Avant d’être investi de la confiance du chef de l’Etat pour occuper cette fonction, il a d’abord servi au ministère du commerce, et a été ensuite, pendant 7 ans, le conseiller économique et commercial à l’ambassade du Burkina en France.

Rappelé au pays comme secrétaire général du ministère de l’environnement et de l’eau, M. Niodogo fut aussi député à l’assemblée nationale (où il exerça plusieurs fonctions et missions parlementaires comme vice président de l’assemblée nationale, 2ème questeur, membre du comité interparlementaire de l’UEMEOA).

Malgré les nombreuses occupations et un calendrier très chargé, l’ambassadeur Niodogo a accepté de répondre aux questions de Lefaso.net.

Lefaso.net : On dit que vous l’un des rares ambassadeurs africains en Allemagne faciles à approcher, qui n’hésite pas malgré votre emploi du temps chargé de rendre visite aux burkinabé à domicile, et le plus souvent d’honorer les invitations envoyées par ceux ci.

SEM. Xavier Niodogo : Je ne sais pas si je suis l’un des seuls qui fait cela mais il est de mon devoir en tant qu’ambassadeur d’être auprès et à l’écoute de mes compatriotes. Je trouve aussi important, chaleureux et fraternel de ne pas seulement les entendre de mon bureau mais aussi de les rencontrer, discuter avec eux dans leur atmosphère quotidienne même s’il me paraît impossible de les voir tous à domicile et de partager certaines manifestations avec eux. Cela fait partie aussi d’une des valeurs africaines que nous devrions préserver même vivant à l’extérieur.

Lefaso.net : Si vous avez un mot à l’endroit des burkinabé vivant en Allemagne et ceux qui désirent immigrer ici, que diriez vous ?

SEM. Xavier Niodogo : L’une des priorités, c’est d’être en règle vis à vis des autorités allemandes. Nous sommes parfois interpellés sur de nombreuses questions de carte de séjour, mais cela ne relève pas de notre autorité. Au-delà de cela, il est reconnu que les Burkinabè font partie des immigrés ici qui se comportent beaucoup mieux ; c’est pourquoi je les encourage à continuer à honorer l’image de notre pays et surtout à chercher à mieux s’intégrer car nous sommes conscients des difficultés de la vie à l’étranger.

Lefaso.net : Nombreux sont les burkinabè vivant en Allemagne qui se plaignent des difficultés rencontrées pour le renouvellement de leur passeport et d’autres dossiers à partir de l’ambassade, quelles sont les mesures prises pour résoudre ce problème ?

SEM. Xavier Niodogo : Des difficultés évoquées, je pourrais aussi ajouter celle de la répudiation de la nationalité burkinabè. Ce sont les deux services les plus demandés au sein de l’ambassade. Dans le temps, les ambassades avaient la possibilité de proroger les passeports une fois et le renouvellement n’est possible qu’au pays. Avec les nouveaux passeports, nous n’avons plus droit aux prorogations et pour tout renouvellement les passeports doivent être acheminés au Burkina par valise diplomatique. Cela demande du temps car ils sont d’abord traités ici sur place avant d’être acheminés au service de la sécurité intérieure à travers notre ministère des affaires étrangères.

Au retour, le même chemin doit être suivi jusqu’à Berlin avant que le titulaire, quel que soit le lieu où il se trouve, vienne le chercher à nos bureaux car pour des conséquences précédentes et fâcheuses, nous ne les envoyons plus par la poste.

Nombreux sont les compatriotes qui aspirent à la nationalité allemande, mais selon la loi du pays il faudrait rejeter sa nationalité d’origine car la double nationalité n’est pas reconnue. Une chose que nous ne réfutons pas vus les avantages que cela leur apporte et qui est de leur plein droit d’opter pour la nationalité souhaitée.

Pour obtenir l’autorisation de répudiation, le dossier suit le même chemin que celui du passeport mais cette fois il doit être fait au ministère de la justice.

Depuis la visite du chef de l’Etat, il existe une mesure qui permet d’accélérer la procédure. Nous n’avons plus besoin du passeport original mais de la photocopie. Le dossier est envoyé au service de la sécurité ou ministère de la justice de notre pays à travers le conseil des Burkinabè de l’étranger qui est chargé du suivi. Depuis lors, nous recevons moins de plaintes de la part de nos compatriotes à ce niveau.

