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Me Halidou Ouédraogo, président de l’association des parents des victimes du crash d’Air Algérie : « Nous voulons que le Mali nous rende les restes de nos parents morts dans l’accident »

Publié le mercredi 29 juillet 2015 à 09h08min

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Me Halidou Ouédraogo, président de l’association des parents des victimes du crash d’Air Algérie : « Nous voulons que le Mali nous rende les restes de nos parents morts dans l’accident »

Les parents des victimes du crash d’Air Algérie ont commémoré le vendredi 24 juillet dernier le premier anniversaire de ce drame aérien qui a causé la mort de 116 personnes de quinze nationalités différentes. Un an après le crash, les parents des victimes attendent toujours des restes des victimes bloqués au Mali. Dans cette interview, Me Halidou Ouédraogo, président de l’Association des parents des victimes, fait le point des actions menées et les attentes des membres de l’association.

Lefaso.net : Vous êtes le président de l’Association des parents des victimes du crash d’Air Alger. Ça fait un an que le drame s’est produit, comment avez-vous vécu ce temps ?

Me Halidou Ouédraogo : Pour être honnête, je l’ai vécu très difficilement. Parce que c’était un accident inédit puis qu’on n’avait jamais connu cela dans notre pays. Il y a eu deux cas similaires. Il y a eu le crash de Linoghin et celui de l’hélicoptère. Dans les deux cas, il y a eu des survivants. Mais là, il s’agissait d’un avion de ligne AH5017 qui transportait 116 personnes qui a crashé dans des conditions effroyables. Aucun survivant. Il a fallu chercher les causes de l’accident, consoler les familles, les aider à rassembler les documents pour faire valoir leurs droits, leur trouver des avocats et voir comment on pouvait les soulager. Nous avons donc créé l’association et nous avons fait face aux assurances, à la compagnie, aux différents acteurs au Burkina, au Mali et à Paris. Il y a eu 28 Burkinabè, 58 Français, en somme des ressortissants de quinze nationalités qui ont perdu la vie dans ce crash. Donc c’était très difficile. Au début, on nous disait que tout avait été pulvérisé et liquéfié. Nous avons mené un combat afin qu’on reconstitue les restes et qu’on nous les rende. On a pu inhumer nos proches le 20 janvier dernier mais il y a des restes non identifiés posés à Gao qu’on avait promis de nous restituer et que le gouvernement malien refuse maintenant de nous les rendre.

Pour quelle raison ?

La bêtise humaine. Il n’y a pas de raison. C’est en fait une double disparition. Puisqu’il y a des restes. Même si c’est non identifiable, on sait que ça provient du crash d’Air Algérie. Les parents veulent inhumer ça sous la stèle érigée à la mémoire des victimes à Ouagadougou, lieu de départ des victimes. Ils ont quelle convention pour nous les refuser ? Ils n’ont pas de justification.

Juste après l’accident, un comité de crise a été mis sur pieds. Il travaille depuis un an. Etes-vous satisfait du travail qui est fait ?

On ne peut pas dire autre chose. Parce que le président du Comité de crise, le Général Gilbert Djiendéré, et son équipe ont vraiment assisté les parents. Leur rôle a été réduit à cela. Ils s’en sont occupés. Ils ont répondu à nos questions. L’équipe qui était aussi composée de psychiatres et de psychologues a rendu visite aux familles en peine, désorientées, désarticulées, anéanties même. Ils ont aidé à identifier les voies de pansement des différentes plaies. Nous sommes satisfaits de la manière dont le comité de crise nous a accompagnés. Mais nous ne sommes pas satisfaits de l’enquête qui a été confiée au Bureau d’enquête et d’analyse (BEA). Ils ont voulu justifier le crash alors qu’il fallait dire ce qui s’était passé. Jusqu’au moment où je vous parle, il y a un début de solution qui a transpiré des enquêtes complémentaires des juges d’instruction saisis à cet effet en France. Puis qu’ils disent que l’avion a connu un givrage qui a pesé sur le moteur et les ailes, qui a obstrué certains appareils de l’avion si bien que ç’a provoqué le crash. Mais quand un avion est bien équipé, il y a des antigivreurs. Cela est prouvé. On a relevé beaucoup d’anomalies : absence de boîte noire, fatigue extrême de l’équipage, déviation de trajectoire, les dissimulations. Il a même fallu lutter pour avoir les restes de nos parents. Un certain nombre de choses comme cela ont fait qu’on n’était pas content et qu’en fait la vérité n’a pas été dite.

En affirmant que la vérité n’a pas été dite, pensez-vous que quelqu’un aurait expressément provoqué le crash ?

Il y a déjà l’erreur humaine. Quand l’équipage est fatigué, il ne peut plus conduire l’appareil. Il aurait été recommandé de ne pas prendre l’envol et de se reposer. Il fallait accéder à la requête de l’équipage qui demandait à se reposer. Il y a déjà une faute à ce niveau. Sans compter les défauts mécaniques dont j’ai fait cas et que les juridictions se chargeront d’approfondir.

Visiblement il reste encore beaucoup à faire afin que la vérité éclate. Quelle sera la suite de la lutte ?

Nous voulons les restes non identifiables de nos proches. Nous voulons achever la stèle dont les travaux de construction ont été lancés, saisir les juridictions dans tous les pays. C’est déjà fait à Ouagadougou, à Paris, au Canada. Ce sera aussi fait en Espagne et à San Francisco pour plusieurs raisons. L’avion était de marque américaines (Douglas). A ce qui nous a été dit, il y avait un défaut de moteur. Nous allons donc nous interroger devant ces juridictions. Bref ! Il y a une série de procédures à mener et une série d’ouvrages à achever. Nous avons encore beaucoup à faire.

Je remercie la presse qui nous a beaucoup accompagnés. Je remercie aussi la population, les autorités gouvernementales des différents pays impliqués : Burkina, France. J’avais commencé à remercier le Mali dont je pensais être mon pays mais je retire mes remerciements. Ils ne sont pas gentils. C’est ce que je pense.

Propos recueillis par Jacques Théodore Balima
Lefaso.net

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