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Intégration sous-régionale : La tomate réunit Burkinabè et Ghanéens

Publié le jeudi 2 juillet 2009 à 01h30min

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Réunis à Navrongo, ville frontalière du Ghana les 24 et 25 juin 2009, les producteurs de tomate burkinabè et ghanéens ont posé le diagnostic d’une filière porteuse, malheureusement, en panne. A l’unanimité, ils ont appelé à sa relance, en vue de favoriser l’intégration entre les deux pays, à condition que les industriels et les politiques emboîtent le pas…

La tomate offre d’énormes potentialités en matière de commerce entre le Burkina Faso et son voisin, le Ghana. Malheureusement, c’est une filière inorganisée où très souvent l’acheteur venu de la « Côte de l’or » ou du Togo fixe le prix d’achat. Parfois, pour une différence de 240 F CFA, il préfère quitter Kaya dans le Sanmatenga pour parcourir environ 140 km en vue de s’approvisionner à Yako dans le Passoré, avoue le président de producteurs de tomate du Sanmatenga, Salifou Ouédraogo. Pis, il arrive que la production pourrisse faute de marché. Outre les problèmes d’écoulement, la tomate souffre aussi d’un manque de financement.

Ces goulots d’étranglement ont contraint des producteurs, notamment du Burkina, à tourner le dos à la tomate ou à réduire considérablement les surfaces emblavées au profit d’autres spéculations comme l’oignon. Face à ces défis, des producteurs venus de cinq régions du Burkina Faso ont convergé à Navrongo au Ghana à une dizaine de kilomètres de la frontière pour tenter d’accorder leurs violons avec leurs collègues ghanéens. Ils ont eu des débats parfois houleux en vue de lever les obstacles à la libre circulation de la tomate entre les deux pays. La Journée du producteur du Ghana et du Burkina Faso vise donc à replacer la tomate, jadis abandonnée par les producteurs pour plusieurs raisons, au centre de la production.

Et la journée organisée par l’ONG de développement, ORCADE (Organisation pour le renforcement des capacités de développement) et GTLC (Ghana Trade and Livelihoods Coalition) a permis de poser les jalons d’un nouveau partenariat pour la filière.
En effet, la journée a débuté le mercredi 24 juin par un meeting des producteurs. Des voix se sont élevées pour saluer l’initiative des deux ONG dans le sens de l’intégration entre le Burkina Faso et le Ghana. D’abord celles des représentants des producteurs qui ont clamé haut et fort que la journée constitue « une réelle opportunité pour progresser ensemble ». Pour le porte-parole des producteurs ghanéens, Ibrahima Akalbila, il ne fait aucun doute que pour y parvenir, ils ont besoin d’un marché sûr et libre, d’accéder facilement aux intrants. « Nous devons accroître la production de la tomate pour améliorer la situation économique de nos deux pays.

Mais pour réaliser ce rêve, il nous faut une synergie d’action avec le soutien des gouvernements », a plaidé M. Akalbila devant un parterre de producteurs et de hauts responsables ghanéens et burkinabè. Et celui du Burkina Faso, Salifou Ouédraogo d’emboucher la même trompette. Arguant que la tomate est une filière porteuse qui, malheureusement, rencontre des problèmes depuis le champ jusqu’au marché, il a indiqué que la journée a permis aux producteurs du Burkina Faso de partager leurs suggestions avec leurs homologues du Ghana sur la libre circulation, la contractualisation de la commercialisation des produits, l’accès aux intrants de bonne qualité et la promotion des voyages d’échanges.

Ensuite, celles des autorités qui louent une « initiative lumière » visant à améliorer les relations commerciales. « L’initiative des deux ONG est une belle leçon de réalisme qui sensibilise le grand public sur le processus d’intégration. Cela contribue à engager les peuples et leur gouvernement vers la réalisation de la vision 2020 de la CEDEAO, c’est-à-dire passer d’une CEDEAO des Etats à une communauté des peuples », a soutenu le vice consul du Burkina au Ghana, Jacques Darankoum. A sa suite, le haut commissaire de la province du Nahouri, représentant le gouverneur de la région du Centre-Sud a réaffirmé le soutien de son pays à l’objectif de la journée. Selon Madeleine Bonzi, les autorités burkinabè soutiennent la création d’une jointe venture de la filière tomate. La rencontre qui a surtout débattu des problèmes d’écoulement de la tomate en vue d’y apporter une esquisse de solutions a fait du baume au cœur des producteurs.

