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Opération spéciale de recouvrement de la Taxe de résidence : Le directeur régional des impôts du Centre explique

LEFASO.NET | Par LEFASO.NET

Publié le jeudi 15 novembre 2018 à 16h00min

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Opération spéciale de recouvrement de la Taxe de résidence : Le directeur régional des impôts du Centre explique

A propos de la taxe de résidence imposable aux citoyens, Jean-Paul Galbani, directeur régional des impôts du Centre, à travers cette interview qu’il a accordée à votre journal Lefaso.net le lundi 12 novembre 2018, donne des détails explicatifs.

Lefaso.net : Qu’est que la taxe de résidence ?

Jean-Paul Galbani (J-P.G.) : La taxe de résidence est un impôt direct qui est perçu au profit du budget des collectivités territoriales. Cette taxe, comme son nom l’indique, est perçue auprès des résidents ; la résidence elle-même pouvant s’identifier à un domicile, qui est caractérisé par l’habitation effective. C’est l’habitation effective dans une commune donnée. Donc il s’agit d’une taxe qui est perçue auprès des résidents qui disposent d’un revenu au profit des collectivités.

Lefaso.net : Pourquoi une taxe de résidence ?


J-P.G. :
L’institution de la taxe de résidence par les autorités du Burkina Faso se justifie par le désir de faire participer financièrement les résidents au développement socioéconomique de leurs collectivités. Donc c’est pour permettre à chaque citoyen d’une commune donnée, de participer financièrement au développement de sa commune. C’est en vue de faciliter la mise en œuvre des programmes de développement des différentes communes au profit de leurs citoyens que cette taxe a été instituée.

Lefaso.net : Quel est l’acte juridique qui a institué la taxe de résidence ?

J-P.G. : La taxe de résidence n’est pas une taxe qui date d’aujourd’hui, c’est depuis 1992 et c’est précisément l’ordonnance 92-212/PRES du 19 mars 1992 qui l’a instituée. Et elle fait partie intégrante de nos jours, de notre Code général des impôts. C’était juste une ordonnance et les représentants du peuple que sont les députés l’ont adoptée comme loi en portant imposition de la taxe de résidence. Si au début c’était une ordonnance, aujourd’hui, la taxe de résidence fait partie des dispositions légales nationales.

Lefaso.net : Qui doit payer la taxe de résidence et comment  ?

J-P.G. : Ce sont les personnes physiques, qui disposent d’un local à titre privatif, qui soit dans une zone aménagée. Cela veut dire que dans les zones autres que celles loties ou aménagées par l’Etat, il n y a normalement pas d’imposition à la taxe de résidence. Alors pour répondre clairement à la question, je dirai qu’il faut d’abord être une personne physique, disposer ensuite d’un revenu et enfin disposer ou jouir d’un local à titre privatif dans une zone aménagée, même si vous occupez ce local gratuitement, pour être imposable ou assujetti à une taxe de résidence.

Lefaso.net : Quelles sont les structures habilitées à percevoir cette taxe ?


J-P.G. :
Les structures habilitées à la perception de la taxe de résidence sont les structures de la Direction générale des impôts (DGI). De façon plus simple, nous dirons que les personnes imposables sont tenues de se faire enregistrer auprès des services des impôts. Il s’agit pour elles de faire des déclarations de leur lieu de résidence auprès de ces structures.

Et selon la déclaration, il y a d’autres aspects qui entrent en ligne de compte, c’est-à-dire qu’il faut qu’un certain nombre de renseignements figurent sur votre déclaration. Le système au niveau de la taxe de résidence est un système déclaratif, donc on ne regarde pas par exemple l’habillement d’un individu pour lui fixer une taxe. C’est suivant les renseignements que cet individu va fournir, que sa taxe est fixée.

Lefaso.net : Comment cette taxe se calcule-t-elle ?

