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Tchad : gagner la guerre de la paix après les violentes batailles

Publié le lundi 11 février 2008 à 10h51min

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Idriss Deby Itno

Les feux de l’actualité s’éloignent de plus en plus de N’Djaména, la capitale du Tchad. Ce qui est bon signe. Puisque dans le faux débat qui veut que la presse internationale ne jette son dévolu sur nos Etats qu’en période difficile, voire de crise sanglante, on occulte souvent la grande part de responsabilité des Africains eux-mêmes.

En plus de cinquante années d’indépendance, le Tchad a enregistré plus de trente années de guerre, dues en grande partie à l’incurie de ses fils. Et pour être moins globalisant, de sa classe politique. Deux aveux d’impuissance montrent que les hommes politiques tchadiens qui ne voient que le fauteuil présidentiel ont œuvré à éloigner le pays des sentiers de la paix.

En effet, à un Tchadien qui disait qu’on ne connaît de musique ici (NDLR au Tchad) que le cliquetis des armes, répond un autre qui avouait qu’au Tchad "quand cent personnes se réunissent pour créer une association pour la paix, elles ont moins de chance d’être soutenues que lorsque cinq personnes se retrouvent pour créer un mouvement insurrectionnel". Là les aides affluent de partout. Conséquence, le pays n’a jamais pu quitter la zone rouge de la guerre. Chapeau bas à Idriss Deby Itno qui a dirigé plus de quinze années un pays habitué aux soubresauts. Après donc avril 2006, où les colonnes rebelles étaient à N’Djaména, cette année encore, le même scénario s’est produit.

Simplement parce que les cœurs n’ont pas évolué dans le sens de l’apaisement. De sorte que comme en avril 2006, Idriss Déby a seulement gagné une bataille. La guerre reste pour lui, une ligne d’horizon, parce que cette guerre ne saurait être comprise par des victoires militaires, mais par un pari à gagner sur la démocratie. A coup sûr, Déby sait ce que "ses" rebelles qui ne sont que "ses" anciens alliés et parents lui reprochent. Avec lui, la communauté internationale sait que la fermeté, le refus de dialogue, la politique du baton sont les causes qui pertubent la quiétude des Tchadiens. Que fait-on alors pour l’amener à accepter un cadre de dialogue ?

Au nom du principe de non ingérance dans les affaires intérieures d’un Etat souverain, on se refuse à prendre parti. Mais au nom des enjeux économiques, on peut apporter son aide fût-elle logistique. Y aura-t-il toujours des enfants de Zoé dans une forme d’arche pour les deals et venir comme une aubaine, un pain béni pour sceller des échéanges ?Rien n’est moins sûr. Aujourd’hui, la seule personne qui peut aider à mettre un terme à ces rebellions répétées se nomme Idriss Deby Itno. Il incarne la légalité et la légitimité parce qu’il est le choix des Tchadiens par les urnes.

A ce titre, il est celui qui doit accepter donner un signal fort. Deby a après ces sanglantes batailles une occasion d’entrer dans l’histoire d’un pays qui a connu autant de guerres que de paix dans son évolution contemporaine. Pourra-t-il avoir le flair, lui le chef militaire, le général qui n’hésite pas à monter au front à la tête de ses hommes comme le faisait un certain général Moshe Dayan pour laisser tomber le côté faucon pour la colombe comme un autre général israëlien, Itzak Rabin ?

Au-delà de la haine mutuelle voire tribale Deby doit pouvoir avoir la sagesse de tendre le rameau d’olivier à son opposition - armée comme républicaine, au lieu de brandir l’arme afin d’amorcer une véritable discusion avec les Tchadiens. S’il prend prétexte du fait que ce ne sont que des rebelles, il aura oublié qu’avant d’endosser les tuniques des rebelles, c’était hier encore ses frères, ses proches collaborateurs. Mais en apparence et même dans les faits, la paix reste une quête. La chasse à l’homme, notamment aux opposants sous prétexte qu’ils pactisaient avec les rebelles ne sera pas une aubaine pour poser les bases de discutions tous azimuts.

Il y a quelques semaines, des associations de femmes, de jeunes avaient battu le pavé pour lui exprimer tout leur soutien. Parmi ce monde, certains sont probablement morts, beaucoup ont dû se retrouver à Kousséry (Cameroun). Et personne n’a pu vraisemblement le défendre.

Le général Déby sait qu’il a contre lui la très vaste étendue de son pays dont il ne peut se vanter de contrpoler l’entièreté. Il a contre lui également ses relations tendues avec son voisin soudanais qui l’avait aidé à s’asseoir au pouvoir, un certain décembre 1990.
Deby doit avoir aussi à l’esprit cette phrase célèbre d’un autre général, français, Charles de Gaulle qui affirmait "la France a perdu une bataille, mais pas la guerre". Et en tacticien averti, le président tchadien pourra juste lire "N’Djaména a gagné une bataille et devra mettre tout en œuvre pour gagner la guerre". Celle de l’ouverture, du dialogue et de la détente.

Par Jean Philippe Tougouma

Sidwaya

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