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Côte d’Ivoire : Un Burkinabè chez les "patriotes" de Blé Goudé

Publié le mercredi 29 décembre 2004 à 07h12min

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Du 17 au 19 décembre dernier, Abidjan a abrité le 2e congrès panafricain des jeunes leaders. La présence de Issouf Kabré, Secrétaire national à la jeunesse fut remarquée, avec notamment le reportage de la RTI.

Qu’est-il allé faire dans une rencontre en grande partie organisée par les jeunes patriotes et parrainée par le président Laurent Gbagbo ? M. Kabré répond.

Le Pays : Vous étiez récemment à Abidjan où vous avez pris part au titre de l’UNDD (Union nationale pour la démocratie et le développement) à un forum de jeunes. De quoi s’agissait-il ?

Issouf Kabré : Il s’agissait d’un congrès panafricain de jeunes leaders qui a regroupé près de 17 pays dont le Burkina Faso qui a été invité sous la bannière de l’UNDD. Je suis donc allé représenter le Burkina et mon parti à cette rencontre. Nous nous sommes dit que chaque fois qu’il y a la possibilité pour les jeunes africains de se rencontrer pour discuter autour de l’avenir de l’Afrique, il n’y a pas à hésiter et nous n’avons pas hésité pour y participer. Le thème portait sur les relations entre les ex-puissances et l’Afrique. La problématique était de savoir s’il s’agissait d’une recolonisation ou de rapports d’Etat à Etat. Et quand on voit un thème pareil, je pense que vous savez que l’UNDD est un parti de fédération, un parti qui oeuvre beaucoup à l’union de l’Afrique.

A quoi est-ce que vous avez abouti ? Des résultats concrets sont-ils sortis de ces assises ?

Durant 3 jours, d’imminentes personnalités sont venues nous entretenir des relations entre la métropole (les ex-colonisateurs) et l’Afrique spécifiquement sur des situations concrètes comme le cas de la Côte d’Ivoire où la France et d’autres pays interviennent. On a su de quoi il s’agissait et les résolutions sont très intéressantes. Même si elles ne peuvent pas avoir un impact immédiat, il faut se dire qu’il y a une prise de conscience et nous travaillons à cela. Travailler pour la prise de conscience des jeunes pour qu’on ne retombe pas dans une recolonisation. Il est inacceptable pour nous de nous soumettre à la volonté du colon. Ce sera un tort que les jeunes causeront pour l’avenir de l’Afrique. Et nous avons abouti à pas mal de résolutions, surtout à une prise de conscience.

N’est-ce pas mal indiqué pour un Burkinabè, aujourd’hui, quel, que soit l’intérêt de la manifestation, de participer à un forum organisé et financé par le pouvoir ivoirien ?

Je ne sais pas si c’est organisé et financé par le pouvoir ivoirien. C’est le 2e forum du genre. Il s’est tenu l’année passée et je pense qu’à partir de l’année prochaine, ce ne sera même plus en Côte d’Ivoire qu’il se tiendra , étant donné qu’il est tournant. Ce forum pourra se tenir peut-être au Burkina ou au Togo. Le problème pour nous, ce n’est pas que le forum soit organisé par la Côte d’Ivoire, l’essentiel est qu’il soit organisé par l’Afrique. La source de financement importe peu. L’idée est géniale et c’est ce qui est important.

Nous avons des frères burkinabè qui sont en Côte d’Ivoire. Quand nous y sommes allés, nous avons rencontré les jeunes patriotes, notamment leurs responsables. Nous avons visité trois villages burkinabè, rencontré des étudiants congolais, guinéens. Nous avons discuté et nous avons même donné nos points de vue par rapport à l’attitude des jeunes patriotes vis-à-vis des étrangers. Et je pense que ça c’est un plus au lieu de les isoler, de les pousser chaque fois à aller à l’extrême. Pourquoi ne pas discuter avec eux pour trouver un terrain d’entente pour que la situation puisse s’améliorer ?
C’est ce que nous avons fait et je pense que c’est la meilleure voie pour sortir de cette crise ivoirienne.

Avez-vous osé dire à Blé Goudé que sa politique est xénophobe, que les manifestations qu’il organise sont de nature xénophobe et qu’elles sont décriées ?

Je ne suis pas sûr que nous ayons les mêmes points de vue. Je ne trouve pas sa politique xénophobe, je me permets d’analyser, d’aller au fond, de voir pourquoi il agit ainsi, pourquoi les jeunes marchent, avant de porter un jugement. Je suis allé, j’ai vu et je pense que ça me permet de prendre position.