Lefaso.net : De la France à la Belgique en passant par le Canada, il existe des événements culturels qui permettent de montrer les potentialités de notre pays, peut-on attendre de tels événements ici en Allemagne où notre pays paraît inconnu ?

S.E.M. Xavier Niodogo : Je trouve votre question très pertinente. Comme je l’ai déjà souligné, l’une de nos missions est de rendre le Burkina Faso plus visible et de renforcer la coopération notamment économique, commerciale et culturelle. La culture constitue l’un des volets par lequel les échanges se font beaucoup promptement, avec plus d’aisance et plus durablement.

Notre souhait est d’arriver à mettre en place ici en Allemagne des manifestations culturelles ou économiques pour montrer d’une part la richesse de notre pays et d’autre part son foisonnement et son développement au sein de notre société. Cela était prévu pour 2005 mais elles se sont avérées trop justes selon nos partenaires locaux et nous espérons les organiser courant 2006.

L’une des entraves de cette organisation, contrairement à d’autres ambassades en France, Belgique ou le Canada, est la barrière linguistique. Nous pourrions la franchir mais elle nous coûtera en efforts humains et surtout financiers. Nous sommes néanmoins en discussion avec nos partenaires locaux comme Afrika Verein qui est une association d’hommes allemands qui sont beaucoup plus tournés vers les pays anglophones et du Maghreb afin de les convaincre du succès de ce projet que nous tenons tant à mettre sur pied.

Nous sommes le plus souvent visibles à travers des évènements organisés par des villes allemandes jumelées à celles de notre pays. Ce fut le cas de celle de Garango et d’une ville au sud de l’Allemagne ou une œuvre du sculpteur Bamabara d’une hauteur de 2 mètres à été installée à une place de la ville allemande au nom de la ville de Garango. Cela est une première dans l’histoire des jumelages.

Dès la première semaine du mois de juillet à Bad Boll, il a eu un séminaire sur l’éducation en Afrique surtout au Burkina durant lequel de nombreux invités sont venus du pays. Nous apportons nos encouragements à des compagnies ou groupes culturels de passage en Allemagne d’une part et essayons de leur trouver aussi des contrats d’autre part.

Lefaso.net : Actuellement l’Europe qui se tourne vers les pays de l’Est traverse d’énormes difficultés avec le non voté en France et en Hollande suivi du désaccord de la signature du budget. Cette situation pourrait-elle jouer négativement sur les aides au développement aux pays africains ?

S.E.M. Xavier Niodogo : Cette situation que traverse l’Europe est une crise logique car elle s’inscrit dans le cadre de sa croissance. Notre souhait est qu’elle ne perdure pas sinon les budgets alloués au développement de l’Afrique se trouveraient réduits. Ce sont des analyses dont nous devons tenir compte mais en espérant qu’elles ne se produisent pas.

L’Union africaine a besoin d’un partenariat plus poussé, plus suivi avec l’Union européenne pour pouvoir l’accompagner dans ses missions du maintien de la paix. Nous avons des hommes pour cela et pour leur efficacité les moyens financiers et logistiques sont nécessaires.

Lefaso.net : Bientôt ce sont les élections présidentielles au Burkina Faso, les Burkinabè d’Allemagne auront-ils la chance cette fois-ci de participer au scrutin ?

S.E.M. Xavier Niodogo : Il serait étonnant que les Burkinabè résidant ici puissent participer à ce devoir patriotique qui est de choisir leur président au scrutin de 2005. Il revient au code électoral de prendre des dispositions juridiques eu égard la faisabilité ici en Allemagne ; ce qui n’est pas encore fait à ma connaissance.

Par contre ceux qui auront la chance d’être au pays à une semaine avant les élections pourraient s’inscrire sur les listes électorales et voter. Notre souhait est que pour les élections à venir tout Burkinabé de l’étranger puisse poser cet acte patriotique.

Lefaso.net : Lisez-vous lefaso.net ?

S.E.M. Xavier Niodogo : Je me réjouis qu’il existe un tel site d’information sur Burkina et à l’étranger. Sa mise à jour régulier nous permet d’avoir des informations fraîches et bien analysées de notre pays et celles d’ailleurs ce qui nous permet d’avancer dans notre travail. Je félicite les responsables et les artisans de ce projet.

Interview réalisée par Alex Moussa Sawadogo,
Berlin, Allemagne
Lefaso.net