l’efficacité de la lutte contre l’insécurité). Mais il est évident que la personne qui est auditée, partout, elle rechigne à vous donner l’information. Ici, la hiérarchie (militaire) était quand même disposée ; quand il y avait des difficultés, on se référerait pour qu’elle puisse les interpeller (les personnes auditées, ndlr) pour nous remettre les documents. Quand vous regardez le rapport, vous verrez qu’il y a plus de dysfonctionnements en terme organisationnel déjà, mais les gens ne voient pas cela, ils pensent que ce n’est pas important. Quand on prend le cas du carburant, on peut comprendre que pour une institution comme la sécurité, l’armée, c’est important. Mais, si le dispositif qui le gère n’est pas bon, vous voyez que ça peut porter atteinte à l’efficacité de tout ce qui se passe. Or, ici, il ne s’agissait même pas d’aller s’appesantir sur la quantité de carburant perdue, mais on se rend compte que l’organisation qui est en place n’est même pas bonne, par exemple. Donc, il y a des dispositifs comme cela qui ne fonctionnent pas bien, par rapport auxquels on a fait des recommandations en vue d’améliorer », a expliqué le contrôleur général d’Etat par intérim, Urbain Millogo, principal orateur à la conférence de presse.

Le contrôleur général d’État par intérim, Urbain Millogo, et ses collègues ont salué la collaboration entre l’ASCE-LC et les corps de contrôle internes des départements ministériels.

Il répondait ainsi à la question d’un journaliste sur le climat qui a prévalu pendant le passage des contrôleurs au niveau du département en charge de l’armée (beaucoup de commentaires à charges ayant pullulé ces dernières années sur la gestion des finances dans ce département ministériel).

« L’armée n’est pas aussi opaque que cela, c’est une institution de l’Etat, qui n’échappe pas aux règles mises en place pour encadrer la gestion financière et toute autre gestion. La seule différence, c’est que compte-tenu des exigences de sécurité, on s’abstient de communiquer sur toutes les données. Sinon, il n’y a pas de tabous, le contrôle s’exerce à tous les niveaux, dans tous les domaines », a appuyé un des collaborateurs.

Vue de personnes-ressources de l’ ASCE-LC à la conférence.

A quoi est dû cette hostilité générale au contrôle ?

A quoi est dû cette hostilité générale au contrôle ? « J’allais dire que c’est naturel. Vous, certainement à la maison, quand vous rentrez et que madame vous pose beaucoup de questions, vous commencez à vous énerver un peu. C’est ce même sentiment que les gens ont, quand il faut venir regarder leur gestion. Il y a aussi que les gens ont des a priori par rapport aux contrôles, alors que l’audit, on devrait même le réclamer ; puisqu’il vient vous aider à corriger vos imperfections et à vous améliorer. Mais comme ils ignorent le but de l’audit, les gens pensent que c’est pour venir leur créer des problèmes. Et comme ils ne sont pas sûrs d’eux, ils se font des inquiétudes. Mais après, quand on finit et qu’il n’y a rien contre eux, ils sont contents. Certains nous font la confidence à la restitution que s’ils avaient compris que c’était pour venir les aider à s’améliorer, les résultats qu’on a obtenus allaient être meilleurs que cela. Maintenant, la réalité aussi est que nombreux se reprochent beaucoup de choses », a réagi M. Millogo à cette autre préoccupation, ajoutant que le professionnalisme des auditeurs peut également jouer dans ce climat de contrôle (s’ils s’érigent en tribunal d’inquisition).

Le contrôleur d’État Mamoudou Drabo exhorte à la culture de redevabilité.

Pour le chef du département de la stratégie nationale de la prévention, Mamoudou Drabo, il y a pourtant nécessité pour tous ceux qui détiennent une portion des prérogatives de l’Etat, d’inscrire dans les mœurs, l’obligation de redevabilité. « Tout responsable, tout gestionnaire, tout ordonnateur, tout comptable, toute personne qui détient une partielle des prérogatives de l’autorité de l’Etat doit s’attendre à être contrôlée d’une façon ou d’une autre », interpelle le contrôleur, insistant que le dispositif de contrôle est important dans la gouvernance.

« Par rapport à la question de la corruption et des infractions qui sont assimilées, où il y a une grosse plaie dans notre pays, tout le monde doit se mobiliser à ce niveau-là. Eviter que quelqu’un ne détourne ses prérogatives, ses responsabilités, pour en faire une affaire personnelle, pour se procurer des gains personnels. On doit marquer une tolérance zéro par rapport à ces questions-là », invite Mamoudou Drabo, pour qui, ces pratiques sont une véritable gangrène qui peut occasionner d’autres infractions ou d’autres crimes, de même qu’elles portent atteinte aux efforts de lutte contre le terrorisme et fragilisent les institutions et la gouvernance générale.
C’est pourquoi, les contrôleurs d’Etat exhortent l’ensemble des populations à davantage s’impliquer dans la lutte contre le phénomène de corruption, par notamment les dénonciations.

O.L
Lefaso.net

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