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Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

Publié le mardi 6 juin 2006 à 06h48min

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Pr André Ouezzin-Coulibaly

Cela fait maintenant dix ans que le Pr. André Ouezzin Coulibaly est admis à la retraite. Une retraite qu’il a mise à profit pour s’investir dans un projet grandiose qui tarde encore à se concrétiser. La Médipole de Sya, initialement baptisée Centre international de soins de Sya (Cissya), pensée pour être un point de convergence de la sous-région pour des traitements sanitaires de haut niveau, attend toujours de sortir de terre. Depuis plus de dix ans...

Il a un nom prédestiné, s’est fait un prénom réputé dans le domaine de la cardiologie africaine et ambitionne de mettre ses hautes compétences au service de la promotion de la santé sous-régionale. Et s’il n’y est pas parvenu jusqu’à présent, il ne baisse pas pour autant les bras. Car, en décidant de rentrer sans son pays, le Burkina Faso, en 1996, après tant d’années de bons et loyaux services à l’Institut de cardiologie d’Abidjan (Côte d’Ivoire), le Pr. André Ouezzin Coulibaly avait le souci d’apporter sa contribution à la promotion de la santé continentale.

Mais, tel un chemin de croix qui n’en finit pas d’achever sa marche, le projet qu’il a initié depuis, peine à avancer. En effet, les premières réflexions autour de ce projet novateur datent de 1993. Un terrain de 10 hectares a même été acquis pour la cause. Seulement voilà ! De tractations en démarches de toutes sortes, entre les lourdeurs administratives et les procès d’intention, il a fallu attendre... 2004 pour obtenir l’autorisation d’ouvrir cette grande clinique ! De quoi enterrer la volonté la plus aiguisée et tuer tout esprit d’initiative. Et pourtant...

Pourtant, on ne parle pas moins d’un centre international qui prodiguerait des soins de haut niveau à une clientèle sous-régionale. On n’ambitionne pas moins, ici, de créer, à Bobo-Dioulasso, ville centrale dans la sous-région ouest-africaine, réputée pour son climat doux, un cadre d’excellence en matière de santé, en offrant à tous, un plateau technique de bon niveau, susceptible d’infléchir conséquemment les évacuations sanitaires, trop coûteuses. On ne pense moins, non plus, avec la Médipole de Sya, à mettre à la disposition de la sous-région, un centre de maintenance bio-médicale où serait également assurée la formation des cadres, pour la promotion d’un niveau d’exécution sanitaire appréciable...

Alors pourquoi ? Pourquoi ce manque d’enthousiasme autour d’un projet dont la finalité est d’apporter plus de compétences et plus de réussite dans l’armada sanitaire de notre pays ? Pourquoi le cor de la mobilisation n’a-t-il pas sonné le rassemblement et que la volonté politique n’a-t-elle pas été plus manifeste dans l’accomplissement de cette œuvre d’envergure ?

Ceux qui y voient « la concrétisation du traditionnel désintérêt dont Bobo-Dioulasso est la victime », arguant que l’on aurait plutôt aimé que ce soit Ouagadougou qui abrite ce projet grandiose, ont-ils raison ? Au-delà des questions, légitimes, au-delà de l’amertume des uns, de la lassitude des autres, il y a intérêt à remettre, à présent, les cartes sur la table et à examiner de façon plus concrète, la faisabilité de ce projet, important pour notre pays. Du reste, la personnalité même de son promoteur constitue une caution suffisante pour que, grâce à un accompagnement politique plus manifeste, la Médipole de Sya sorte enfin des tiroirs dans lesquels elle est restée trop longtemps confinée. Non ?

Fils de feu Daniel Ouezzin Coulibaly, un nom qui appartient désormais à l’histoire africaine, le Pr. André Ouezzin Coulibaly a obtenu son doctorat en médecine en 1969, à l’Université libre de Bruxelles (Belgique). Sa passion pour la chirurgie, il la doit à son oncle, Bakassa Traoré, qui était lui-même chirurgien. Il travaillera d’abord comme chirurgien généraliste à l’hôpital de Treichville, à Abidjan. En 1978, il est inscrit sur la liste d’aptitude de Paris comme Maître de conférences agrégé de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire.

