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Covid-19 au Burkina : L’Opposition politique plaide pour un soutien des enseignants du privé et des vacataires du public

Publié le mardi 28 avril 2020 à 23h00min

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Covid-19 au Burkina : L’Opposition politique plaide pour un soutien des enseignants du privé et des vacataires du public

La gestion de la crise sanitaire, le dialogue politique, la « répression » dans les médias publics et le contentieux entre des magistrats et l’Etat ont été les principaux points autour desquels, s’est déroulée la conférence de presse hebdomadaire du Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF) de ce mardi, 28 avril 2020, à Ouagadougou. Nous vous proposons l’intégralité de la déclaration liminaire de cette conférence animée par le président de la Nouvelle alliance du Faso (NAFA), Pr Mamoudou Hama Dicko, et le président du Rassemblement des écologistes du Burkina Faso, Adama Séré.

Déclaration liminaire

Nous sommes au 483e jour des massacres de Yirgou. En ce souvenir douloureux, nous demandons que justice soit rendue à toutes les victimes de ces massacres, et que l’ensemble des Burkinabè s’engagent contre l’ethnicisme et le communautarisme qui menacent les fondements de notre nation.

Le présent point de presse est le premier du mois de Ramadan 2020. Nous souhaitons aux musulmans du Burkina Faso et du monde entier un excellent mois de jeûne, de pénitence et charité. Que ce mois béni de Ramadan permette à notre pays de renouer avec la sécurité, la cohésion sociale et la paix !

Les sujets qui seront abordés sont les suivants :

-  les rencontres avec le Gouvernement et des institutions ;
-  la répression dans les médias publics ;
-  le Covid-19 ;
-  et le contentieux entre des magistrats et l’Etat.

Mesdames et Messieurs les journalistes,

Sur invitation du Président du Faso, l’Opposition politique a participé à deux rencontres le vendredi 17 et le jeudi 23 avril 2020. Le sujet à l’ordre du jour à la première rencontre était les élections de 2020, et le second sur le Covid-19. A ces rencontres, l’Opposition a assisté aux exposés du Président de la CENI, du Directeur général de l’ONI, et des membres du Gouvernement.

Sur le premier sujet, à savoir le double scrutin présidentiel et législatif de novembre 2020, le Président de la CENI a fait l’exposé de trois scénarii. Le scénario fondamental est la reprise des opérations d’enrôlement et la tenue des élections à bonne date en tenant compte des dispositions de l’article 165 (intangible) de la loi constitutionnelle n°072-2015/CNT du 05 novembre 2015 portant révision de la Constitution qui stipule que :

« Aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause :

la clause limitative du nombre de mandat présidentiel ;
la durée du mandat présidentiel ;
la nature et la forme républicaine de l’Etat ;
le système multipartiste ;
l’intégrité du territoire national.

Dans les échanges, la CENI a dit qu’elle était capable d’organiser les élections à bonne date. Mais, a-t-elle relevé, si elle accusait un quelconque retard, cela allait jouer sur certains aspects du Code électoral. Et dans ce cas, elle aurait besoin que la classe politique fasse les modifications appropriées. Sur ce plan, il y a eu consensus et il a été demandé à la CENI de transmettre aux deux composantes les points juridiques précis sur lesquels elle pourrait être amenée à solliciter la classe politique pour des aménagements du code électoral.

Le dialogue politique et les élections de novembre 2020

L’Opposition a réaffirmé sa position qui est que les élections couplées présidentielle et législatives doivent se tenir en Novembre 2020, conformément à la Constitution, au Code électoral et aux conclusions du Dialogue politique. Aucun autre scénario n’est envisageable, et aucun prétexte ne doit être trouvé pour tomber dans des artifices juridiques permettant d’aller au-delà des mandats du peuple.

Concernant la gestion du Covid-19 dans notre pays, l’Opposition politique est allée à la rencontre avec sept principales préoccupations : Les mesures de préparation à la crise, le mécanisme global de riposte, la gouvernance politique de la riposte, la riposte sanitaire, les mesures économiques et sociales, le débat sur le budget de la riposte, et la communication institutionnelle.

- Les mesures de préparation à la crise

Notre préoccupation était de savoir si le pays était préparé à la crise, et quelles étaient les dispositions initiales qui ont été prises. Nous avons fait la remarque que l’expérience de la prévention de l’épidémie d’Ebola n’a pas été capitalisée pour prévenir le Covid-19.

