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Gestion des ressources naturelles transfrontalières dans la commune de Kampti au Burkina Faso

Publié le dimanche 5 novembre 2023 à 10h00min

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KARAMBIRI Bienvenue Lawankiléa Chantal Noumpoa1, SANOGO Salifou2, YANOGO Pawendkisgou Isidore3

1 Institut des Sciences des Sociétés (INSS/CNRST)
2 Université de Ouahigouya
3 Université Norbert Zongo

Résumé

Les ressources naturelles constituent, une source économique importante pour les populations dans le monde. Au Burkina Faso, l’eau ou la forêt constitue une frontière naturelle avec les pays voisins. Ces ressources étant en diminution, leurs exploitations peuvent entraîner des conflits entre les populations des différentes zones. L’objectif de cette étude est d’analyser la gestion des ressources naturelles transfrontalières dans le Sud-Ouest du Burkina Faso. Une approche qualitative et quantitative a été adoptée.

Les résultats montrent que le village de Galgouli au Burkina Faso partage, des zones de pâturage, des points d’eau pour le bétail, des points d’eau potable pour les populations avec celui de Doropo en Côte d’Ivoire. Ces ressources naturelles sont gérées en général, de manière informelle.

Introduction

Les ressources naturelles sont surexploitées de nos jours par une population mondiale en perpétuelle croissance. L’Afrique a une forte dépendance aux ressources naturelles pour la stabilité économique de la population. Une gestion durable des ressources « communes » est possible s’il existe des règles effectives pour le contrôle de l’accès et l’exploitation. L’accès est réservé, dans le respect des certaines règles d’exploitation, à certains acteurs : soit la ressource est contrôlée par un groupe social donné et l’accès réservé à ses membres et aux groupes alliés, soit le geste même de prélever confère un droit exclusif (Delville P. L., 2005). Des modes de gestions comme les conventions locales existent entre des populations.

Effectivement, les conventions locales ont été (ré) inventées lors de la recherche de moyens de concilier des modes traditionnels de gestion concertée des ressources naturelles, qui perduraient en pratique, avec les systèmes juridiques dits modernes (Granier L., 2010). En réalité c’est un accord entre groupes sociaux à l’échelle communautaire pour préserver l’environnement et défendre leurs intérêts. La gestion communautaire a surtout consisté à un transfert ou une reconnaissance des droits à la communauté à travers la mise en place des forêts communautaires (Nguinguiri J. C., 1999). Au-delà de ces formes de gestions, il y’a une collaboration tacite entre les populations. Pour y comprendre, est présenté respectivement une approche méthodologique et les résultats de cette investigation

1. Méthode et matériel

1.1. Localisation de la zone d’étude

La commune rurale de Kampti est située dans le Sud-ouest du Burkina Faso. Elle a une superficie de 1 244 km2 et est limitée à l’Ouest par le département de Gjigouè ; à l’Est par le département de Midebdo ; au Nord-Est par la commune de Périgban ; au Nord-Ouest par la commune rurale de Loropéni ; au Sud par la république de Côte d’Ivoire. Dans cette commune, le village de Galgouli a été retenu. C’est un village qui s’étend sur une dizaine de kilomètres. Il est situé à 5 km de la frontière de la Côte d’Ivoire. Ce village a été choisi car, c’est le dernier village, qui est situé sur l’axe principale entre le Sud-Ouest du Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. La carte 1 présente la commune de Kampti.

Carte 1 : Localisation de la commune de Kampti

1.2. Méthode de collecte et de traitement des données

Pour cette étude, des enquêtes et des entretiens ont été réalisés. Les enquêtes ont concerné les populations locales dans toute sa composante. Ces enquêtes ont permis d’obtenir des données quantitatives à travers méthode d’analyse statistique. Quant aux entretiens, ils ont concerné les autorités administratives, les collectivités territoriales, les autorités coutumières, les autorités religieuses, les services techniques de l’environnement et des eaux et forêts. Des données quantitatives et qualitatives ont été également obtenues par le biais des enquêtes.
Le village de Galgouli dans la commune de Kampti au Sud-Ouest a été retenu pour l’étude. Un effectif de 100 personnes a été enquêté. Le questionnaire a été saisi sur Kobocollect ( Karambiri B. L. C. N. et al, 2023).

2. Résultats et Interprétations

2.1. Les ressources naturelles présentes dans le village

Dans ce village transfrontaliers, des ressources naturelles sont présentes. Ils constituent souvent des frontières naturelles entre Doropo en Côte d’Ivoire et Galgouli au Burkina Faso.

Selon les personnes (%) enquêtées, les ressources naturelles partagées dans leurs localités sont : des points d’eau pour le bétail (puits, forage, marres) et des points d’eau potable pour les populations (puits, forages), des cours d’eau. La particularité de ce village est qu’il partage en plus une forêt classée, des zones de pâturage, des sites d’orpaillages.

