Dans un contexte de chômage aggravé par une crise sécuritaire, l’éducation financière des jeunes au Burkina Faso revêt une importance cruciale pour leur avenir et le développement économique du pays. Afin de fournir aux jeunes les connaissances et les compétences nécessaires pour gérer efficacement leurs ressources, et leur offrir la possibilité de prendre des décisions financières éclairées, une conférence nationale a été organisée par Compassion International. Dans la perspective de parvenir aux résultats escomptés, l’expertise de trois hommes a été sollicitée par l’Association des anciens bénéficiaires des Centres de développement pour enfants (CDE), en partenariat avec Compassion International.

Ousséni G. Sourabié, Dominique Tamini et Yann Toé (de droite à gauche) sont les conférenciers qui ont édifié les jeunes participants.

Il s’agit d’Ousséni G. Sourabié, responsable marketing et communication ; de l’économiste Dominique Tamini et du banquier Yann Toé, expérimenté en éducation financière et dans l’accompagnement des petites et moyennes entreprises. Ces trois conférenciers ont abordé le sujet sous diverses thématiques : « Comment devenir économiquement indépendant », présentée par Yann Toé ; « Comment gérer au mieux son argent ? », expliquée par Dominique Tamini ; et « Comment créer des ressources financières », développée par Ousséni Sourabié.

L’éducation financière exige de la discipline

Les conférenciers ont tous été pédagogues dans leurs démarches, pour transmettre sans ambiguïté leur savoir aux futurs leaders. L’on retient des différentes communications, une valeur fondamentale à cultiver, qui n’est autre que la discipline dans la gestion des ressources. En clair, il est recommandé d’apprendre à faire violence sur soi afin d’épargner le peu que l’on gagne pour l’investir plus tard dans un projet.

« Aujourd’hui, le digital occupe une place importante dans la gestion des ressources financières », Dominique Tamini, économiste, directeur général d’une institution financière de la place.

Ce qui exige que l’intéressé soit à mesure d’élaborer un budget. Le budget en effet est ici défini comme un instrument qui récapitule les revenus estimés et montre comment ceux-ci vont être dépensés sur une période donnée. Le budget est, selon Dominique Tamini, un outil qui aide à décider comment gagner plus d’argent et comment l’utiliser pour atteindre ses buts.

Il ne faut pas attendre d’avoir beaucoup d’argent avant de pratiquer l’éducation financière, dira Ousséni Sourabié. Pour lui, l’éducation financière commence dès lors qu’on a dix francs. « Quand tu as dix francs, tu divises cela en deux. Tu utilises cinq francs pour des dépenses courantes et l’autre moitié pour garder », montre-t-il, en affirmant que c’est simplement cela.

« Quand vous voyez des gens circuler en ville avec de gros véhicules, qui ont de grandes maisons, ce n’est pas un hasard. C’est parce qu’ils savent économiser 100 francs quand ils ont 1 000 francs », Ousséni Sourabié, responsable marketing d’une structure financière de la place.

Cette conférence sur l’éducation financière a permis aux jeunes de comprendre les notions de budget, d’épargne, d’investissement et de gestion des risques. Toute chose qui pourra sans doute les aider à éviter les pièges de l’endettement excessif et de la mauvaise gestion financière. En leur donnant les outils pour développer une culture d’économie et d’entrepreneuriat, les initiateurs veulent encourager également la création d’emplois et l’innovation économique dans le pays.

Des exemples de réussite

À cet effet, deux jeunes entrepreneurs ont été présentés à l’assistance pour servir d’exemples à cette jeunesse qui aspire à l’autonomie et l’émancipation financière. Passionnée de lecture, Soraya Toni, élève en classe de 1re, a créé la première bibliothèque gratuite du Burkina Faso à l’âge de 16 ans. Ne percevant pas de salaire parce qu’elle n’a pas l’âge de travailler, Soraya Toni, pour réaliser son rêve, a dû faire recours à ses relations. C’est ainsi qu’elle présenta son projet à son professeur d’anglais. Ce dernier l’admirait pour ses performances dans sa matière.

« La bibliothèque ‘Change’ a ouvert ses portes le 8 janvier 2023 », Soraya Toni, élève en classe de 1re. Elle ambitionne d’avoir le plus grand réseau de bibliothèques gratuites du monde.

« J’aime me plonger dans un monde imaginaire rempli de lettres, de mots et de phrases. Ma passion pour la lecture s’est accentuée à l’adolescence. J’ai commencé à lire beaucoup plus de livres, à en acheter beaucoup plus, et je suis devenue membre de plusieurs bibliothèques. En juin 2022, je me rends à une de ces bibliothèques où lorsque j’étais sur le point de tendre un billet de 5 000 francs CFA à la gentille dame pour qu’elle me remette ma carte de membre, me survient tout un coup un déclic. Je me suis dit alors, c’est tellement facile pour moi de débourser cette somme pour avoir accès aux livres, mais est-ce la même chose pour tout le monde ? », confie-t-elle.

Soraya Toni raconte que cette raison l’a poussée à créer la toute première bibliothèque 100% gratuite du Burkina Faso, pour que personne n’ait à réfléchir deux fois avant d’avoir accès à des livres. C’est donc grâce aux bonnes volontés, à l’instar du professeur de Soraya, qu’elle parvint à ouvrir sa bibliothèque.

« Compassion International a fait du développement holistique de l’enfant et du jeune, sa mission », Issiaka Tiemtoré, directeur national de Compassion International.

La vision des organisateurs de cette activité est de rendre les jeunes capables d’avoir le contrôle de leur vie financière pour ne pas rester exclusivement dépendants des opportunités d’emploi limitées. L’éducation financière leur permet de développer des compétences de planification à long terme, d’investissement et de gestion des risques, permettant de se préparer aux défis économiques de l’avenir.

Pour rappel, Compassion International, qui est l’un des principaux acteurs de cette initiative, intervient au Burkina Faso depuis 2004 et travaille en partenariat avec 440 églises évangéliques. Ces églises prennent en charge plus de 106 000 enfants, dont 41% sont jeunes (de 12 à 22 ans) et près de 2 000 mères et nourrissons à travers les Centres de développement pour enfants et jeunes, repartis dans douze régions du pays.

Hamed NANEMA
Lefaso.net