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Frère Firmin Tankoano, supérieur provincial des frères de la Sainte Famille : “Une société qui n’est pas bien formée, bien éduquée, n’a pas d’avenir”

Publié le vendredi 23 janvier 2009 à 16h03min

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Le samedi 24 janvier 2009, les frères de la Sainte Famille du Burkina et l’ensemble des anciens du juvénat saint Joseph de Saaba célèbrent le jubilé d’or de la fusion des frères avec la Sainte Famille de Bellay. Frère Firmin Tankoano, supérieur de la province Sainte Anne qui regroupe le Burkina, la Côte d’Ivoire et le Bénin nous donne les missions des frères, le bilan de leur participation à la vie de l’Église et du Burkina, etc.

Sidwaya (S.) : Qui sont les frères de la Sainte Famille ?

Frère Firmin Tankoano (F.F.T.) : ce sont des religieux catholiques, engagés dans l’Église pour une mission déterminée. La première est l’éducation chrétienne des jeunes. La deuxième est la catéchèse et la troisième l’animation liturgique. Il n’y a pas de classification déterminée, mais ce sont les trois missions essentielles des frères de la sainte famille dans l’église et dans le monde.

S. : Les frères de la Sainte Famille sont plus connu par le rôle qu’ils jouent dans l’éducation. Pourquoi mettez-vous l’accent dans l’enseignement ?

F.F.T. : Notre mission s’articule autour de trois objectifs. Et si aujourd’hui nous sommes au niveau de l’éducation, c’est parce que nous trouvons que dans les autres domaines, il y a beaucoup de congrégations qui font la catéchèse et l’animation liturgique. Cela ne veut pas dire que nous ne le faisons pas car, dans tous nos établissements, nous faisons la formation continue aux jeunes que nous appelons “cours d’éducation civique et religieuse”. Nous leur faisons en même temps la catéchèse. Sinon, aujourd’hui, de manière générale, la mission des frères de la Sainte Famille dans le monde est l’éducation. Notre fondateur, frère Gabriel Taborin, appelait cela : “aider le jeune à se frayer un chemin dans la vie en s’abaissant vers lui, pour le ramener vers soi”. C’est toute cette pédagogie que les frères de la Sainte Famille assument, parce que, si nous consacrons plus de temps à l’éducation, c’est que nous trouvons qu’elle est un facteur essentiel dans le développement d’une société. Une société qui n’est pas bien éduquée, bien formée, n’a pas d’avenir.

S. : Pourquoi créer des écoles alors que les écoles dites de la mission existent depuis ?

F.F.T. : Il faut faire recours à l’histoire même de l’Église de notre pays. C’est vrai que notre premier établissement créé en 1958 est le juvénat Saint Joseph de Saaba. Aussi, en 1969, l’Église pour raison de difficultés internes, a rétrocédé les écoles primaires à l’État. Cependant, elle a conservé les établissements secondaires. En 1996, lorsqu’il y a eu la réfondation du système scolaire, la conférence épiscopale a décidé de développer l’enseignement primaire et secondaire. Et nous avons donné notre accord pour les accompagner.

S. : Mais, vous aviez anticipé avant la réfondation ?

F.F.T. : Oui, car en 1983, nous avons ouvert le collège privé Wend Manegda à Ouagadougou et le lycée Sainte Anne de Nanoro où sont dispensé l’enseignement technique et général. Pour la technique, nous encadrons les jeunes sur l’agronomie et l’élevage. En 1994, nous avons ouvert les portes de Gabriel-Taborin qui est aussi un établissement d’enseignement technique et général. Les différents établissements que nous avons créés dans tout le pays permettent d’élargir le champ d’évolution et de formation des jeunes. Mais au- delà de l’enseignement formel, nous sommes aussi dans le non formel. Nous nous intéressons aux jeunes non scolarisés que nous formons pendant trois ans à des métiers tels que la culture maraîchère, l’élevage, la soudure et la menuiserie à Koudougou, Goundi et Roulou. Dans le cadre spécifiquement religieux, nous participons à la formation des élèves catéchistes.

S. : Quel est le bilan que vous faites de votre intervention dans l’enseignement ?

F.F.T. : Il est difficile à un être humain d’être satisfait de tout ce qu’il fait. Mais lorsque nous regardons le chemin parcouru, il y a de quoi rendre grâce à Dieu. Si je prends le cas du juvénat, de 1958 à nos jours, nous avons formé 1302 jeunes. De ces jeunes, 167 sont frères et 22 prêtres. Le reste sert la nation dans tous les domaines à savoir la santé, l’éducation, la sécurité et certains occupent de hautes responsabilités. D’où le thème de notre jubilé d’or “50 ans de formation humaine et religieuse au service de l’Église et de la nation”.