2.2. Dynamique des ressources naturelles de la zone selon les populations
À Galgouli, les ressources naturelles sont abondantes selon les populations. Le village fait partie des zones les plus arrosées du pays car étant situé dans la zone sud-soudanienne du pays. C’est la partie du pays qui regorge d’une grande quantité de ressources naturelles.

L’avis des populations enquêtées sur les ressources naturelles dans le passé varie. Mais en général, les populations (58,41 % )pensent que les ressources naturelles étaient abondantes par le passé. Même, si plus (50%) des personnes enquêtées à Galgouli attestent que ces ressources naturelles étaient abondantes, 27,43 % certifient que ces ressources naturelles sont constantes.

Avec l’accroissement de la population et le poids des activités, ces ressources naturelles ont connu une évolution. Les avis sont diversifiés concernant cette dynamique. À Galgouli, 49, 51 % des populations enquêtées constatent une diminution au niveau des ressources naturelles de leur village contre 27,47 % qui affirment une constance, et 21,53% une augmentation.

2.3. Ressources naturelles partagée avec les villages voisins

Les populations des deux villages, reconnaissent partager les ressources naturelles de leur localité avec les populations localités transfrontalières. À Galgouli, 85 % des enquêtés reconnaissent qu’ils partagent avec la population de Doropo des zones de pâturage, des points d’eau pour le bétail (puits, forage, marres), des points d’eau potable pour les populations (puits, forages). Les populations de Doropo et de Galgouli partagent la zone forestière qui se trouve tout au long de la frontière Burkina Faso-Côte d’Ivoire.

Selon les enquêtés (%), le partage se fait sans incidence majeur. En cas d’incidence, le dialogue est prôné pour résoudre le problème. Les enquêtés expliquent cette situation par le fait que des deux côtés de la frontière se sont les mêmes familles qui y sont installées. Les liens de parenté vont au-delà des limites artificielles de frontières. Aussi, à travers les mariages les relations entre les communautés sont très solides. La frontière n’est pas une barrière pour eux car n’étant pas physique. C’est ce qui fait que chaque population prélève la ressource dont elle a besoin pour ces activités, et pour la consommation.

Les populations de Galgouli reconnaissent qu’ils prélèvent en commun avec les populations de Doropo des Produits Forestiers Non Ligneux (PFNL). En effet, au niveau de la frontière du Burkina Faso Côte et de la d’Ivoire (Galgouli-Doropo) , il existe une forêt qui s’étend de Bodana (Burkina ) et Bodana (Côté d’Ivoire) dans laquelle l’abondance des PFNL comme, en attestent 83,4% des personnes enquêtées à Galgouli.

2.4. La gestion des ressources partagées

Les ressources naturelles sont gérées de manière informelle. En effet, plus de la moitié des populations enquêtées reconnaissent qu’il n’existe pas une convention locale de gestion de ces ressources dans les villages. La gestion des ressources se fait de manière tacite car, c’est la méthode verbale et par consentement qui est privilégie par les populations (82%) . Au niveau local, il existe des comités pour la gestion des différentes ressources naturelles. Ces organes sont entre autres les différents comités villageois. Les agents des eaux et forêts encadrent l’exploitation selon les textes nationaux et internationaux en vigueur.

Mais ces comités fonctionnement de manière isolée. Il n’existe pas de coopération régulière ni de cadre d’échange commun entre ces structures locales permettant de poser la question de la gestion commune des ressources transfrontalières. 40 % des répondants trouvent que la gestion des ressources naturelles est mauvaise. Ils expliquent cela par l’absence d’organe formel de gestion. Pour les répondants, ils arrivent pour le moment à éviter des conflits à cause surtout des liens de parenté et l’implication des gestionnaires non formels.

Conclusion

Les ressources naturelles sont très importantes pour les populations des zones frontalières. Elles en tirent leurs revenus qui leurs permettent de subvenir aux dépenses de la famille. Ces ressources naturelles qui sont en diminution, auront des incidences sur la population et pourront être source de conflit si la gestion reste informelle. Un accompagnement de la part des États du Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire, sera la bienvenue pour anticiper des problèmes futurs sur le partage de ces ressources naturelles transfrontalières.

Bibliographie

Delville P. L., 2005. Conditions pour une gestion décentralisée des ressources naturelles, in Bertrand A. et Montagne P. dir.,l’Etat et la gestion locale durable des forêts en Afrique francophone et à Madagascar, CIRAD/Le Harmattan, pp. 143-162.

Granier L., 2010. Les conventions locales, des outils efficaces de gestion concertée des ressources naturelles ? comité technique « foncier et développement », 4 p.

Karambiri B. L. C. N., Sanogo S., Yanogo P. I., 2023. Perception locale des défis de la gestion des ressources naturelles transfrontalières dans les communes de Kampti et de Yargatenga au Burkina Faso, International Journal of Innovation Scientific Research and Review, Volume 05, Issue 06, pp.4732-4737.

Nguinguiri J. C., 1999. Les Approches participatives dans la gestion des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale. Revue des initiatives existantes. CIFOR, 28 p.

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