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« A-t-on le droit de traiter de la sorte notre Ministère de la Culture ? », Télesphore T. Bationo de la société civile culturelle

Publié le jeudi 30 août 2018 à 13h56min

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« A-t-on le droit de traiter de la sorte notre Ministère de la Culture ? », Télesphore T. Bationo de la société civile culturelle

Ceci est une tribune de Télesphore T. Bationo, une figure bien connue dans le monde de la culture burkinabè, membre de la société civile cultuelle. Dans cette réflexion sous fond d’un refus à la résignation, l’acteur culturel plonge dans la gestion politique du Ministère de la culture, des Arts et du tourisme.

QUEL TITRE ?

Je porte en mon sein, une grossesse amère. Il faut que j’accouche ! Mais, de quel nom vais-je baptiser mon bébé ? Oui, quel titre vais-je donner au fruit de la réflexion qui jaillira de mes entrailles ? J’accuse ? Comme Emile Zola ? Mystère et boule de gomme.

Mais, tant pis. J’accouche quand même.

Tous ceux qui verront l’enfant lui attribueront un nom, selon leur objective subjectivité.

J’accouche, comme toute femme en gésine, d’abord pour me délivrer ; et offrir à la vie et au monde, un fruit d’entrailles dont le sort, le destin, la trajectoire, et l’appréciation qu’on en fera, ne dépendent nullement du géniteur, mais du milieu dans lequel tombera et se transformera ce fruit de la douleur.

C’est dire que j’accouche pour me soulager ; et pour l’histoire.
J’accouche de ma douleur pelvienne. Oui, j’ai très mal ! Mal en la culture de mon politique. Mal en la Culture de mon pays tout court. Mal en la monnaie de change et en l’objet d’échange auxquels, elle est réduite. Mal de voir un patrimoine si précieux devenir le quasi-otage d’enjeux de bas étage, comme le partage d’un gâteau de victoire, ou le vil marchandage de compromissions et de positionnements politiques.

J’ai mal que notre Culture, objet et sujet de notre identité, fondatrice de notre souveraineté, soit désormais la chasse gardée d’une entité partisane du paysage politique de notre pays, qui La réduit en terrain, en piste d’expérimentation de décollage et de vol dans le ciel socio-politique national et international, d’une part, La transforme en rampe de lancement de météorites et comètes dont le propre est de passer très vite, pour ensuite s’évanouir dans le cosmos insondable, d’autre part.
Notre Culture mérite mieux, de mon modeste point de vue, et doit verser des larmes de honte et d’ulcération, de se voir ainsi traitée, ravalée, confinée.

Elle pense certainement tout bas, et Elle a raison, qu’Elle mérite mieux que ce sort infâme qu’on Lui a jeté, et ce rôle de centre d’apprentissage aux métiers de conquête de l’espace politique et de promotion de l’implantation et de la visibilité d’un parti politique, qu’on Lui a assigné.

Je viens accoucher de la douleur de ces larmes amères qui coulent et inondent mes entrailles.

Intellectuels affranchis, artistes libres, hommes et femmes de culture indépendants, société civile conséquente, personnes de bonne volonté, éprises de la sincère et véritable promotion de notre Culture nationale, allons-nous nous taire et laisser faire ?

A-t-on le droit de traiter de la sorte notre Ministère de la Culture ? Pourquoi la société civile culturelle s’est-elle dressée en 2014 contre la nomination de Monsieur Sagnon à la tête du Ministère de la Culture ? Il y avait des raisons liées à des considérations d’ordre éthique et moral. Pourquoi le Ministre des Infrastructures d’alors, Monsieur Guiguemdé, a-t-il été contesté et contraint à la démission ? C’est, me semble-t-il, pour les mêmes raisons éthiques et morales.

Le fait, pour un parti au pouvoir, de monnayer le soutien d’un autre parti, dans la gestion du pouvoir d’Etat, en lui offrant en échange la quasi propriété du Ministère de la Culture où ce parti récompensé, procède à des expérimentations aussi instables que douteuses est-il, du point de vue de l’éthique et de la morale, acceptable ? Ceci représente-t-il le meilleur choix pour la meilleure promotion de nos Arts et de notre Culture ? Je pense humblement que non.

Alors, j’accouche ! Et mon enfant, amer nouveau-né, appelle à la réflexion et à la réaction responsable, démocratique, et pacifique.

Si nous ne sommes pas satisfaits d’une situation de gouvernance, nous avons le droit et la possibilité de l’exprimer et d’énoncer des propositions susceptibles de porter amélioration à la situation décriée.

Le Ministère de la Culture, chasse gardée du PAREN, qui y nomme des Ministres qui étaient chômeurs et qui y défait tout ceux qu’il considère ayant trahi ou déçu, n’est pas le sort que mérite ce Département noble, qui est la vitrine et le porte étendard de notre identité, de nos valeurs, de nos créativités et de notre ciment communautaire et national.

Quel titre ?

J’accuse, de Zola, si vous partagez ma douleur et épousez mon argumentaire.
Mais si vous rejetez le fruit de mes entrailles.

Alors, pour qu’il porte bien son nom, reniez-le, flagellez-le, et crucifiez-le.
Je l’ai dit, le nom de baptême de l’enfant qui vient de naître, est laissé aux bons soins de votre objective subjectivité.

Télesphore T. BATIONO
Membre de la société civile culturelle

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Vos commentaires

  • Le 30 août 2018 à 19:47, par Barthélemy Akouwandambou En réponse à : « A-t-on le droit de traiter de la sorte notre Ministère de la Culture ? », Télesphore T. Bationo de la société civile culturelle

    Télésphore Bationo vient d’accoucher d’un bébé qui, en réalité, était dans le ventre de plusieurs personnes dont le mien. En effet, il me semble complètement aberrant d’attribuer les départements ministériels à des partis politiques en récompense de leur soutien. Le cas du Ministère de la Culture, par exemple, est pathétique. Attribué au PAREN pour les raisons qu’on connaît, ce dernier n’entend pas mettre en oeuvre sa propre politique culturelle parce que, selon Laurent Bado, les conditions ne sont pas réunies pour ce faire. En conséquence, le PAREN se contente d’appliquer le programme du MPP décliné dans le PNDES. Sauf que Barry ne faisait jamais allusion au PNDES, Issouf Sawadogo n’a pas eu le temps de s’asseoir et SANGO semble chercher ses marques dans un milieu qu’il connaît très peu. D’où la question de fond : "A-t-on le droit de DONNER un ministère à un parti politique même si ce dernier ne possède pas les compétences nécessaires pour diriger ce département ?". Je pense que non ! Il faudrait donc arrêter de distribuer les ministères comme des arachides sous prétexte que ce sont des postes politiques. Télésphore, je propose que ton bébé s’appelle "Quittez dans ça" !

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