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Lettre de Ville-d’Avray : des cases de Tanzéongo à la Tour Montparnasse

Publié le vendredi 22 juillet 2005 à 07h48min

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Ce témoignage d’un premier voyage dans l’Hexagone est de notre confrère Hamidou Ouédraogo, en vacances à Paris et originaire de Tanzéongo dans la province du Sanmatenga.

Depuis le 2 juillet dernier, je séjourne au pays de "nos ancêtres les Gaulois", dans le cadre de mon congé annuel. Sans doute que bien des gens qui me connaissent se demanderont : comment a-t-il pu se payer un tel voyage ? Comme aiment à le dire les mentons velus de chez nous, "La pierre profite du haricot pour avoir l’huile". Autrement dit, à l’instar de la majorité des salariés burkinabè, c’est un privilège qu’évidemment ma bourse ne pouvait pas me permettre. Et cette opportunité, je la dois à un couple d’amis français et à des sœurs vivant en France.

Pour les formalités du voyage, muni du billet d’avion, de l’attestation d’accueil expédiée de Paris, d’une attestation de congé, d’une attestation d’assurance AGF, de ma carte d’affiliation à la CNSS, je me suis présenté au consulat de l’ambassade de France au Burkina pour le visa Schengen dont l’obtention fut plus facile que je ne m’y attendais.

Parti donc de Ouagadougou le 1er juillet 2005, c’est le lendemain au petit matin que l’avion qui me transportait s’est posé sur le tarmac de l’aéroport Charles-de-Gaulle T3. Avant de sortir de l’aéroport, tous les passagers ont fait l’objet du contrôle habituel par la police des frontières, qui consistait en la vérification des documents de voyage.

Il y avait trois files pour trois agents, deux étant réservées aux non-Européens. cette étape fut longue, en raison de la rigueur avec laquelle un des agents exécutait sa tâche. C’était d’ailleurs celui de la file dont je faisais partie. Il semblait se plaire à soumettre les passagers à un interrogatoire serré. C’est ainsi qu’il mit plus d’un quart d’heure avec un de mes compatriotes, un mangeur d’arachides, pardon un Bissa, en transit à Paris pour l’Italie.

Le policier voulait s’assurer de sa destination au sortir de l’aéroport, des moyens financiers dont il disposait pour poursuivre son voyage en Italie et patati et patata... Il mit à peu près le même temps avec le suivant immédiat du compatriote.

Une fausse impatience

La longue file de passagers qui attendaient avait commencé à s’impatienter. 10 minutes, 15 puis 20 minutes passèrent. Las d’attendre, mais aussi inquiet de ce qui pourrait m’advenir au cours de la vérification de mes pièces, je me résolus à rejoindre la seconde rangée. Mais mon inquiétude, faut-il le dire, ne se justifiait pas, puisque que je possédais, comme indiqué plus haut, tous les documents nécessaires à mon séjour en territoire français : passeport estampillé du visa, attestation d’accueil en bonne et due forme, assurance voyage, etc.

Je ne pouvais cependant m’empêcher d’imaginer la grande perte après les dépenses effectuées à cet effet, si éventuellement le contrôleur me refusait le passage. Jusqu’à preuve du contraire, me disais-je in petto, même si le policier est de mauvaise humeur, il ne cherchera pas des poux sur un crâne rasé comme le mien. Cependant, je n’avais pas le moindre euro sur moi pour prendre un taxi ni acheter un petit bidon d’eau. Mon hôte m’avait certes assuré qu’il viendrait me chercher à l’aéroport, mais, on ne sait jamais...

Contrairement donc au premier agent de police, celui de la rangée, que je venais de rejoindre, était à mon sens plus sympathique et même rapide dans le contrôle, sans pour autant manquer, bien sûr, de vigilance. Il accueillait les passagers d’un sourire accompagné d’un bonjour généreux et s’offusquait quand son interlocuteur ne lui rendait pas la politesse. "Hé monsieur, chez vous on ne répond pas au salut des autres ?", a-t-il lancé à un passager.