- Le mécanisme de coordination

Nous avons souligné le fait que l’action technique contre le Covid-19 ne semble pas s’appuyer sur l’organisation et le fonctionnement du système national de santé. Le système actuel est vertical, et la question du Covid-19 est traitée comme une question spéciale. En outre, on assiste à un foisonnement d’initiatives, notamment autour de la collecte de fonds et des dons. A cela, il faut ajouter les contradictions qui ont entouré la relecture du plan national de riposte.

- La gouvernance globale

Nous avons rappelé qu’il est bon que le Gouvernement cherche l’apaisement avec les partenaires sociaux. Nous avons aussi déploré le déficit de concertation au sein de la classe politique. Par ailleurs, la concertation avec les populations doit être permanente, pour éviter que les décisions ne soient inefficaces
La gestion centralisée de la pandémie limite la prise en main de la riposte par les institutions locales. Les plans locaux de riposte doivent aussi être financés, à travers une décentralisation du financement.

- Les mesures sanitaires

Nous avons fait plusieurs observations relatives à la faible capacité, à la centralisation et à la lenteur du dépistage et de la prise en charge des malades. Nous avons aussi critiqué le manque de rationalité de certaines décisions, comme la location des hôtels et la gestion du confinement des malades.

Nous avons également plaidé pour que les agents de santé soient mieux protégés et équipés, qu’il y ait un renforcement du personnel si nécessaire (avec la mobilisation des étudiants). Nous avons suggéré que soit instituées une prime de motivation et une indemnisation en cas de décès par la maladie, au bénéfice des agents de santé en première ligne.

Nous sommes revenus sur des sujets à débat comme les scandales à Tengandogo, le port obligatoire des masques, la question des personnes à la santé fragile, la question de la Chloroquine et de l’Apivirine.

- Les mesures de riposte économique

Nous avons pris acte des mesures sociales prises par le Président du Faso. Concernant les mesures fiscales, nous avons voulu savoir, point par point, le nombre de personnes qui en seront bénéficiaires, et l’impact de ces mesures.
Nous avons par ailleurs souligné que certaines mesures, notamment celles concernant les banques et les médias, sont des vœux pieux.

Concernant les mesures de relance économique, nous avons voulu en savoir plus sur les critères de choix des bénéficiaires, et sur la transparence de la démarche.
Enfin, nous avons évoqué les sujets brûlants relatifs au Covid-19, à savoir la réouverture des marchés, la question du transport urbain, des activités académiques, des restaurants, des lieux de culte, etc.

L’opposition est d’accord pour la réouverture de ces structures économiques, sociales et religieuses, mais a souhaité que l’Etat et les mairies prennent les mesures appropriées pour faire respecter les consignes de distanciation et de nettoyage.

- Débat sur le budget de riposte

Sur ce sujet, nous avons non seulement critiqué le manque de rationalité et de réalisme du budget, avec des velléités de malversations, mais nous avons aussi fait des suggestions pour une meilleure mobilisation des ressources et une gestion transparente desdites ressources.

- La communication institutionnelle

Sur cette question, nous avons relevé la multiplicité de voix officielles parlant du coronavirus, les contradictions entre les membres du Gouvernement, et l’inadaptation des canaux de communication utilisés.

Chers journalistes,

Comme vous le savez, depuis le 2 mars dernier, les médias publics traversent une crise sans précédent. En effet, en réponse aux revendications d’amélioration de leurs conditions de vie et de travail, le Ministre de la Communication et des Relations avec le parlement a abattu une répression sans mesure sur les travailleurs des médias publics, à savoir la RTB et Sidwaya. Ainsi plus de 300 agents se sont vus éjectés des médias et affectés aux archives, à la DRH ou encore à la direction des statistiques sous le prétexte de régularisation de leur carrière.

Ces affectations déguisées cachent mal la volonté du Gouvernement de tuer la liberté d’expression et les voix discordantes, de s’accaparer les médias publics et les ériger en service de communication en vue des élections à venir. Dans cette tâche, ils sont aidés par le Directeur Général qui, comme eux, a dévoilé clairement son appartenance politique au MPP.