Des solutions en vue « Ils produisaient beaucoup de tomate, mais il manquait un marché pour écouler cette production », constate le représentant de l’ONG ORCADE, Jonas Hien. Et la mévente était source d’énormes pertes pour les producteurs. C’est pourquoi, celui-ci a relevé qu’au-delà de l’intégration tant recherchée, les difficultés de production et d’écoulement de la tomate justifient la raison de cette démarche envers « ce pays frère ». Il s’agit pour ORCADE et GTLC de réunir les producteurs ghanéens et burkinabè en vue de trouver des solutions à leurs problèmes.

Et la démarche semble avoir eu un écho favorable.
A l’ouverture des travaux, le maire de la commune de Pô, Henri Koubizara a exprimé la bonne volonté des autorités burkinabè par la décision de son conseil municipal, de construire un comptoir d’achat des fruits et légumes qui va booster les échanges entre les deux pays. A cela, il convient d’ajouter les assurances données aux producteurs par les industriels. Les responsables de la Société de transformation des fruits et légumes (STFL), en gestation, soutiennent être en train de concocter une stratégie d’approvisionnement intégrant les préoccupations des producteurs. Avec le démarrage effectif des activités de la STFL en février 2010, l’épineuse question de l’écoulement devrait avoir une réponse.

D’une capacité de 250 tonnes/jour, l’usine qui sera installée à Loumbila pourra broyer environ 50 000 tonnes de tomates par an. Du coup, la production des 2 pays s’avère en deçà des capacités d’absorption de la STFL et de l’usine de Bolga qui est même capable de consommer toute la production du Ghana et du Burkina en 27 jours. Cela induit qu’il urge d’organiser la production, de sorte à ce qu’elle s’étale sur toute l’année au lieu de trois récoltes annuelles.
Un lourd pari qui reste entier dans la mesure où Navrongo n’a pas élucidé la nature du partenariat qui devra lier la STFL à l’usine de fruits et légumes de Bolga. Pour le représentant de ORCADE, l’une des satisfactions vient du fait que les industriels ont pris l’engagement d’accompagner les producteurs à produire encore plus en les rassurant de l’existence d’un marché potentiel et fiable sur lequel ils peuvent s’adosser. « Pour nous, les problèmes abordés à Navrongo semblent trouver un début de solution », a déclaré, M. Hien, ajoutant qu’il faille inscrire la tomate dans les négociations pour les APE en vue de la protéger.

Certes, les producteurs saluent l’espoir suscité par l’initiative des deux ONG partenaires. « Nous sommes contents de savoir qu’il y a de l’espoir pour la production de la tomate. Nous appelons les deux partenaires à faire un travail de fond sur le partenariat possible entre les producteurs et les industriels afin que la production de la tomate ne soit plus une catastrophe. Car il y a deux ans que la tomate a semé la désolation et la panique au point que certains producteurs voulaient se donner la mort. Aujourd’hui, nous voulons tourner la page pour que l’économie de deux pays rayonnent davantage à travers un partenariat gagnant-gagnant », explique Marie Victoire Ouédraogo, productrice de Kaya.

Et de poursuivre que le fait de plancher sur le problème d’écoulement à Navrongo, « notre grand défi au Burkina, est un ouf de soulagement, notre souhait est que ça aboutisse et que cela ne soit pas une promesse vaine ». C’est aussi l’avis de Jean Paul Badolo, producteur à Kyon dans le Sanguié. « Ce qu’on a suivi, on a vu que les bailleurs veulent sérieusement nous aider si on produit. Nous sommes prêts à produire », confie-t-il. Et c’est tant mieux pour la tomate et les bonnes affaires.

S. N. COULIBALY (Cou_nad@yahoo.fr)

Sidwaya

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