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Réformes au Togo : L’opposition et des OSC contestent, le pouvoir mâte, la communauté internationale appelée à réagir

Publié le mardi 9 avril 2024 à 22h35min

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Réformes au Togo : L’opposition et des OSC contestent, le pouvoir mâte, la communauté internationale appelée à réagir

La tension politique est montée au Togo, suite à l’adoption de la nouvelle constitution, le 25 mars 2024, qui, entre autres, attribue désormais la compétence au parlement d’élire le président de la République. En clair, les Togolais n’éliront plus leur président, qui, mieux, occupera maintenant une fonction honorifique. Cette tension déjà vécue est aggravée par le report sine die, la veille de l’ouverture même de la campagne, des élections législatives et régionales, initialement prévues pour le 20 avril 2024. Ainsi, les manifestations de protestations se multiplient par l’opposition politique et des organisations de la société civile (OSC), auxquelles réplique le pouvoir par des répressions et arrestations.

La nouvelle constitution togolaise a pour implications également qu’elle supprime le suffrage direct pour l’élection du président de la République. En clair, elle introduit un système de gouvernement parlementaire, et le président ne sera plus élu au suffrage universel, mais par les membres du parlement. La réforme accouche aussi d’un poste de président du Conseil des ministres qui assurera l’effectivité du pouvoir exécutif, tandis que le président de la République se contentera, lui, d’une fonction honorifique.

Un autre aspect important, est que la nouvelle constitution ne prend pas en compte le temps déjà passé au pouvoir ; ce qui pourrait permettre à Faure Gnassingbé, arrivé au pouvoir en 2005, d’y rester jusqu’en 2031, s’il venait à être réélu en 2025. Elle allonge aussi le mandat présidentiel d’un an, passant de cinq à six, tout en limitant le nombre de mandats à un (donc, le mandat du président est prolongé d’une année et la Constitution lui octroie un mandat de plus).

Avec ces nouvelles dispositions, le pouvoir résidera, selon des spécialistes, entre les mains d’un “président du Conseil des ministres", qui fait office de Premier ministre, désigné par les députés. C’est lui qui aura en charge les fonctions régaliennes, donc le pouvoir réel. Son mandat doit être de six ans, sans qu’il soit précisé s’il sera renouvelable ou non. La crainte pour l’opposition, c’est que le président Faure Gnassingbé ne soit désigné à cette fonction de président du Conseil des ministres, ce qui va assurer son maintien au pouvoir pour une durée illimitée.

Du côté des initiateurs, l’on explique que ces réformes ont pour fondements de renforcer la démocratie, assurer une meilleure protection des droits et libertés des citoyens, et de rendre les institutions plus efficaces et plus représentatives. Elle viserait également la recherche de la stabilité gouvernementale par l’instauration du régime parlementaire, tout comme à instaurer un régime politique qui favorise une plus grande implication des citoyens dans la vie politique et dans les processus décisionnels.

En tous cas, cette réforme est contestée par l’opposition et la société civile, qui la qualifient de "coup d’Etat constitutionnel", y décelant une manœuvre du président pour se maintenir au pouvoir.
La Conférence des évêques du Togo s’est également interrogée sur "l’opportunité" de mener cette réforme, appelant le président à "surseoir la promulgation de la nouvelle Constitution et à engager un dialogue politique inclusif, après les résultats des prochaines élections législatives et régionales".

Devant donc la vague de protestations suscitées par l’adoption de cette nouvelle constitution, le président Faure Gnassingbé a demandé que le texte soit examiné à nouveau à l’Assemblée nationale. Il a dans la foulée, décidé du report des élections législatives et régionales, initialement prévues pour le 20 avril 2024, et sans fixer de nouvelle date.

Ce report des élections locales vient rajouter aux tensions politiques, obligeant l’Assemblée nationale à entamer dès lundi, 8 avril 2024, une tournée sur l’ensemble du territoire, pour consulter les forces-vives, notamment les chefs traditionnels et les groupes organisés, sur la modification de la constitution. Cette campagne, dénommée « Tournée d’information et d’écoute des populations sur la révision de la constitution », prévue pour trois jours, consiste à présenter la nouvelle constitution à la population et, partant, recueillir ses contributions en vue de son amélioration.

Pendant ce temps, l’opposition et la société civile, dans des actions de contre-attaque, ont appelé à trois journées de manifestations, les 11, 12 et 13 avril 2024. En attendant ces trois journées qui pourraient être encore plus difficiles pour le pays, toutes les tentatives de protestations contre cette volonté du pouvoir sont, selon les médias et bien d’autres sources, réprimées, avec à l’actif, des arrestations dans les rangs des politiques et de la société civile.

Selon BBC Afrique, une coalition de onze organisations de la société civile togolaise, après avoir dénoncé le report des élections et indiqué qu’il n’y a aucun rapport entre « la tenue des élections législatives et régionales dont la périodicité est consacrée par la constitution et le projet funeste de révision constitutionnelle », appelle la communauté internationale à réagir. Alors qu’elle dénonce et condamne la “privation” des droits à la manifestation par le gouvernement, ce dernier, lui, rétorque qu’il ne s’agit pas de répression contre l’opposition, mais d’empêcher tout trouble à l’ordre public. « Les Organisations de la société civile font une ultime interpellation à l’endroit de la communauté internationale, notamment aux États-Unis d’Amérique, à l’Union européenne, à la République Fédérale d’Allemagne, à la France, à l’Union africaine et à la CEDEAO à œuvrer afin que la Cour pénale internationale (CPI) se saisissent du cas togolais avant qu’il ne soit trop tard », rapporte le média de la déclaration de ladite coalition.

Jusqu’où iront ces tensions politiques dans le pays de Faure Gnassingbé, le médiateur dans l’affaire dite des 49 soldats ivoiriens détenus au Mali ? Ce pays également qui a souffert de violences politiques à répétitions, et dans son contexte national marqué par des incursions terroristes dans sa partie nord !

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

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