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Crise en Côte d’Ivoire : Coup d’Etat ou coup de bluff ?

Publié le jeudi 14 décembre 2006 à 07h59min

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C’était écrit. Et aucun observateur avisé ne l’ignorait d’ailleurs. En dépit de la résolution onusienne, la Côte d’Ivoire semblait être à mille lieues de renouer avec la paix après laquelle la sous-région, voire la communauté internationale courent depuis déjà quatre (4) ans. Quatre ans de gorges chaudes, de déclarations intempestives, de marches, de fusillades, de tueries impunies.

Bref, depuis et ce en dépit de quelques fugaces éclaircies, le pays du président Félix Houphouèt s’enfonce toujours un peu plus dans la crise.

Il y a une année, bien d’observateurs de la scène politique ivoirienne ont eu la faiblesse de croire que le tandem Gbagbo-Konan Banny était le bon et pensé naïvement que, pour ce coup-ci, la Côte d’Ivoire pourrait s’acheminer vers la paix tant souhaitée de presque tous, sinon de tout le monde.

Ce n’est un secret pour personne que cette situation de ni guerre ni paix a des conséquences terribles pour l’économie, sur la politique et la société ivoirienne et fragilise durablement la sous-région.

Que l’on veuille ou non et ce, sans être ce pays où coule la moindre goutte d’or noir, la Côte d’Ivoire est tout de même la locomotive de l’UEMOA. Et en dépit des griefs que l’on pourrait faire à ce bâtisseur que fut Houphouèt-Boigny, il est unanimement admis que l’homme a tracé la voie pour le rayonnement économique de son pays.

En effet, sauf erreur ou omission, son pays a été le seul Etat au Sud du Sahara à atteindre un bon niveau de performance économique sans que pour autant on y trouve de conséquentes richesses minières. Car c’est sur et grâce à l’or vert, c’est-à-dire l’agriculture, que ce beau pays a posé les fondements de son économie.

Une économie dont bien d’hommes avertis louent les performances malgré la situation chaotique dans laquelle cette nation s’installe. En effet, à ce jour encore, et à elle seule, la lagune Ebrié pèserait pour près de 40% de l’économie de l’ensemble des huit pays composant cette organisation sous-régionale. Ce qui, loin s’en faut, n’est pas rien.

Voilà pourquoi, lorsque la Côte d’Ivoire est enrhumée, bien d’autres de la sous-région toussent et ce, très fortement. C’est pour cela aussi que tous les dirigeants d’Afrique, voire d’ailleurs, se démènent depuis comme de beaux diables pour un retour de la paix dans ce territoire qui reste la colonne vertébrale sous-régionale.

Bref, après tant d’années à se pencher sur cette crise de sommet en sommet, le pays d’Houphouèt-Boigny est toujours à la croisée des chemins, toujours dans la tourmente. La dernière en date, c’est cette tentative de coup d’Etat dont bruissent depuis quelque trois jours la rue et les journaux à Abidjan.

Si l’on s’en tient aux déclarations du colonel Babri Gohourou, porte-parole des Forces de défense et de sécurité (FDS) de Côte d’Ivoire, ce coup d’Etat éventé par les FDS serait l’œuvre du conseiller politique du Premier ministre.

Ce proche de Konan-Banny a pour nom Adama Bictogo et serait par ailleurs un fidèle parmi les fidèles d’Alassane Dramane Ouattara, le patron du RDR. Dans son communiqué fort accusateur, le porte-parole des FDS poursuit en disant de manière explicite que cette tentative de coup de force avait été planifiée de concert avec les responsables politiques du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

Voilà les faits, selon ledit messager. Mais est-ce une véritable tentative de coup d’Etat ou encore un des coups de bluff dont seul l’historien Gbagbo détient toujours le secret ?

A vrai dire, pour l’heure, il serait hasardeux de se prononcer sur ce putsch, même si, par ailleurs, il n’est un secret pour personne que Gbagbo a plus d’un tour pendable dans son sac pour diaboliser ses adversaires politiques et se maintenir autant que faire se peut au pouvoir.

Arrivé au "trône" sur un coup de poker, l’époux de Simone n’ignore aucunement qu’il ferait office de poids plume face à ses adversaires politiques que sont Konan Bédié et Alassane Dramane Ouattara, si d’aventure, une présidentielle s’y déroulait à la régulière.

N’étant pas donc un poussin d’hivernage sur le plan politique et connaissant ses forces réelles face à ses antagonistes, l’enfant de Mama pourrait, si ça se trouve, faire dans la surenchère en accusant à tout vent ceux qui feraient en sorte qu’il perde son prestigieux poste de Premier magistrat de la Côte d’Ivoire. Et pour ça, aucune entourloupe, aucune roublardise ne seraient de trop pour avoir la peau de l’éventuel adversaire politique. Fût-il Alassane Ouattara, Konan Bébié ou Konan Banny !