Un Français qui était là, M. Bailly, a dit bien que ce qu’il recevait comme informations autour de ce qui se passe en Côte d’Ivoire est aux antipodes de ce qu’il est venu voir. Et c’est vrai que par rapport à la situation, la version qu’on nous donne n’est pas toujours juste. Bien sûr, dans mon premier discours, j’ai bien dit que nous ne sommes allé pas pour prendre position pour Laurent Gbagbo ou pour les rebelles. Ce n’était pas notre intention. Nous sommes parti pour discuter d’abord de ce qui nous intéressait notamment l’intervention de la France qui n’est pas tolérable par aucun Africain aujourd’hui. Ensuite, il fallait voir aussi comment était la politique de Laurent Gbagbo, des jeunes patriotes. Et nous l’avons vue et je pense que même s’il y avait des errements avant, il y a un grand changement. On ne peut demander à un homme que de changer positivement. S’il le fait, il faut l’encourager.

En allant à la rencontre des jeunes patriotes, quelle image gardez-vous d’eux et de leur leader Blé Goudé ?

Pour moi, ce qui est intéressant, c’est la mobilisation. Même si vous êtes ennemi de ce pays, il faut reconnaître que quand des jeunes sortent les mains nues et se postent devant des gens qui tirent, des chars, des fusils qui tirent, pour la défense de leur patrie, c’est d’abord des gens courageux et patriotes comme ils se nomment eux-mêmes. Je leur ai même demandé de continuer la lutte. Ils se battent pour que la Côte d’Ivoire soit libérée. Et je pense que la lutte est longue. Nous leur avons demandé qu’il ne soit plus question que la différence ne soit pas acceptée. Je vous dis que le ministre ivoirien de Finances (Paul Bohoun Bouabré, ndlr) est venu intervenir au forum sur le thème "Respect de l’autre, de l’étranger, du bien commun, du bien des autres" et il a demandé aux patriotes "d’extirper de leurs rangs ceux qui pillent et qui bastonnent les étrangers parce que ce ne sont pas des patriotes". Parce que le vrai patriote, selon lui, doit savoir que l’Afrique reste une et indivisible. Donc, je pense que eux-mêmes ils le comprennent , si un ministre qui est traité de très proche de Gbagbo le dit devant les patriotes avec des applaudissements nourris, je pense qu’il y a une prise de conscience.

Vous ne croyez donc avoir pactisé le diable en vous rendant à Abidjan à ce forum ?

Moi, je n’ai pas de diable en Afrique. Le président de mon parti, Me Hermann Yaméogo est venu, on a vu ce qui s’est passé autour. Mais je pense que les gens ne doivent pas avoir des analyses déplacées, malsaines. Beaucoup parlent de diable alors qu’ils pactisent tous les jours que Dieu fait avec le diable. Moi, je n’ai pas de diable en Afrique. Je suis allé voir des frères pour qu’on s’aide à sortir l’Afrique du bourbier et ne pas se replonger dans une nouvelle colonisation. C’est ce qui nous intéresse le plus. Et je pense que l’histoire donne toujours raison à ceux qui luttent justement.

N’empêche que vous semblez apporter une caution au pouvoir ivoirien parce que le président Gbagbo y tenait. Il a même participé à l’ouverture du forum qui a été très médiatisé. Ce qui montre qu’il s’agit d’une bonne affaire pour le pouvoir ivoirien.

Moi, je pense plutôt que c’est parce qu’il aime l’Afrique que nous sommes allés le défendre. Je vous ai dit que le forum peut se tenir l’année prochaine au Burkina, si le président qui sera là en 2005, accepte de nous recevoir en tant que jeunes parce qu’on tient un congrès panafricain contre la recolonisation de l’Afrique. Vous croyez qu’au temps de Sankara un tel forum ici n’aurait pas été médiatisé ? Je pense que ce genre de sommet existe un peu partout. Il a existé avec tous les présidents panafricanistes. Si le président Gbagbo a accepté notre invitation, c’est génial et il faut le féliciter.

Etes-vous prêts à aller en zone rebelle pour un tel sommet ?

Avec plaisir. S’il y a une invitation, je ne vois pas pourquoi nous allons refuser. Je vous ai dit que nous ne sommes pas parti pour prendre position. Nous sommes parti pour discuter de l’avenir de l’Afrique. Nous avons vu et assisté des mères qui pleuraient parce que leurs enfants ont été décapités par des chars français, par des tirs de militaires français. Aujourd’hui, c’est inadmissible quelle que soit la situation qu’on accepte que l’ex-colonisateur revienne s’installer dans nos pays et se mette à agir ainsi. Ce sont des rapports d’Etat à Etat qu’on traite aujourd’hui et non de colonisateur à colonisé ou de super-Etat à sous-Etat. Je pense que nous devrons oeuvrer à combattre cela et les ex-puissances, notamment la France, doivent savoir qu’elles doivent s’en aller. Je préfère donner caution au pouvoir de Gbagbo que d’aider la France à se réinstaller en Afrique.