Il est d’ailleurs, aujourd’hui encore, titulaire de la Chaire de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire à la Faculté de médecine de l’université nationale de côte d’Ivoire, à Abidjan. Ancien directeur de l’Institut de cardiologie d’Abidjan, le Pr. André Ouezzin Coulibaly est membre du Conseil africain et malgache de l’enseignement supérieur (Cames) ainsi que de nombreuses sociétés savantes nationales et internationales. Chevalier de l’Ordre du mérite de la santé publique et de l’Ordre du mérite sportif de Côte d’Ivoire, il est également auteur et co-auteur de150 publications scientifiques nationales et internationales.

Créé en 1974, l’Institut de cardiologie d’Abidjan est aujourd’hui une référence mondiale en matière de chirurgie cardio-vasculaire. Des Africains, agrégés de médecine, y opèrent à cœur ouvert « avec des résultats comparables à ceux des plus grands hôpitaux du monde ».

Au sein de cet Institut, qu’il a intégré en 1977 après une formation à l’Institut de cardiologie de Montréal (Canada), le Pr. André Ouezzin Coulibaly a d’abord été adjoint au chef du département de chirurgie, le Pr. Dominique Metras, lui-même fils de l’un des « grands as de la médecine dans le monde ». Il prendra tout naturellement la tête du service en 1986, lorsque le Pr. Metras est définitivement rentré chez lui, en France. En 1989, il devient Directeur de l’Institut de cardiologie d’Abidjan, jusqu’en 1996 où il est admis à la retraite.

Depuis, il s’est lancé avec enthousiasme dans ce projet sous-régional qui, malheureusement, piétine. En attendant, il a ouvert, en 2000, le Centre médical Macoucou Traoré (Cematra), du nom de sa mère, qui reçoit en moyenne, toutes affections confondues, 5 000 patients chaque année. Le Cematra est le seul centre médical de la région (Bobo, Banfora, Gaoua...) équipé pour réaliser des mammographies, indispensables dans le dépistage du cancer du sein.

La Médipole sera-elle une réalité un jour ? « Si l’on veut nous écouter, nous aider, nous sommes prêts à aller exposer ce projet partout où il faut », a indiqué le Pr. André Ouezzin Coulibaly il y a deux ans, dans les colonnes du quotidien Sidwaya, en souhaitant que chacun apporte sa pierre. Mais il faudra encore du temps, beaucoup de temps. Cependant, il reste pragmatique, notamment face à la question de l’immigration dite « choisie ».
Au train où vont les choses, l’ancienne métrople n’est pas loin de ne recevoir sur son sol que des... « malades choisis » ! Alors, plutôt que de se battre contre la France, argumente le promoteur de la Médipole de Sya, « c’est ici, sur place, qu’on doit se battre pour créer les meilleures conditions de prise en charge de nos malades, car on a tous les cadres qu’il faut pour cela ».
Septuagénaire, le fils du grand Ouezzin Coulibaly, qui a tant donné aux autres, ne serait donc t-il pas prophète chez lui ?

Par Serge Mathias Tomondji


Il se prénommait Daniel !

« Ouezzin n’appartenait pas seulement à la Haute Volta, ou à la Côte d’Ivoire, sa seconde patrie. Il était très populaire et apprécié hautement au Sénégal où il a été le Surveillant général respecté de la célèbre Ecole normale William Ponty. Il était connu en Guinée, au Cameroun, au Niger, au Congo, au Nigeria, au Togo. (...)

Ouezzin Coulibaly avait une véritable carrure de chef d’Etat, et sa foi en l’avenir de l’Afrique était éclatante. » Ainsi décrivait-on Daniel Ouezzin Coulibaly dans « 48 Etats africains, 50 pays souverains », une revue continentale d’information sur les activités de l’Organisation de l’unité africaine. Considéré comme le véritable bâtisseur du Rassemblement démocratique africain (RDA), on louait sa droiture et son intégrité, ainsi que « sa franchise, son intelligence remarquable, son honnêteté et son courage terrible ».

Pour l’historien burkinabè Bruno Doti Sanou, Daniel Ouezzin Coulibaly, dont le buste trône à... Bamako (Mali), reste une « référence de choix pour l’Afrique ». De fait, il aura significativement marqué son époque grâce à son charisme et à son humilité, jamais pris en défaut. Son chirurgien de fils n’aime pas trop parler du politicien qu’était son père.

Et lorsqu’on lui en parle, il écoute avec respect les éloges sur son géniteur et « trouve rapidement une excuse pour s’échapper et se rendre au chevet d’un malade ».

