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Crise ivoirienne : Gbagbo ragaillardi, Soro sur le gril

Publié le mercredi 10 août 2005 à 08h15min

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Même si Laurent Gbagbo, le chef de l’Etat ivoirien, maintient mordicus que la présidentielle se déroulera le 30 octobre prochain en dépit d’obstacles qui recommandent son report, il est évident qu’ils sont nombreux les Ivoiriens à penser qu’il n’en sera rien vu que tout est réuni aujourd’hui pour son report sine die.

En effet, après les Accords de Pretoria I (6 avril) et de Pretoria II (29 juin), toute la communauté s’était remise à croire à un scrutin possible et surtout au retour de la paix dans ce pays saisi par les démons de la division le 19 septembre 2002.

Dans la capitale sud-africaine, les protagonistes de la crise ivoirienne s’étaient mis d’accord sur tout pour le retour à une vie politique normale : acceptation des amendements relatifs aux lois sur la Commission électorale indépendante (CEI), financement des partis politiques, problématique de la nationalité...

Bref, Pouvoir comme Opposition avaient trouvé un modus vivendi, il est vrai sous le "diktat", l’entregent et le tact du président sud-africain Thabo M’Beki. Cependant, si sur le papier tout était résolu, sur le terrain, l’essentiel du boulot restait à faire.

Ainsi, si le 9 juillet à Yamoussoukro, les responsables des militaires loyalistes et des forces de l’ex-rebellion ont apposé leur signature sur des documents pour dire que le fameux DDR a désormais un calendrier clair, jusqu’à présent certains estiment que chaque camp a toujours la possibilité de faire le coup de feu contre l’autre.

Ce qui n’est pas faux, car le 2 juin dernier, à Duekué, des populations ont été massacrées, et comme toujours en pareil cas, chacun s’en est lavé les mains. Bis repetita les 23 et 24 juillet, lorsque des camps de police et de gendarmerie sont attaqués à Anyama, dans la périphérie d’Abidjan, et à Agboville.

Jusqu’à l’heure où nous traçons ces lignes, rien n’a été clairement dit sur l’identité de ces hommes armés de kalachnikovs qui ont effectué ce raid sanglant dans ces cantonnements de corps habillés. Des événements graves qui donnent raison à ceux qui estiment que quelque part, des personnes ont intérêt à ce que la paix ne revienne pas au bord de la lagune Ebrié.

En effet, à qui profitent toutes ces remises en question du processus ? A qui profitent ces tueries ? Il faut même reconnaître que la question sécuritaire est le problème n°1 en Côte d’Ivoire, car loin d’être résiduel comme veut le faire croire l’entourage du président Gbagbo, les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour les dirigeants de l’opposition, en particulier pour Alassane Dramane Ouattara (ADO) et pour Bédié, qui, pourtant, projettent de rentrer à Abidjan courant août.

A ce qu’on dit, s’ils tardent à revenir, c’est parce qu’ils savent que malgré la présence de gorilles sud-africains qui offriraient volontiers leur poitrail pour les protéger, rien n’est sûr. Et les récents propos de Laurent Gbagbo ne sont pas pour les rassurer : "S’ils (ADO et Bédié) attendent que je fasse quoi que ce soit pour leur sécurité pour rentrer en Côte d’Ivoire, ils ne rentreront pas, car je ne ferai rien, ce sont eux qui ont créé cette situation".

Et ce n’est pas tout ! La classe politique ivoirienne reste également circonspecte sur non seulement la légifération par ordonnances de Laurent Gbagbo (en l’absence du référendum, et conformément à l’esprit de Pretoria I et II), que lui confère l’article 48 de la Constitution, mais craint que toutes ces violences ne soient orchestrées à dessein par Gbagbo, afin de créer un vide constitutionnel au-delà du 30 octobre, ce qui lui permettrait de continuer à gouverner, rien n’indiquant légalement qu’il doive faire autre chose.

Des arguments que rejette le camp de l’enfant de Mama, qui estime que le report indéfini de la présidentielle, s’il est le fait d’un camp, peut amener l’ONU à sévir. Depuis le 7 août dernier, le médiateur de la crise ivoirienne, Thabo M’Beki, a tranché, du moins pour le moment, sur l’application textuelle des accords de paix interivoiriens.

En effet, après que son envoyé spécial, en la personne du ministre de la Défense, Mosiuoa Lekota, se fut rendu le samedi à Abidjan, Thabo M’Beki a affirmé, dimanche, que les "lois promulguées le 15 juillet par le président Gbagbo étaient conformes aux accords de paix".

Le Missi dominici du chef de l’Etat sud-africain a apporté aux principaux acteurs de la crise ivoirienne une réponse à leurs préoccupations relatives aux lois électorales adoptées par décret, sur décision du président ivoirien. L’opposition et la rebellion avaient demandé, à la mi-juillet, à M’Beki de trancher sur ces questions.

En clair, ils demandaient ni plus ni moins la révision d’une partie de ces législations portant sur le processus électoral et l’identification. Réponse de M’Beki : "Les décisions prises par Gbagbo sont conformes aux accords de paix de Linas-Marcoussis (janvier 2003) et de Pretoria I et II". Voilà Gbagbo ragaillardi et l’ex-rebellion ou plutôt Soro sur le gril.

Si le G7 (coalition de 4 partis de l’opposition et des Forces nouvelles) n’a pas trop commenté cette sortie du médiateur, il n’en demeure pas moins qu’il estime que l’arbitre a pris parti et que l’explication réside dans le fait que l’Afrique du Sud aurait vendu des armes à Gbagbo. Ni le Pouvoir à Abidjan, ni Pretoria n’ont démenti. Les questions principales étant : les Ivoiriens voteront-ils le 30 octobre pour élire un président ? Comment ? Sinon que se passera-t-il après ?

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Observateur Paalga

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