Côte d’Ivoire : Bété, Baoulé, Burkinabé et Maliens font la paix
Le ministre de la Réconciliation,
Sébastien Dano Djédjé, était parmi les siens à Niablé -village situé dans la sous-préfecture de Zikisso-, où il a constaté
l’union et la paix qu’allogènes et autochtones ont scellées. C’était le week-end dernier.
Niablé, village situé à 11 Km de
Gagnoa et à 19 Km de la sous-préfecture de Zikisso dont il dépend, est aussi distancé à 3 Km du village de Logobia. Il est bâti
sur la terre des ancêtres " les Hiridja ". c’est la dénomination d’une entité du canton Zabia. Il comprend les villages frères
de Payopa, Zigopa, Logobia, Lélébrékoua et Niablé. D’une population d’environ 1260 habitants, ce petit village a accueilli des
populations Baoulé, Malinké, Burkinabé, Malien, Guinéen etc. Les autochtones vivaient en parfaite harmonie avec les hôtes depuis
plus d’une décennie. Leur intégration dans la société Bété, à l’image du jeune Backary Traoré, se passe de commentaire.
En effet, ce jeune Malien d’une trentaine d’années, parle aussi couramment la langue Bété que sa langue maternelle.
C’est d’ailleurs lui qui a traduit en Bété le message d’Adama Ouédraogo, chef de la communauté burkinabé. La vie à Niablé
suivait paisiblement son cours, lorsque survint en juin 2003, une crise de cohabitation. Après donc des échauffourées mineures,
les villageois ont demandé aux allogènes de quitter leurs campements respectifs pour venir les rejoindre au village.
Ainsi, pourront-ils apprendre à mieux se connaître en vue de pérenniser l’entente et amorcer ensemble le développement
du village. A cette demande, les allogènes donnent leur accord de principe. Alors que les villageois attendent avec impatience
leur arrivée dans le village, comme prévu, les Baoulé rompent avec ce qui était considéré comme bonne manière. Toutes choses qui
vont créer la suspicion et rendre l’atmosphère invivable. De fait, selon Michel Kouadja, Secrétaire général du chef de Niablé,
les Baoulé avaient pour habitude de transférer le corps dans leur village natal pour l’enterrement.
Mais avec la crise,
les transferts leur revenaient un peu plus cher. Ils ont donc sollicité une portion de terre auprès de la notabilité dudit
village pour en faire un cimetière. La réponse à cette requête n’était pas encore donnée que survint un décès. Les
corégionnaires du défunt, pensant que le fait qu’ils aient été sollicités par leurs hôtes pour venir vivre ensemble avec eux,
leur conférait un certain droit, l’ont enseveli, dans la plantation d’un villageois Bété. Il n’en fallait pas plus pour
soulever le courroux des villageois.
La promptitude des élus
Mais aussitôt saisis de cette affaire, les
élus et cadres vont y anticiper et peser de fort belle manière sur ce différend, afin de le tuer dans l’œuf. De leur côté, les
villageois qui ne souhaitent plus les voir enterrer des corps dans leurs plantations, ont réitéré le vœu que les frères Baoulé
et les autres communautés les rejoignent au village et se considèrent comme appartenant intégralement à ce village. Les
allogènes vont longtemps hésiter avant de donner leur accord, en prenant solennellement l’engagement - le dimanche dernier- de
quitter leur campement pour venir vivre en harmonie avec leurs frères Bété de Niablé. Seulement, " il nous faut du temps, ma
communauté et moi pour nous séparer de nos campements ", a informé Jérôme kouakou, le chef Baoulé.
C’est donc pour
célébrer cette manifestation de concorde retrouvée, du vivre ensemble proclamé qui consacre la fraternité, la réconciliation et
la paix à Niablé que le ministre Dano Djédjé, le député de Zikisso, Dayoro Pieu (directeur du lycée professionnel de Gagnoa),
élus et cadres de Gagnoa et des chefs de villages du canton Zabia, ont tenu à en être les témoins privilégiés. "J’ai eu raison
d’inviter des amis, des frères cadres de Gagnoa et d’ailleurs, des journalistes, pour qu’ils soient les témoins oculaires de
cette cérémonie". A l’assistance, le ministre de la réconciliation dira : " ce dont les Ivoiriens ont vraiment besoin, c’est
ce que nous donne à voir, à vivre et à apprécier toute la communauté villageoise de Niablé. Une communauté qui sait les
retombées bénéfiques d’une cohabitation pacifique, solidaire, unitaire et exemplaire ".
Il a également tenu à leur
exprimer ses profonds sentiments de gratitude et de reconnaissance pour le soutien qu’ils apportent à la mission de
réconciliation et de paix que leur fils, leur frère, Laurent Gbagbo, Président de la République de Côte d’Ivoire, a bien voulu
lui confier. " Soyez assurés, chers parents, que je ne manquerais pas de lui rendre fidèlement compte de tout ce que j’ai vu,
entendu et reçu", leur a-t-il promis. Tous ont donc pris acte de cette volonté clairement exprimée. Et ils se sont engagés, à
leur tour -Commandant, cadres, ministre, jeunes, femmes- de tout mettre en œuvre pour appuyer positivement l’expression de
cette volonté qui est loin de trahir leur nature.
" Individuellement et collectivement, notre responsabilité est ici
engagée. Car nous nous investissons solennellement, ici et maintenant, dans un pari éthique qui est parfaitement à notre portée
". Le ministre n’a pas manqué de remercier les différentes communautés d’être toujours restées les mêmes en matière
d’hospitalité, de fraternité et de solidarité. Merci à chacun et à tous d’être venus massivement à cette fête de la paix pour
signifier qu’il n’y a pas de jour férié pour célébrer la Paix", a indiqué le ministre. Qui s’est dit rassuré davantage "
quant à la densité et la profondeur des liens qui nous unissent toujours ! Frères, nous sommes. Frères nous resterons à jamais
", a dit le ministre aux populations de Niablé.
Les problèmes de Niablé
Niablé, faut-il le rappeler est
un beau petit village qui baigne dans l’obscurité totale. Il a fallu que le groupe électrogène qui alimente la sonorisation
soit en panne de carburant, pour que ceux qui ont mis pied pour la première fois dans ce village, se rendent compte qu’il n’y
a pas d’électricité à Niablé. A cela, s’ajoute le mauvais état de la route qui y mène. A l’heure où l’on parle d’école
gratuite, Niablé est limité à une seule école de trois classes seulement. Que dire alors du calvaire des malades et femmes en
travaille qui doivent accoucher, lorsqu’on se rend compte que le dispensaire se trouve à 5 Km du village.
C’est
d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles villageois, cadres et élus de ce village se sont regroupés en une mutuelle de
développement, dirigée par Célestin Séri. A tous ces problèmes égrenés par le président de ladite mutuelle qu’a précédé
Benjamin Dago, président du comité d’organisation, le ministre a promis frapper aux portes qu’il faut, pour leur donner
satisfaction.
Le Temps