C’est dans la journée du 11 juin 2007 que les gardes de la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) ont constaté que l’un de ses prisonniers et pas des moindres répondait absent à l’appel. Le Capitaine Ouali Luther Diapagri - puisque c’est de lui qu’il s’agit- avait bénéficié d’une permission de 96 heures allant du 7 au 10 juin 2007 pour préparer ses papiers de pension. Vraisemblablement, le détenu Ouali ne s’est jamais fait l’auteur d’acte d’indiscipline et c’est pour cette raison que quitus lui a été donné d’établir ses papiers pour préparer ses vieux jours.

Dans une interview accordée au quotidien Le Pays, le Commissaire du Gouvernement, le Magistrat militaire, Jean Claude Bagoro disait pour justifier la confiance à eux placé en Ouali : « Cela fait pratiquement quatre ans que Ouali est à la MACO. Il y a une sorte d’observation en rapport avec le comportement de la personne et, de droit, après avoir purgé un certain nombre d’années, elle peut bénéficier de ces faveurs. Et quoi qu’on dise, Ouali est un capitaine, et comme chez un officier la parole donnée est une vertu, nous n’avons pas estimé nécessaire de mettre des hommes armés derrière lui. Si l’homme n’avait pas une bonne conduite, la permission lui aurait été systématiquement refusée ou alors, on serait amené chaque matin à le conduire pour qu’il puisse rassembler ces papiers et le ramener ».

La confiance n’exclut pas le contrôle dit-on. La conséquence, elle est là, les sentinelles de la MACO sont sortis comme des dindons de la farce : Gros Jean et yeux écarquillés ! On peut hâtivement dire que : « Même si le chat revient de la Mecque, les souris n’ont pas foi en sa conversion ». Mais là aussi nous sommes dans un Etat de droit et le détenu Ouali doit jouir de ses droits au même titre que les autres. Sa discipline, les années passées au cachot, et même mieux, les occasions d’évasion qu’il a laissé passer militent en sa faveur.

Mais là où le bât blesse c’est quand le Commissaire du Gouvernement déclare : « Si Ouali a obtenu cette permission sans problème, c’est parce qu’il jouit des mêmes droits et traitements que les autres. Il n’ y a pas de raison qu’on se livre à de la discrimination. A la MACO, tous les détenus sont logés à la même enseigne ».
Pourquoi un officier, qui a connaissance de l’efficacité des forces de sécurité et de défense dans notre pays va-t-il risquer sa vie en s’évadant dans une ville (c’est la capitale même) censée être sous haute sécurité ?
A moins qu’on ne nous mette devant le fait que toutes les forces de l’ordre du Burkina ont abdiqué dans leur mission, cela s’explique difficilement.

La vraie raison est que Ouali et son compagnon d’arme Naon Babou ont subi des pressions et ont même été mis en quarantaine à plusieurs reprises au sein de la MACO. Ce fut le cas lors de l’évasion des prisonniers de la MACO suite à une grève des gardes et aussi lors du concert d’armes des militaires les 20, 21 et 22 décembre 2006.Dans plusieurs éditions, notre hebdomadaire a déploré le traitement austère que les deux détenus subissaient à la prison. Du reste, les autres prisonniers- mêlés dans cette affaire de coup d’Etat au goût de couleuvre difficilement avalable pour le peuple- ayant bénéficié d’une liberté provisoire, on se demande, si cette largesse s’était étendue à Ouali et Naon, est-ce qu’on en serait arrivé là ?

Nous ne doutons pas que Ouali soit allé voir ailleurs, mais la pratique du régime fait que l’opinion publique doute de la véracité de cette évasion. Elle croit en une échappatoire du pouvoir pour expliquer ensuite une probable mort du Capitaine Ouali. Cela est d’autant conforté que dans un passé encore vivace dans les esprits, cet intox a servi de prétexte pour envoyer ad patres un certain nombre d’officiers « dérangeurs et gênants ».

Pour ce qui est du jugement de cette tentative de coup d’Etat, l’opinion garde en esprit dans sa majorité qu’il s’agissait d’un exutoire pour accuser des militaires indésirables. Rien du reste au cours de ce procès n’est venu démentir de tels faits. La montagne avait accouché en son temps d’une souris chétive et malade. Rien que pour cette simple raison, il aurait fallu être indulgent avec ce capitaine qui a eu des vertes et des pas mûres au sein de l’armée tout au long de son parcours qui a été entrecoupé. Mais tel n’a pas été le cas.

Ouali a sans doute senti sa vie menacée à quelques niveaux que ce soit sinon il se serait présenté comme un ange à l’appel du lundi matin à la MACO. En pensant aux sorts subis par certains, on ne peut que comprendre que le détenu Ouali se sentait comme à Guatanamo ici à Ouagadougou. Il a certainement senti que pour lui, il n’ y aura comme certains de ses co-deténus ont pu l’avoir ni grâce présidentielle, ni liberté provisoire, alors pourquoi purger encore six ( 06 ) ans de plus ?

Roger Sawadogo

Bendré