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Le bêtisier des dirigeants africains

Publié le vendredi 2 avril 2004 à 07h28min

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L’on est parfois tenté de se demander comment certains
responsables politiques, s’ils sont détenteurs d’un mandat
électif, ont pu mériter la confiance de leurs concitoyens au point
d’avoir pu recueillir leurs suffrages. S’ils exercent une haute
fonction à eux confiée, comment ils ont pu passer par les
mailles de la précaution de vérification de leur compétence ou
de leur manière d’appréhender les préoccupations des
hommes qu’ils ont la charge de diriger.

La question mérite
autant d’être posée que de la nature des propos qu’ils tiennent
quotidiennement dépend le sort d’une nation et des hommes
qui y habitent. A ce sujet, l’univers de certains décideurs
politiques, leaders d’opinion, experts économiques ou
militaires, est un vaste sottisier très déplaisant qui n’honore
nullement les citoyens.

Le cas le plus illustratif de ce
comportement post colonial qui consiste toujours à continuer
de s’émerveiller devant l’occupant d’hier que nous nous
targuons par ailleurs d’avoir chassé, vient de la République
démocratique du Congo.

En effet, lors de sa visite officielle en Belgique, le président
Joseph Kabila n’a pas craint de tenir des propos qu’on n’aurait
jamais imaginés même au plus fort de la colonisation belge.
Des propos qui méritent d’être intégralement repris car, même
un sujet du Roi Albert II aurait hésité longtemps avant de les
tenir. "L’histoire de la RDC disait-il, c’est aussi celle des Belges
missionnaires, fonctionnaires et entrepreneurs qui crurent au
rêve du Roi Léopold II de bâtir au centre de l’Afrique, un Etat.
Nous voulons à cet instant rendre hommage à la mémoire de
tous ces pionniers".

Devoir de mémoire à sens unique qui
blanchit et dispense la colonisation belge, pourtant l’une des
plus répressives, de se confesser. Une telle grâce
présidentielle, même si elle a des retombées
économico-financières sur la RDC, est indécente, face à
l’immense gâchis humain, économique et écologique dont s’est
rendu coupable le colonisateur belge.

Dans un tel contexte, même le fantôme de Lumumba n’oserait
plus roder autour de ce pays dont les responsables ont érigé
l’impunité au point d’oublier les crimes les plus odieux commis
par l’ancienne puissance tutrice. Et si par miracle il
ressuscitait, il s’empresserait de retourner dans sa tombe, car
insupportable est l’état dans lequel se trouve actuellement son
pays.

Alors que toutes les enquêtes, même diligentées par des
citoyens belges, ont prouvé l’implication directe des autorités
belges de l’époque, appuyées par la CIA, dans l’assassinat de
Patrice Lumumba, l’ actuel président congolais agite les
grelots de l’innocence de Bruxelles, pour cause, pourrait-on être
tenté de dire, de non-lieu.

Certes, Joseph Kabila n’est pas le
seul à détenir la palme de la démission face à l’obligation de ne
pas se dérober face à la vérité historique. On peut citer Laurent
Gbagbo qui se défend d’être un Jean- Bertrand Aristide. Or la
seule différence entre les deux, c’est qu’ils n’ont pas eu le
même parcours. L’ex-homme fort de Port-au-Prince est un
revenant après avoir exercé un premier mandat. Et c’est sous la
pression des Haïtiens qu’il est revenu au pouvoir à l’issue
d’élections. Malheureusement, il n’a pas su convertir ce capital
de popularité en un facteur de promotion de la démocratie, de la
bonne gouvernance et de la défense des morts humains.

Laurent Gbagbo devrait attendre un nouvel (improbable) appel
des Ivoiriens pour un second mandat avant d’avancer de telles
comparaisons.

Ces deux cas de figure ne sont pas les seuls
hélas, en Afrique. On n’oubliera pas de sitôt, le bouffon Jean
Bedel Bokassa décoré comme un arbre de Noël, et qui
s’affublait du titre d’ex-empereur alors qu’on continuait
d’appeler Napoléon empereur. Trop prétentieux cet homme, car
à ce qu’on sache, la République n’a pas précédé l’empire en
France alors que Bokassa avait contraint la République
centrafricaine à prendre le chemin inverse, faisant marcher les
Centrafricaines sur les braises ardentes de ses fantasmes.
Napoléon a eu au moins le mérite d’avoir été un bon soldat et
d’avoir laissé à la postérité le code napoléonien.

Face à de tels
responsables africains, il n’est pas étonnant que leurs
interlocuteurs occidentaux les prennent pour de simples
portraits et des marionnettes prêts à avaler toutes les
couleuvres de la dépersonnalisation. Des objets inanimés et
des animateurs de cirques pour agrémenter les soirées
mondaines des grands de ce monde.

L’on se demande parfois
s’ils se rendent compte des propos peu flatteurs qu’on distille
derrière eux. Voici ce que disait un général français de retour de
Côte d’Ivoire où il était chef adjoint de l’opération Licorne.
"Lorsque nous allons en Afrique, nous retrouvons souvent
d’anciens camarades. J’étais dans la même promotion que le
chef d’état-major ivoirien et à l’école de guerre avec le président
tchadien. Cela permet d’aplanir quelques difficultés". Nous voilà
en plein printemps des républiques des coquins et des copains
où le sort des populations est scellé dans des sortes de cours
de recréation.

Les Occidentaux, n’hésitent même pas à étaler
au grand jour certains comportements, censés relever de la
confidence et du secret, de nos responsables. Aussi, un officiel
français qui a ses entrées dans les arcanes, révèle-t-il.
"Contrairement aux Africains, les Irakiens ne laissent aucune
marge sur la table". Entendez par là, que les Africains mettent la
main à la poche, quand bien même, ils n’ont pas de pétrodollars.

Avec ça, pourquoi en vouloir à Jacques Chirac lorsqu’il
considère comme satisfaisant pour les Africains, le fait d’avoir
quelques grains (le surplus alimentaire des Occidentaux) à
picorer ? Ce minimum gastro-démocratique, selon lui, devrait
suffire pour faire taire les Africains.

Il l’a appris à ces dépens,
s’agissant des Français. Car, à la lumière des élections
régionales et cantonnales, les Français ont répliqué, par la voie
des urnes, que l’homme ne vit pas seulement de pain. Les
dirigeants africains n’ont pas encore assimilé cette mise en
garde du plus ancien livre, la Bible. C’est dommage !

Le Fou
Le Pays

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