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5 Aout 1960-5 Aout 2016 : 56 ans et toujours pas adulte !

Publié le vendredi 5 août 2016 à 01h44min

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5 Aout 1960-5 Aout 2016 : 56 ans et toujours pas adulte !

Il y a 56 ans, exactement, la Haute Volta accédait à la souveraineté internationale. Une ère nouvelle commençait pour la Haute Volta. Après avoir dansé « l’indépendance tchatcha », il a fallu se réveiller pour savoir quoi faire du nouveau statut. 56 ans après, « le blanc » est parti, les rêves d’hier peinent à se réaliser ; et le Burkina Faso a l’air d’un grand gaillard à qui on donne toujours le biberon.

« Aujourd’hui, 5 août 1960, à zéro heure, au nom du droit naturel de l’homme à la liberté, à l’égalité, à la fraternité, je proclame solennellement l’indépendance de la République de Haute-Volta ». Il y a exactement 56 ans que Maurice Yaméogo, premier président de la Haute Volta proclamait l’indépendance ce du pays. Le compte à rebours était enclenché.

Nous sommes aujourd’hui à 56 ans. Il n’y a plus de fouets sur les corps lacérés des voltaïques depuis 56 ans. Les travaux forcés sous lesquels croupissaient nos aïeux nous sont depuis étrangers. Notre pays nous appartient, avec ses richesses, aussi maigres soient-elles. La liberté nous l’avons acquise, mais qu’en avons-nous fait ?

Le Burkina Faso, comme bien d’autres pays africains qui ont également reçu leur indépendance en 1960, apprend encore à marcher. De l’avis de bien d’observateurs, nos pays africains à leur accession à la souveraineté internationale, était mieux logés que les pays asiatiques. Mais depuis la donne a changé. Les ‘’dragons’’ se sont réveillés, faisant trembler même ceux qui les avaient longtemps gardés sous leur joug. Nos pays semblent encore plongés dans un sommeil si paisible, qu’on se demande s’ils vont se décider à se réveiller un jour.

Des politiques stériles ?

Maurice Yaméogo (5 aout 1960-3 janvier 1966), Sangoulé Lamizana (3 janvier 1966-25 novembre 1980), Saye Zerbo (25 novembre 1980-7 novembre 1982), Jean Baptiste Ouédraogo(8 novembre 1982-4 aout 1983), Thomas Sankara (4 aout 1983-15 octobre 1987), Blaise Compaoré (15 Octobre 1987-31 octobre 2014), Yacouba Isaac Zida(31 octobre 2014- 21 novembre 2014), Michel Kafando ( 21 novembre 2014-29 novembre 2015), et depuis 29 décembre 2015 Roch Marc Christian Kaboré.
Politiquement, la Haute Volta et depuis exactement 32ans, le Burkina Faso a eu une histoire très mouvementée. Neuf présidents en 56 ans, dont 27 ans pour Blaise Compaoré. Chacun est venu avec sa méthode, a affiché sa ferme volonté. Renversés par un coup d’Etat, beaucoup l’ont été. Thomas Sankara avec la révolution d’aout 1983 a remis les pendules à l’heure, clamé la rupture, tracé une trajectoire de développement endogène, il n’ira pas non plus au bout de ce qu’il avait voulu pour le pays qu’il a baptisé Burkina Faso (Patrie des hommes intègres).

Mais depuis, les différentes politiques mises en place n’ont pas réussi à sortir le pays du sous-développement. Des Programmes d’ajustement structurels, en passant par les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté, les stratégies de croissance accélérée et de développement durable, et maintenant le plan national développement économique et social, le pays a beau changé de fusil d’épaule, les défis restent énormes.

Le Burkina se nourrit toujours à l’extérieur

Malgré les efforts consentis, le Burkina Faso, pays agricole essentiellement, n’arrive toujours pas à se nourrir. Le riz dans nos assiettes est essentiellement Thaïlandais, alors que la production locale est entassée dans les magasins, faute d’une politique de promotion.Le pays est peut-être premier producteur africain de coton, une culture héritée de la période coloniale, mais n’arrive pas à produire de quoi nourrir sa population.

56 ans après les indépendances, c’est avec une légitime frustration quand on assiste à des remises de dons de vivre de la part des partenaires techniques et financiers. Comme si le pays tendait toujours une sébile, pour qu’on y jette quelques grains pour calmer sa faim. Il s’agit d’un pays souverain !

56 ans après les indépendances, la plupart des dirigeants pays africains francophones, se sentent toujours obligés, une fois élus, de faire le pèlerinage de Paris. Etre reçus par le président français au perron de l’Elysée avec le large sourire d’un nègre content. Lesprésidents Burkinabè, à quelques exceptions, sont toujours dans cette dynamique. Une attitude qui ajoute de l’eau au moulin de ceux qui estiment que la proclamation de l’indépendance n’était qu’une comédie organisée. L’ancienne métropole, continuant subtilement à décider de notre destin.

Mais ce discours qui consiste à toujours rejeter la responsabilité de ses malheurs sur les autres, est obsolète. Pendant longtemps, on l’a entendu. Le Burkina Faso comme bien d’autres pays africains n’ont pas été les seuls pays colonisés. Des anciennes colonies en Asie ont réussi à prendre leursresponsabilités, rompre avec les pratiques et politiques impérialistes qui les desservaient. Avec responsabilité et courage, certains dirigeants de pays anciennement pauvres ont réussi à mettre leurs pays sur la voie du développement. Et c’est égal à égal qu’ils discutent maintenant avec les anciens colons.

Mais peut-on continuer à être nourri, à vivre de dons, et pourvoir élevé la voix ?C’est là qu’intervient la responsabilité des autorités. Le développement ‘’prêt-à-porter’’, conçus par les grandes institutions internationales, avec la bénédiction de ceux qu’on appelait bailleurs de fonds et maintenant partenaires techniques et financiers, ont montré leur limites.

Manger à sa faim, avoir de l’eau potable, aller à l’école, se soigner, trouver un emploi. Ainsi de résume la politique de développement voulue par le jeunes, des villes et surtout des campagnes.

Mais en attendant, les rescapés, c’est-à-dire les jeunes qui malgré les conditions difficiles sont allés à l’école,diplômés, prennent d’assaut les rangs à chaque annonce de recrutement. Pour les concours directs de la fonction publique cette année 2016, ils sont près d’un millions de candidats pour 12 324 postes. De quoi créé des insomnies à nos dirigeants. Malgré les expressions en vogue comme l’auto-emploi, la face hideuse de la réalité est là. Les curricula de formation du primaire au supérieur ne préparent pas les jeunes apprenants à s’auto-employer.

Les problèmes sont connus, les diagnostics des entraves au bien-être ont été longtemps faits, les politiques qui repoussent les problèmes au lieu de les résoudre ont été expérimentées. Il faut maintenant se réveiller pour de vrai. Clamer sa dignité, se saigner, si tant est que la politique est un don de soi. Dans quelques décennies, nos enfants et petits-enfants ne doivent plus vivre cette situation de pays éternellement assisté que les dirigeants eux-mêmes, comme s’ils y tiraient un plaisir, disent qu’il ne peut vivre sans aide étrangère. C’est maintenant qu’il faut travailler à s’affranchir de l’aide de demain.

Bonne fête de l’indépendance, en attendant le 11 décembre pour les festivités.

Tiga Cheick Sawadogo (tigacheick@hotmail.fr)
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