Sur le lot des 370 agents reversés au Ministère sous le fallacieux prétexte de régularisation, la moitié a été rappelée sans explication. Cependant, les plus coriaces aux voix discordantes et les membres des sections du SYNATIC, connus pour leur attachement à la liberté d’expression, sont laissés sur le carreau. Cette caporalisation, faut-il le rappeler, est une atteinte grave à la liberté d’expression, fondement de la démocratie. Elle sape les droits des Burkinabè de bénéficier d’informations justes, crédibles et équilibrées à travers une presse libre.
Dans la perspective des élections à venir, cet état de fait n’augure rien de bon.

Le CFOP-BF dénonce la patrimonialisation des médias publics par le pouvoir MPP.

Si en plus d’être membre du bureau politique du MPP, le DG de la RTB choisit ses journalistes sur des bases autres que les qualités professionnelles, quelle garantie donne-t-il sur l’accès équitable de tous lors des échéances électorales ?

En tout état de cause, le CFOP ne saurait accepter une telle dérive. Les média sont la sève nourricière de la démocratie, quand ils sont en danger, c’est nous démocrates, qui sommes en danger. Par ailleurs, il convient de noter que les médias publics sont soutenus par l’argent de tous les Burkinabè. Les transformer en propriété du MPP est une forme de patrimonialisation du pouvoir. Nous demandons donc instamment la réintégration pure et simple de ces agents des médias publics et l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail.

L’Opposition politique suit ce dossier avec la plus grande attention. Le Chef de file de l’Opposition écrira d’ailleurs une lettre au Président du Faso, pour attirer sa haute attention sur les faits graves soulevés.

Mesdames et Messieurs,

Si l’on se réfère aux chiffres officiels sur le Coronavirus dans notre pays, la maladie connaît un recul ces derniers jours.

L’Opposition politique félicite et encourage l’ensemble des acteurs pour ces résultats probants. L’Opposition encourage les citoyens à toujours appliquer les gestes barrières pour contrer la propagation du Covid-19.

La tendance de la maladie est à la baisse, mais nos autorités doivent agir pour prévenir ses conséquences socio-économiques.

En effet, dans certains quartiers de Ouagadougou et des provinces, des commerçants ont manifesté hier lundi pour demander la réouverture des marchés. Il faut rouvrir les marchés avec le respect des gestes barrières, pour éviter de créer un problème aussi grand, sinon pire, que le Covid-19.

La maladie a aussi un impact considérable sur l’éducation.
Pour ce qui est de l’enseignement privé par exemple, interrogé le 10 avril dernier sur la question des enseignants vacataires, le Porte-parole du Gouvernement a simplement dit qu’un fonds de soutien est mis en place pour les entreprises, et que les propriétaires des lycées et collèges pouvaient souscrire à ces fonds. Mais, le 24 avril, la Coordination nationale des enseignants du privé du Burkina a animé une conférence de presse pour interpeler le Gouvernement sur le calvaire que vivent ses membres depuis la fermeture des établissements.

L’Opposition politique plaide pour un accompagnement spécifique des établissements privés, afin qu’ils puissent soutenir les enseignants. Pour les vacataires des établissements publics, l’Opposition plaide pour que des allocations périodiques leur soient versées par l’Etat, jusqu’à la reprise effective des cours.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Nous avons appris à travers vos médias que plusieurs magistrats ont traduit l’Etat burkinabè en justice pour fait de coupure illégale de salaire. Les verdicts étaient favorables aux magistrats dans certains tribunaux administratifs et défavorables pour eux dans d’autres.

Sans commenter la décision de justice, l’Opposition politique voudrait relever le caractère pédagogique de ces procès. Pour une des rares fois, des groupes de magistrats qui estiment être lésés par l’Etat attaquent ce dernier, et les résultats tombent différemment d’un tribunal à l’autre. Cela montre que les magistrats sont aussi des justiciables comme tous les citoyens, et qu’ils peuvent gagner ou perdre un procès. Cela est surtout un signe d’espoir pour l’indépendance de la justice. Les magistrats se battent pour se séparer du joug du pouvoir exécutif, et nous ne pouvons que les encourager.

Mais l’Opposition politique rappelle que c’est en défendant les intérêts des citoyens à la base, en jugeant les dossiers pendant de crimes de sang et de crimes économiques, et en rendant justice à la veuve et à l’orphelin opprimés, que nos magistrats vont reconquérir la confiance du peuple et accéder à une réelle indépendance.

Mesdames et Messieurs, c’est tout pour la déclaration liminaire. Nous vous remercions pour votre oreille attentive. Vos questions et suggestions sont les bienvenues.

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