Cinquantenaire de l’indépendance du Burkina : Quel sort pour toutes ces infrastructures ?
On peut applaudir des deux mains. Bobo-Dioulasso a réussi son pari. Blaise aussi. Le cinquantenaire tant attendu a été célébré dans l’allégresse. Le défilé civil et militaire, clou de cette manifestation, a été parfaitement exécuté et les Bobolais ont apprécié. Le beau Blaise a été honoré par une présence remarquable et remarquée de têtes couronnées d’Afrique. Paul Kagamé du Rwanda, Denis Sassou Nguesso du Congo-Brazzaville, Idriss Deby Itno du Tchad, Theodoro Obiang Nguema de Guinée équatoriale ont été les attractions venues de loin. De même qu’Ali Bongo et Abdoulaye Wade.
Le seul absent remarquable a été Paul Biya, mais tous sont coutumiers du fait que ce grand amateur de golf et de séjours suisses se fait toujours représenter. On peut donc dire que tout est bien qui finit bien.
L’enfant terrible de Ziniaré, en plus d’avoir été sacré nouveau président du Faso selon les résultats du Conseil constitutionnel voisins de ceux publiés par la Commission électorale nationale indépendante, a réussi "son" cinquantenaire dans une cité réputée, à tort ou à raison, comme une ville difficile à mobiliser. Le compte est donc bon pour le Ziniarus Zorro. Et c’est non sans fierté que les griots du cercle présidentiel ont sorti leur jeu favori : chanter la gloire du grand chef. Que n’a-t-on pas entendu à Bobo-Dioulasso ? Tout a été dit et chanté sur les grandes capacités de ce peuple de se battre malgré l’adversité de la nature.
Tout a été dit et chanté surtout sur les pouvoirs immenses du Blaiso qui, seul, est en mesure de conduire ce bled dans la paix et la stabilité. Bobo lui doit tout. Pour tout dire, l’organisation de ce cinquantenaire a été un travail de génie ! Quoi de plus normal qu’un pouvoir se jette des fleurs après la tenue d’un événement historique ? Du reste, avant le Burkina, les autres pays ont eu pratiquement la même attitude d’autosatisfaction. N’empêche que certaines questions méritent d’être posées, à la lumière des expériences de la célébration tournante du 11-Décembre.
Au risque de nous répéter, disons-le à nouveau, tout a été parfaitement orchestré. Le déjeuner présidentiel du 11-Décembre a permis à tous les côcôs de boire et de manger aux frais de la princesse. Sauf que... En effet, si le tout devait être de ripailler à Bobo et de rentrer tranquillement à Ouagadougou en attendant 2011 pour aller "faroter" à Koudougou, toute cette débauche d’énergie n’aurait pas sa raison d’être. Ce qui est important, et il n’y a aucune difficulté à mettre tout le monde d’accord sur ce sujet, c’est l’impact que cette fête aura sur la capitale économique en termes de développement ou, à tout le moins, en termes d’opportunités de développement.
Le triste sort réservé aux infrastructures de Fada N’Gourma et de Ouahigouya pousse au questionnement. Y a-t-il un vrai plan d’utilisation rationnelle de tout ce qui a été construit ou rénové ? L’Etat a, en effet, englouti des sommes considérables dans les préparatifs de ce cinquantenaire. Mais comme le tout n’est pas de festoyer et de disparaître, le gouvernement et les pouvoirs locaux (gouverneur, maire) doivent déjà expliquer l’usage qui sera réservé à ces bâtiments. Bien qu’étant la troisième ville à accueillir le 11-Décembre décentralisé, c’est Sya qui doit permettre de savoir si réellement cette démocratisation de la fête à travers sa commémoration tournante va plus loin que les djandjobas et autres jouissances populaires.
Le défi pour Bobo sera d’achever certains travaux comme le Palais de la culture, qui n’a pas pu servir pour la Semaine nationale de la culture 2010. Mais surtout quel sort sera réservé aux infrastructures de luxe bâties pour accueillir les personnalités ? Les gourous du régime vont-ils se les partager comme des parcelles de Ouaga 2000 et des crédits de la CNSS ?
Adam Igor
Journal du Jeudi