J-P.G. :
La loi a prévu un tableau qui donne les différents niveaux d’imposition. La taxe de résidence est calculée forfaitairement, selon le niveau de confort et la zone d’habitation dans la localité. C’est-à-dire qu’il y a deux éléments qui rentrent en jeux : la zone d’habitation dans la localité et le niveau de confort. Il s’agit donc d’un calcul forfaitaire lié à ces deux éléments.

Le confort fait allusion par exemple aux installations d’eau courante, d’électricité et bien d’autres conforts comme les piscines. Actuellement, au niveau des services des impôts, il y a un logiciel qui est établi et qui, en fonction des renseignements fournis, détermine le niveau de la taxe à imposer.

Lefaso.net : Comment se fait le recouvrement de la taxe de résidence sur le terrain ?

J-P.G. : Sur le terrain, le paiement s’effectue à deux niveaux. Il y a ceux qui viennent directement pour se faire imposer. Parmi eux, il y en a qui payent sur place, et d’autres en fonction de la somme, s’ils ne peuvent pas payer sur place, ils repartent pour revenir une autre fois. Mais la plupart d’entre ceux qui repartent, c’est lorsqu’ils auront besoin de quelque chose qu’ils le font parce qu’ils sont maintenant dans l’obligation. Le deuxième niveau, c’est ceux que nous imposons.

C’est-à-dire que l’on se rend au niveau des administrations, qu’elles soient publiques ou privées, pour déposer les imprimés que les gens remplissent et nous retournent pour imposition. Lorsque ces imprimés nous sont retournés, nous renseignons le logiciel qui fait le calcul de la taxe pour chacun, que nous retransmettons aux administrations pour les intéressés. Certains acceptent de venir payer mais la plupart ne se présente pas pour s’acquitter de leur taxe. Une procédure est engagée à l’encontre de ces derniers.

Premièrement, on fait des relances au niveau de la structure pour rappeler à ceux qui sont dans la situation de venir s’acquitter. Et faute de moyen de pression, beaucoup ne se présentent toujours pas. Deuxièmement on envoie un avis, qui dans les normes est un avis de recouvrement.
Si l’intéressé ne se présente toujours pas, on envoie un avis de mise en demeure qui est suivi enfin d’un Avis à tiers détenteur (ATD) pour qu’il retienne un montant sur le salaire de l’intéressé correspondant au montant de la taxe.
Ce sont là les deux moyens de recouvrement que nous appliquons sur le terrain. Ceux qui viennent directement et ceux vers qui nous allons.

Lefaso.net : Quelles sont les difficultés liées à la collecte de la taxe de résidence ?

J-P.G. : La principale difficulté au niveau du Burkina, c’est l’incivisme fiscal. Et il faut que les gens comprennent qu’ils doivent contribuer au développement de leurs localités et permettre à ce que l’on organise bien la société en lui fournissant efficacement des services sociaux de base. La plupart se demande ce que l’Etat fait pour eux.

Et juste pour prendre un exemple, si l’on dit que Ouagadougou est la plus belle ville, c’est parce que les gens payent leurs impôts qui permettent à ce que l’on puisse travailler à rendre la ville viable. Et il faut signaler que là aussi ceux qui viennent sont ceux qui sont obligés. La deuxième difficulté c’est le manque de moyens pour pouvoir comptabiliser toutes les personnes imposables avec le niveau réel du revenu de chacun.

Lefaso.net : Quelles sont la politique et la ressource à la disposition des impôts pour le recouvrement de cette taxe ?

J-P.G. : La politique qui est menée consiste pour le gouvernement à demander à ce qu’il y ait un enrôlement de tous les salariés burkinabè. C’est-à-dire faire une mise à jour du fichier des salariés publics et même privés. Ça, c’est la politique qui est vraiment sollicitée et demandée à la DGI pour que l’on puisse recouvrer la taxe au maximum. Quant aux ressources mises à la disposition des impôts, ce sont les moyens traditionnels de recouvrement. Il y a assez de matériels qui sont mis à notre disposition.