Enfin, c’était mon tour. Un bonjour suivi de la vérification du visa, de l’attestation d’accueil, un regard perçant sur mon visage puis sur la photo figurant sur mon passeport et sur le visa, et la question : "visite de famille ou d’amis ?". "Les deux à la fois", lui répondis-je. Sans autre forme de procès, il me tendit mon passeport tout en me souhaitant un bon séjour. La porte de l’Europe venait ainsi de s’ouvrir à moi.

Me voici chez Balzac, Gambetta, Boris Vian et les autres

Mon hôte, M. Guy Hugues, heureusement, était là et m’attendait sous le hall de la salle d’arrivée. Il m’embarqua dans sa voiture, direction Ville d’Avray, à sa résidence la Prairie, à 5 km des berges de la Seine et à 200 mètres des étangs de Ville-d’Avray, dans le département des Hauts-de-Seine (92). Un bonjour à son épouse, Micheline Hugues, et après avoir déposé mon baluchon, il me conduisit chez les miens qui habitent également Ville d’Avray.

Et pour ceux qui ne le sauraient pas, c’est dans cette commune de la banlieue parisienne qu’ont habité d’illustres personnalités comme le romancier Honoré de Balzac, qui a tenté sans succès d’y acclimater des plants d’ananas, le célèbre député Léon Gambetta qui partit en ballon en 1871 pour rejoindre le gouvernement à Bordeaux alors que Paris était assiégé par les Prussiens, l’écrivain et trompettiste de jazz, Boris Vian, Jean Rostand, le savant biologiste, Edmond Rostand le père de ce dernier qui fut poète et dramaturge, le poète Maurice Rostand, frère de Jean, le physicien Edouard Branly, le peintre du 19e siècle Jean-Baptiste Camille Corot, précurseur des impressionnistes, qui a peint les étangs de Ville d’Avray, très célèbre aux Etats-Unis.

Mon hôte, pressé qu’il est de me faire découvrir Paris et ses banlieues, ne me laissa pas le temps de me remettre de mes courbatures consécutives au voyage. En effet, il fit escale en chemin, pour me montrer les anciennes installations de Renault qui sont actuellement en démolition et le pont qui reliait les chaînes de l’unité industrielle, installées sur l’île Seguin, aux autres bâtiments sur la rive opposée de la Seine ; les abris en bordure de la Seine qui ont servi de refuge aux ouvriers pendant la deuxième Guerre Mondiale lorsque les Américains venaient bombarder les installations de Renault dans les années 1940.

Des travaux de reconquête des berges en vue de l’amélioration de la qualité des eaux de la Seine par la plantation de plus de 3 000 roseaux pour permettre à la faune de trouver un havre de paix y sont en cours. C’est donc par cette visite que mon hôte m’a accueilli. Un rappel :

c’est de l’usine Renault qu’est partie l’histoire des congés payés dont jouissent jusqu’à vos jours les travailleurs salariés. Et chaque fois que les employés de l’unité menaçaient de se mettre en grève toute la France tremblait. D’où l’expression : "Quand Renault s’enrhume la France éternue".

Le deuxième jour de mon arrivée, une de mes sœurs, son mari franco-portugais et un de leurs amis m’ont emmené au Château de Versailles pour me faire contempler ce palais royal, extension d’un rendez-vous de chasse de Louis XIII et dû à la volonté de Louis XIV ainsi que ses prestigieux jardins et plans d’eau dessinés par le nôtre.

Cela n’est qu’un avant-goût, car, en attendant d’y retourner pour une visite approfondie, mon hôte m’a conduit les jours suivants à l’Hôtel national des Invalides, à la Bibliothèque nationale François Mitterrand ; nous avons eu à effectuer des excursions à Evreux, à Lyon ;

j’ai également eu droit à une vue panoramique de Paris à partir de la Tour Montparnasse. J’y reviendrai dans certains détails, mais d’ores et déjà, au-delà des monuments historiques de la France que j’ai pu voir sur mon parcours, à l’attention de ceux qui se plaisent à vanter l’hospitalité burkinabè ou africaine en général, cette valeur n’est pas seulement propre à notre pays ou à notre continent. Elle est aussi française.