S. : Il est de plus en plus question de la baisse du niveau de l’enseignement et les familles s’attellent à trouver des places dans vos établissements pour l’éducation de leurs enfants. Qu’elle lecture faites-vous de ce phénomène ?

F.F.T. : Nous constatons en effet que d’année en année, il y a une baisse de niveau. Cependant, il faut dire que c’est un phénomène international. Mais comme on le dit, quand on jette une pierre, chacun protège sa tête. A notre niveau, nous travaillons à corriger ces lacunes. Car les causes sont le nombre pléthorique dans les classes. Un enseignant, quelle que soit sa pédagogie, aura du mal à faire passer son message. C’est pourquoi, nous mettons l’accent sur la discipline qui est un facteur de réussite. Aussi, nous prenons nos enseignants comme des éducateurs et non comme de simples fonctionnaires. Enfin, nous amenons les jeunes à prendre en main leur avenir. Aussi, il faut relever que nous savons qu’au niveau des ministères en charge des enseignements, ils mettent bouchées doubles pour corriger le tir.

S. : La scolarité dans les écoles des frères est-elle étudiée afin de soulager les plus pauvres ?

F.F.T. : Nous sommes une structure d’Église et notre rôle est d’abord social. C’est-à-dire, aider les familles à éduquer et à former les jeunes. C’est pourquoi, les scolarités sont fixées par l’Union nationale des établissements secondaires catholiques (UNEC) découvert avec le secrétariat national de l’enseignement catholique (SNEC) à un prix social qui tourne autour de 76 milles F CFA pour le premier cycle et de 96 mille F CFA pour le second cycle. Ce qui est une broutille par rapport à certains établissements privés. Notre démarche est essentiellement social. Aussi, nous faisons tout pour donner aux jeunes beaucoup de chance de se former et de réussir leur vie. Nous mettons à leur disposition des bibliothèques bien fournies et de plus en plus, nous installons des salles informatiques.

S. : Quelle démarche faut-il entreprendre pour devenir frère de la Sainte Famille ?

F.F.T. : Il faut d’abord ressentir l’appel de Dieu. Les jeunes sont alors suivis dans les différentes paroisses et font le test d’entrée au juvénat qui est le petit séminaire des frères. Pour le cas spécifique du Burkina, c’est le juvénat Saint Joseph de Saaba (qui souffle ses 50 bougies le 24 janvier 2009) qui accueille ces jeunes et les aide à cultiver leur vocation.

S : Comment se prépare la célébration du jubilé d’or du juvénat de Saaba ?

FFT : L’évènement se prépare très bien. L’accent est mis sur la liturgie. La messe sera dite le 24 janvier à 9h par Mgr l’archevêque de Ouagadougou, Jean Marie Compaoré. Aussi, il est bon de rappeler que nous sommes nés à Guiloungou dans les années 1945. Après, nous avons fait la fusion avec les frères de la Sainte Famille de Bellay en 1958. Mais le décret pontifical consacrant cette fusion est intervenu le 10 février 1959 et c’est cette fusion que nous fêtons en même temps que l’anniversaire du juvénat. Le parrain du jubilé est Mgr Wencelas Compaoré, évêque de Manga qui, au niveau de la conférence épiscopale, s’occupe de l’éducation. Chacun des anciens juvénistes met la main à la pâte pour que la fête soit belle. Nous plaçons ce jubilé sous le signe de l’action de grâce. Nous disons merci au Seigneur pour tout ce qu’il a fait pour l’Église du Burkina et pour le juvénat.

S : En dehors de la célébration religieuse, qu’est ce qui est prévu ?

F.F.T. : Nous aurons une soirée récréative. Le frère Honoré Ouédraogo qui est historien animera une conférence sur “La vie des frères de 1945 à nos jours : passé et perpectives”. Il y aura également les retrouvailles des anciens et l’exposition des œuvres réalisées par les frères comme la pompe volanta fabriquée à Saaba.

S : Quelle est l’ambition des frères de la Sainte Famille pour le développement du Burkina Faso ?

F.F.T. : Au niveau de l’éducation, nous pensons qu’il y a encore beaucoup à faire, car les jeunes n’ont pas encore conscience qu’il faut travailler et prendre leur vie au sérieux. Aussi, nous voulons amener nos enseignants à comprendre que l’essentiel ce n’est pas de donner les cours, mais d’être des éducateurs. Pour ce qui est des parents d’élèves, nous travaillons à ce qu’ils nous accompagnent dans la réussite de leurs progénitures. Nous nourrissons aussi une grande ambition pour les jeunes du secteur informel. Nous avons eu des terres à Léo et nous voulons que nos jeunes formés à Nanoro y partagent leurs expériences quatre années durant avec les autres jeunes pour un développement réel de l’agriculture et de l’élevage au Burkina Faso.

Interview réalisée par Jonathan YAMEOGO

Sidwaya

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