Je prends le cas du Centre où, à l’heure actuelle, on a mis à la disposition de presque tous les agents chargés du recouvrement de la taxe de résidence, des moyens modernes comme les ordinateurs. En plus de cela, nous avons l’appui des collectivités en termes de fournitures d’autres consommables informatiques pour mener à bien ce travail avec des frais qui sont mis à notre disposition pour cette taxe et pour d’autres services.

Comme autres actions, les impôts voient avec la commune de Ouaga par exemple pour que pour certains services à la mairie, il faut présenter la quittance de payement de sa taxe de résidence avant d’être servi. Nous espérons qu’avec le temps et la sensibilisation, tout rentrera dans l’ordre.

Lefaso.net : Les collectivités ne vous aident-elles pas avec le recensement des personnes imposables ?


J-P.G. :
Nous, nous sommes mis en place par l’Etat pour travailler à recouvrer l’impôt pour l’Etat et les collectivités territoriales. Donc nous ne pouvons pas nous adresser directement aux collectivités pour demander quoi que ce soit. Mais un recensement est en train d’être organisé et se fera dans les jours à venir pour ce qui concerne les villes de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.

Lefaso.net : Quelles sont les désagréments que peuvent subir les contribuables dans l’application de cette taxe de résidence ?

J-P.G. : Je pense que l’imposition ne peut être juste que si les résidents remplissent convenablement leurs déclarations. Moi je suis dans un immeuble avec 10 ampères et je déclare n’avoir même pas le courant. Et si l’on prend mon cas par rapport à quelqu’un qui est à Rood Woko (marché central) dans le secteur informel, qui vend peu de choses, qui n’a pas de courant à son domicile mais qui paye la même chose que moi, voire plus ; il y a là une injustice !

Donc c’est pour cela je dis que la justesse à ce niveau dépend de la justesse des déclarations que les contribuables fournissent aux impôts. Il n’y aurait pas d’injustice dans l’application si les déclarations sont faites de manière objective et sincère.

Lefaso.net : Est-ce qu’on ne peut pas déplorer un manque de communication entre les impôts et le contribuable ?

J-P.G. : Je souscris entièrement à ce que vous dites à savoir que le nerf de cette guerre c’est la communication, la sensibilisation. Je ne peux pas dire que l’administration communique suffisamment mais un grand effort est fait en matière de sensibilisation. Je prends le cas de la contribution foncière qui a été instituée en 2016.
En fin 2016, il y a eu vraiment une sensibilisation tous azimuts sur cette contribution. On est passé dans les mairies échanger avec les acteurs. Et au moment même de l’institution de cette taxe, une sensibilisation a été faite.

Mais il faut se dire que les gens aiment faire la sourde oreille et on ne peut pas réveiller quelqu’un qui ne dort pas. C’est pour dire qu’on est confronté à l’esprit d’une population qui n’est pas préparé à accepter certaines choses. Sinon je conviens avec vous qu’il faut de la communication et on la fait. Depuis 2015, on a écrit à tous les employés publics ou privés, surtout aux employeurs, pour le remplissage des fiches ; mais nous n’avons enregistré que 5% de retour de ces fiches.

Le changement de mentalité doit s’opérer. La loi nous permet de prendre les informations auprès des administrations publiques et privées et avec l’appui de la hiérarchie on pourra avoir la liste de tous les fonctionnaires du public. C’est le privé qui pose problème.

Lefaso.net : Au plan financier, qu’est-ce que cette taxe procurerait à l’Etat, si tout le monde acceptait de s’en acquitter ?

J-P.G. : Pour l’année 2018, pour la région du Centre, il est prévu de faire rentrer environ 1 700 000 000 F CFA pour la taxe de résidence, afin de permettre à la commune de réaliser ses activités pour le grand bonheur de sa population. C’est pour atteindre ce milliard 700 millions que nous menons l’opération qui ira jusqu’au 31 décembre.