De Ville-d’Avray (France)

Hamidou Ouédraogo
L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 22 juillet 2005 à 11:36 En réponse à : > Lettre de Ville-d’Avray : des cases de Tanzéongo à la Tour Montparnasse

    Cher frere Ouedraogo,

    Je suis bien content de votre enthousiasme pour avoir foule le sol francais et europeen. Cependant, je le crois assez niais. Les amis francais, de bonnes gens de France, il y en a et Dieu merci. Quant a la politique, la culture elle-meme avec ses Balzac, Voltaire, ..., la meme qui a depossede nos grand-parents (et nous aujourd’hui) de certaines de nos ressources, avec le mepris en sus, cette culture donc serait a louer avec reserve. Cette culture a toujours eu cette politique d’inviter des freres et soeurs dans le but de les emerveiller et que ces derniers puissent louer cette difference (Tour Montparnasse # case) d’avec nos pays qu’ils ont suces et continue de le faire par l’intermediaire de nos roitelets. Voila qu’aujourd’hui, il est difficile pour vous et moi de pouvoir louer nos griots, nobles guerriers aussi bien chez nous qu’a l’exterieur. Triste !
    Je trouve que le titre de votre article montre un complexe d’inferiorite qui habite en beaucoup d’entre nous et je crois que c’est seule la mort de ce complexe qui nous liberera pour notre propre construction comme chez les Asiatiques.
    La tour Monparnasse est aujourd’hui affectee par le plomb et est en partie videe de ses occupants. J’espere que vous n’y etes pas reste pendant de longues heures. Au moins, nos cases ne souffriraient jamais de ces poisons qu’on retrouve dans nombre de batiments d’ailleurs, causes de maladies cancereuses.
    Merci et bon retour a la maison :"There is nothing like home".

    • Le 22 juillet 2005 à 13:04 En réponse à : > Lettre de Ville-d’Avray : des cases de Tanzéongo à la Tour Montparnasse

      A lire de plus pres, on se demande pourquoi l’auteur de cette lettre exalte le service des visas de l’ambassade de France au Burkina (service tant decrie pour son mepris vis-a-vis du demandeur de visa) et des services d’immigration en France. Y a-t-il eu un sponsoring quelque part ?

    • Le 10 mai 2008 à 14:37, par Aboubakar En réponse à : > Lettre de Ville-d’Avray : des cases de Tanzéongo à la Tour Montparnasse

      J’ai l’impression que le signataire du message ci-dessus juge mal l’auteur de l’article. Si vous saviez que qu’il aime bien ses cases de Tanzéongo. Ceux qui le connaissent lui fait le reproche d’être conservateur même jusqu’à ses habitudes alimentaires. N’essayez surtout pas de dévaloriser une culture de chez lui, même de l’ethnie à laquelle il n’appartient pas. Il vous sortira ses griffes pour défendre la valeur culturelle de son pays. C’est un vrai militant de l’intégration des ethnies de son peuple.
      Mais soit dit en passant, vous avez fait un bon commentaire composé sur sa livraison même si le contenu me semble n’est pas réfleter la réalité. Tenez-vous bien, je ne suis pas un avocat du diable. Cherchez à connaître l’intéressé et vous lui ferai votre mea culpa !

  • Le 11 août 2005 à 21:07 En réponse à : > Lettre de Ville-d’Avray : des cases de Tanzéongo à la Tour Montparnasse

    Pour avoir eu l’occasion de mettre les pieds dans votre lieu de villegiature et pour y avoir été pour un bout de temps, je puis vous dire que l’hospitalité que vous louez est peut-etre imaginaire. Vous ne vous en revenez peut-etre pas d’etre dans l’Hexagone, sinon vous ne sauriez trouver la France plus hospitaliere que le Burkina. Restez-y deux mois, six mois, et essayer d’y trouver un emploi. Vous saurez que c’est toujours erroné d’apprecier dans la precipitation. Leurs sourires ne sont pas des sourires. Vous n’etes qu’un envahisseur en leurs yeux, une menace pour leur niveau de vie. Pourquoi sur l’une des files a l’aeroport cet agent de controle gardait constamment l’air menacant ?
    Vous etes journalistes, ouvrez bien l’oeil et observez. A votre retour, vous aurez peut-etre un recit different a nous raconter. Si cela ne vous arrive pas, ce serait arrivé a un frere black. Bon sejour et soyez vigilant.

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