S.M.T.

Fasozine

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Vos commentaires

  • Le 6 juin 2006 à 11:34, par Sally En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

    C’est dommage que je ne sois pas actuellement riche comme Alizata OUEDRAOGO
    Sinon j’aurai pris la construction du centre en main et je serais la marraine.

    Seulement j’exorte les opérateurs économique du pays à s’y investire.

    • Le 8 juin 2006 à 19:36, par lucas (burkina Faso) En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

      Comme c’est malheureux pour l’un des pays les plus pauvres du Monde ! Comme les en haut de en haut peuvent etre evacués nuitament par des avions medicalisés s’ils ont des probl`mes cardiovasculaire, ils s’en foutent du peuple. Mais dieu est Grand ! Chapeau bas à toi digne fils de Ouezzin et merci de n’avoir pas croisé les bras

  • Le 6 juin 2006 à 16:05, par Passakziri En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

    Une fois de plus, on est est appélé À la dure réalité,réalitéaussi dure que le sol du Faso.
    ètant moi même étudiant expatrié , je me demande si au Faso on víse le développement ou si au contraire l’idéal visé par ceux qui ont le pouvoir de décision est d empêcher le developpement.Mais,de la même facon que nos vaillant agriculteurs parviennent à forcer l’aridité des sols et d assurer de"bonne" production,chacun de nous investis dans la science d une maniere ou d une autre pourrons forcer la réalité afin de faire avancer les choses.
    Mais domage,au Burkina ce ne sont pas des idées qui manquent, ce sont plûtot des hommes intègres et courageux pour l application de ces idées qui deviennent de plus en plus rare.

  • Le 6 juin 2006 à 18:43, par SANOU SIAKA En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

    IL NE SERAIT PAS SURPRENANT QUE CE PROJET SI NOBLE, SI NECESSAIRE SOIT BLOQUE POUR DES RAISONS POLITIQUES. NUL DOUTE QUE S’IL DEVAIT ETRE EXECUTE A OUAGA IL L’AURAIT ETE DEPUIS TRS LONGTEMPS. DISCRMINATION ? C’EST AINSI QUE LES FRUSTRATIONS NAISSENT ET ABOUTISSENT A DES CATASTROPHES. DE PLUS, COMME L’INITIATEUR LUI, A UN NOM, SON PROJET POURRAIT LUI DONNER DES IDEES PEUT-ETRE. EN ATTENDANT DES MALADES MEURENT.

    • Le 9 juin 2006 à 00:35, par AS En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

      Comme vous l’avez mentionner, ce projet se réaliserait si le professeur l’avais prévu pour OUAGADOUGOU,s’il y tient vraiment, pourquoi ne pas le transplanter là oû il a la plus grande probabilité de se réaliser ?Je respecte cet amour qu’il porte pour BOBO mais je trouve que OUAGADOUGOU est mieux indiqué pour ce projet grandiose ;Oû se trouve la faculté de medecine ?Oû se trouve le C.H.U.? Oû se trouvent les cardiaques du pays ?

  • Le 8 juin 2006 à 20:08, par Dadaah En réponse à : > Santé : Et si on sortait enfin de terre la Médipole de Sya ?

    Que dire d’autre ? Juste ajouter que je suis soulagée que beaucoup remarquent ce qui se passe au Faso, et surtout qu’on commence à en parler ouvertement.Il n’est dans l’intérêt de personne de mentir ; et il est plus que temps de réagir avant que les choses ne s’aggravent ! il est facile de jouer la politique de l’autruche et de croire qu’on ne fait que dramatiser une réalité fréquente et non discriminatoire au pays lorsqu’on est pas concerné. Commençons d’abords par se demander pourquoi un homme d’une telle envergure n’a droit à aucun chapitre dans le programme d’histoire enseigné aux enfants de son pays, pendant qu’il a un buste ailleurs en Afrique ? Ce ne sont pas les exemples qui manquent pour prouver un certain favoritisme régionnaliste.Sans oublier que des personnes n’hésitent pas à s’en vanter. Ne faisons pas comme les Ivoiriens qui n’y voyaient rien tant que seuls leurs voisins d’origine étrangère étaient malmenés par le régime.Eux ils ne remarquaient rien et n’acceptaient pas le " mensonge " non plus

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