Lefaso.net : La taxe de résidence se paye mensuellement ou bien c’est par année ?


J-P.G. :
C’est par année que la taxe de résidence se paye. C’est un impôt annuel. Il y a un exemple ici d’un contribuable qui doit aux impôts 20 000 F CFA pour cette année 2018, avec des arriérés de 3 ans pour un montant de 37 500F CFA, soit un total de 57 500 F. Ce dernier, nous le félicitons, a pu solder sa dette. Si les gens acceptaient de venir en janvier se faire imposer à 20 000F, ils pourront régler petit à petit et finir de payer avant la fin de l’année.

Lefaso.net : Est-ce qu’il y a un délai que vous vous êtes fixé pour recouvrer la totalité des arriérés de 2018 ?

J-P.G. : Dans le communiqué, nous avons annoncé la date du 10 novembre pour les agents du public et il s’agit des arriérés de 2017 que tous doivent régler avant cette date. Et si ce n’est pas fait, on procédera à une coupure à la source. Et déjà je puis vous rassurer qu’on a de l’affluence depuis ce communiqué. Nos guichets qui se fermaient à 14h30, vont maintenant au-delà, parfois jusqu’à 16h. Mais maintenant nous avons prolongé ce délai au mercredi 14 du même mois.

Pour ce qui concerne 2018, on donne une date butoir en fin janvier, là aussi un communiqué passera sur les bulletins des salariés pour leur demander de payer leurs impôts. Ce qui permettra aux agents du public d’être avisés aussi bien par communiqué que sur les bulletins. Et nous espérons que les gens s’exécuteront à bonne date.

Lefaso.net : Quel message avez-vous à l’endroit des populations pour les inciter à régulariser leur situation vis-à-vis des impôts ?


J-P.G. :
Le message que nous pouvons donner, c’est demander à ce que les gens se mettent à la place de nos autorités communales pour comprendre que c’est comme une famille. Il faut des ressources pour qu’elle vive. Et ces ressources ne peuvent venir d’ailleurs que des membres même de la famille. Donc il faut que chacun contribue et c’est en fonction des capacités de chacun, on ne demande pas plus.

Donc l’honnêteté dans les déclarations pour qu’on puisse demander à chacun le juste impôt. On demande aussi à ceux qui auront compris de faire passer le message aux autres, procéder donc à une sensibilisation de leur entourage. C’est également le lieu pour nous de demander à nos autorités, celles communales particulièrement de sensibiliser la population parce que leurs voies portent plus loin que celles des structures chargées de la collecte et même celle de la DGI.

Donc si elles acceptent de faire comprendre à la population l’intérêt de cette taxe, je crois que le recouvrement de cette taxe deviendrait plus facile pour les services des impôts. Et il faut miser surtout sur le civisme fiscal. Alors nous sollicitons la compréhension de nos populations et leur rappelons que si elles veulent que Ouagadougou soit toujours belle et continue à aller de l’avant, il faut leurs contributions en régularisant leur situation vis-à-vis des impôts. Les besoins des populations vont grandissants et il faut des moyens pour essayer de les contenir.

Lefaso.net : Quelles suggestions avez-vous à l’endroit du gouvernement pour que l’éducation de la population, surtout à la base, prenne en compte le volet du civisme fiscal ?


J-P.G. :
Le gouvernement, en lisant peut être votre article, se verra interpeller pour la prise en compte de cet aspect dans l’éducation à la base et dans celle non-formelle. Il faut que tous comprennent la nécessité, même dès le bas âge, de payer les impôts. Seulement le gouvernement à lui seul ne pas réussir cette tache-là.
C’est à nous même parent de soigner l’éducation que nous prodiguons à nos enfants et à notre entourage. Parce que même si on l’enseigne, si à la maison un autre exemple est montré, c’est voué à l’échec.

Entretien réalisé par Etienne Lankoandé (Stagiaire)
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