Avec cette énième tentative de coup d’Etat, nous serons tenté de dire qu’à Abidjan, les fins d’année se suivent et se ressemblent depuis la nuit du 18 au 19 septembre 2002. Une situation de trouble savamment entretenue et qui, chaque fois, jette une chape de plomb sur les fins d’année.

Certes, il n’est un secret pour personne que depuis un certain temps, le tandem Gbagbo-Konan Banny s’est transformé en un duel ouvert, mais de là à accuser le conseiller du Premier ministre, civil de surcroît, d’être l’instigateur d’un coup de force, c’est un pas que nous ne saurons franchir, ce d’autant plus que de grandes ambiguïtés subsistent dans la déclaration du porte-parole des FDS.

En effet, le colonel Babri Gohourou est resté on ne peut plus sibyllin lorsque, dans son communiqué, il a affirmé que des "officiers, sous-officiers et hommes du rang sont constamment harcelés par des porteurs de mallettes remplies d’argent afin de les soudouyer".

Et le hic dans cette affaire, c’est que, hormis Adama Bictogo dont on cite le nom, plus personne n’est désigné nommément comme ayant trempé dans ce coup foireux. Ainsi, du côté du pouvoir à Abidjan, on reste évasif pour mieux angoisser quelques intrépides opposants. Et c’est de bonne guerre.

A ce stade de la situation, avec ces déclarations éparses et lapidaires jetées dans les médias et dans la rue, il serait difficile de dire qu’il y a eu une ébauche de coup d’Etat, tout comme nous ne pourrons aucunement mettre notre main au feu pour affirmer le contraire.

Cependant, la personnalité et surtout les fonctions du principal accusé, Adama Bictogo, nous laissent quelque peu sceptique.

En effet, on ne peut s’empêcher de penser qu’à travers Adama Bictogo, c’est, d’une certaine manière, Konan Banny et Alassane Ouattara que le clan Gbagbo accuse de vouloir fomenter un coup de force. Et Gbagbo et ses amis vont un peu plus loin, puisqu’ils affirment, sans sourciller, que certains responsables du RHDP sont également dans le coup.

Et lorsqu’on sait que le RHDP est composé, entre autres, du RDR et du PDDCI, nul doute que ce sont les grands adversaires du FPI de Laurent Gbagbo qui sont visés. Alors, Gbabgo voudrait-il, à travers Bictogo, se débarrasser de ses adversaires gênants ? Peut-être ! Après donc des enquêtes approfondies, s’il se trouve que c’était un véritable coup d’Etat en préparation, cela signifie que Gbagbo doit changer son fusil d’épaule pour aller résolument et honnêtement à la paix.

Mais si, au contraire, on a affaire à un coup de bluff, c’est dire que l’heure de Gbagbo a sonné. C’est connu, à force de crier aux loups, on finit tôt ou tard par être dévoré par ces derniers. L’histoire fourmille d’exemples du genre.

Boureima Diallo

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 19 décembre 2006 à 18:29, par yannes En réponse à : > Crise en Côte d’Ivoire : Coup d’Etat ou coup de bluff ?

    Je me rejouis que vous ayez à reflechir sur mon pays.Ce qui forcement ne vous permet pas de saisir les contours de la crise ivoirienne.Quelques points que je souhaite evoqué pour votre gouverne.
    1- le 19 septembre 2002, si le coup de la rebellion avait marché, vous auriez eu une autre appreciation de la crise ou de la situation qui prevalerait en ces temps du mois de septembre.
    vous ignorez que le president était en voyage, en ITALIE d’où, il a écourté sa visite pour venir faire face au coup d’état qui a échoué.Et le pays aujourd’hui est pris en otage par l’armée française.Nous ne discutons plus avec les rebelles puisque nous connaissons nos ennemies (france).Donc si le coup avait marché qu’en dirai tu ?

    2- Si tu penses que gbagbo serait battu par allassane et bedié, c’est que eux aussi il doivent le savoir n’est ce pas ?
    C’est simple, qu’ils deposent les armes et allons aux élections ! Mais sache que bedié était au pouvoir et il est parti par un coup d’état ! De qui ? Mon ami ,ils sont 7 dans leur groupe de G7 (rhdp) mathematiquement c’est eux les favoris n’est ce pas ?

    3- Des sondages sont effectués regulièrement par les services secrets français, même par l’onuci qui donnent favori gbagbo.
    Pour ta gouverne un sondage celui de l’onici a été divulgué par meprise d’ailleurs qui donne favori encore gbagbo.
    Enfin gbagbo ,c’est un esprit des ivoiriens qui savent que la france doit traiter desormais d’egal avec nous !et à travers nous l’afrique !
    MERCI

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