Vous gardez donc un bon souvenir de cette rencontre et l’assurance que dorénavant les jeunesses burkinabè et ivoirienne peuvent se mettre ensemble pour sceller la paix.

Ce que nous avons fait en 3 jours à Abidjan dépasse peut-être toutes les négociations qui ont été menées depuis lors. Parce que comme je vous disais, j’ai visité des villages burkinabè et des problèmes m’ont été exposés. Nous avons exposé ces problèmes aux patriotes. J’ai rencontré trois groupes d’étudiants qui se plaignent du comportement des patriotes. Et nous avons rencontré ensemble Blé Goudé et le bureau qui gère les patriotes. Ils reconnaissent qu’il y a eu des errements comme cela peut arriver dans toute lutte et ils travaillent à y remédier. Nous avons travaillé ensemble, nous avons pris des motions, des résolutions, je pense que ce que nous avons dit va beaucoup influencer leur comportement, plus que ceux qui sont dehors, qui les diabolisent et les mettent à l’écart. Je pense qu’on a contribué énormément à arranger une situation et c’est le plus important.

Propos retranscrits par Kab’s Paul KABORE (collaborateur)
Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 30 décembre 2004 à 04:16 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Un Burkinabè chez les "patriotes" de Blé Goudé

    Voici au moins un des rares Burkinabè qui raisonne !!!
    Merci pour ton honnêteté intelectuelle.

  • Le 2 janvier 2005 à 19:08 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Un Burkinabè chez les "patriotes" de Blé Goudé

    La verite finie toujours par rattraper le mensonge. Le complot international contre la Cote D’Ivoire est inopportune.
    Le precepte premier de la democratie, c’est le respect du verdicte du peuple.

    Voila, que des peuples qui vivaient en parfaite harmonie deviennent apres l’apparition de Mr Ouattara dans l’arene politique de la Cote D’Ivoire des peuples violements opposes. Ceci, n’est pas le fait du hazard.

    Des fautes ont etes comissent par la classe politique Ivoirienne notament au seins du PDCI.
    1. Ouattara refuse de se soumettre a la constitution de la Cote D’Ivoire apres la mort de FHB. Celle-ci , fit de BEDIE le president de la Cote D’ivoire.

    2. BEDIE gere tres mal, l’insubordination de Ouattara. (Humiliation).

    3. Outtara, s’associe avec Compaore pour destabiliser la Cote D’Ivoire. (Coup d’etat de Dec. 1999)

    4. Outtara et Compaore falscifient le traitement des Burkinabes en Cote D’Ivoire, pour gagner le support du peuple Burkinabe desinforme.

    5. Politique tres aveugle, car elle met a mal ce vaillant peuple travailleur et tres utile a la Cote D’Ivoire.

    6. Gbagbo, n’a jamais ecrit aucune constitution, ni jamais organise une election presidentielle en Cote D’Ivoire. Il n’est donc pas responsable du rejet ni de BEDIE, ni de Ouattara aux elections de 2000.

    7. Qu’ont fait BEDIE et Ouattara quand le general GUEI rejetta , leur candidatures ? RIEN !!!

    8. Qu’a fait GBAGBO quand le general GUEI, voulait lui voler sa victoire ? Il a fait reclamer cette victoire par une marche monstrueuse pacifique contre les gendarmes et les militaire qui ont vite fait de se rallier au president du peuple non sans avoir commis certains abus.

    9. Pourquoi Ouattara voulait profiter de GBAGBO pour creer le chao durant cette marche ? D’ou est sortie le charnier de Yop dont les corps etaient deja decompose et avaient de l’eau dans les poumons selon le rapport de l’enquete internationale alors qu’il n’y a pas d’etendue d’eau a Yop ?

    10 Pourquoi, ne pas laisser GBAGBO appliquer son programme de refondation et le juger lors du moment des bilans ? (Elections presidentielles)

    • Le 9 juillet 2007 à 14:29, par Safouné Togo secretaire général sortant du bureau de coordination de ’AEEM (associaion des elèves et etudiants du Mali) En réponse à : > Côte d’Ivoire : Un Burkinabè chez les "patriotes" de Blé Goudé

      Je pense que L’afrcique est une famille , il n’est pas du tout etonnant de voir un burkinabé en cote d’ivoire. L’afrique doit etre unie surtout c’est la jeunesse qui doit etre le fer de lance de cette unté tant souhaitée. J’etais meme invité à ce congrès , mais malheureusement j’etais en plein organisation de mon congrès depuis le mali . Et je suis très fier des jeunes patriotes qui ont defendu pas seulement l’integrité de la cote d’ivoire mais aussi de l’Afrique. Courage mon général Blé que le combat pour l’independace totale de l’afrique soit couronné de succès

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